Christian Saint-Etienne, économiste et ex-membre des Républicains, était l’invité de la matinale sur Radio Classique. Il alerte sur l’état de désindustrialisation de la France, qui alimente la « paupérisation » et le déficit de notre économie. Il revient aussi sur les grèves dans les raffineries de TotalEnergies, provoquées par des « syndicats durs ».
Le déficit extérieur français s’est creusé à 139 milliards d’euros, contre 85 milliards en 2021
Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a appelé hier une « partie du patronat à augmenter les salaires quand c’est possible », dans le contexte des grèves dans les raffineries et les transports publics. Cette demande est « totalement incohérente » selon Christian Saint-Etienne, qui estime qu’il faut plutôt résoudre le manque d’investissement. « Le problème central est un problème de productivité et de compétitivité », affirme-t-il. L’économiste balaye l’hypothèse d’un problème de demande dans le pays, inexistant « quand on a un déficit extérieur colossal [139 milliards d’euros sur 12 mois, contre 85 milliards en 2021]« . C’est plutôt l’offre qui l’inquiète, liée selon lui à la désindustrialisation qui « paupérise » le pays.
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Seulement trois secteurs continuent à exporter : l’aviation, le luxe et la chimie. « C’est un vieux problème. Quand Jean-Pierre Raffarin [alors Premier ministre] allait en Chine en 2004, il disait lui-même qu’il n’avait rien à vendre », raconte Christian Saint-Etienne. Pour 20 produits à proposer, l’Allemagne en avait 200, et les rapports de force sont restés à peu près les mêmes « voire se sont amplifiés en faveur des allemands », poursuit-il. La « politique énergétique suicidaire menée depuis 15 ans » est aussi responsable des difficultés, regrette-t-il. L’absence d’investissement dans le nucléaire et dans les barrages hydroélectriques par EDF assombrit les perspectives de croissance économique.
Georges Pompidou est le dernier président à avoir réindustrialisé la France, selon l’économiste
A l’arrivée, l’économiste déplore que la France soit « le seul grand pays de la zone euro frappé par ce double déficit« : déficit public et extérieur. « On prend l’Italie de haut, mais en réalité ils ont un énorme excédent extérieur », remarque-t-il. L’économiste demande de rétablir un ministère de l’Industrie et de « mettre le paquet sur la création de zones industrielles à grande échelle ». En somme, il plaide pour que la réindustrialisation soit au cœur des ambitions de l’exécutif, « comme ce fut le cas sous la présidence de Georges Pompidou ».
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Les blocages actuels dans les raffineries de TotalEnergies sont provoqués par des « syndicats durs » d’après l’économiste. Il fustige « certaines branches pseudo-révolutionnaires de la CGT », dont il assimile le fonctionnement à la Convention de 1793, où les décisions étaient prises en Assemblée à main levée. Selon lui, lors d’un vote à bulletin secret dans une raffinerie de TotalEnergies en grève il y a quelques années, « les 600 salariés avaient voté le retour au travail » mais lors d’un même vote cette fois-ci à main levée, 200 personnes avaient continué de bloquer la raffinerie. Par ailleurs, les troubles en cours ne font que chasser encore plus les investisseurs de l’Hexagone, martèle-t-il. Il prend à l’appui la construction d’une usine de microprocesseurs Intel dans le cadre d’un plan d’investissements de 100 milliards de dollars en Europe : la ville choisie a été Munich. « La France ne ramasse que les miettes. Il faut réindustrialiser et ne pas rester l’arme au pied ! », s’indigne-t-il.
Clément Kasser
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