Musique classique : Ces échecs devenus ensuite d’immenses succès

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Demandez le programme se penche sur la notion d’échec en matière de musique classique. Un four, un flop, un bide, voilà des notions très relatives car beaucoup d’œuvre classiques ont été des échecs à leur création. Avec le temps, ces œuvres mal comprises au départ ou malaimées ont été reconsidérées.

Le Barbier de Séville, pilier du répertoire lyrique

Commençons par ce premier exemple magistral avec Le Barbier de Séville de Rossini. La première a lieu le 20 février 1816 à Rome. Et là, c’est une série de catastrophes : instruments désaccordés, corde cassées, un chanteur se serait blessé, un chat aurait traversé la scène sous les rires du public. On parle même d’un complot ourdi contre Rossini par ses rivaux Spontini ou Paisiello. Toute la représentation sera perturbée par les ricanements, les moqueries, à la seule exception de la cavatine de Rosine, « Una voce poco fa », chantée par la contralto Geltrude Giorgi-Righetti qui sera rappelée à trois reprises.

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Bref, c’était mal parti pour le Barbier, mais non, l’opéra sera joué ensuite en Italie, puis en Europe puis aux Etats-Unis et après un début laborieux, il devient un pilier du répertoire lyrique dont l’ouverture est particulièrement appréciée du public.

 

Autre exemple avec certaines œuvres de Beethoven. Sa Symphonie n°2 ? Mal reçue. Son opéra Fidelio ne fut pas un grand succès mais le divorce entre Beethoven et le public de l’époque se joue avec les quatuors à cordes, très en avance sur l’époque. Exemple avec le Quatuor à cordes n°7 et surtout son 2e mouvement qui répète 15 fois la même note. A l’époque, le public n’est pas habitué. Même les musiciens de l’époque sont sceptiques évoquant une musique de cinglé. Ce à quoi Beethoven répond : « ce n’est pas pour vous c’est pour les temps à venir ». Au premier violon du quatuor qui interprète cette œuvre pour la première fois et qui se plaint de la difficulté technique, Ludwig rétorque « croyez-vous que je pense à vos pauvres cordes quand l’esprit me parle ». Voici le fameux 2ème mouvement qui provoqua l’incompréhension à l’époque et aujourd’hui l’admiration des connaisseurs.

 

Carmen de Bizet, une œuvre frappée de la malédiction des 3 ?

Carmen, qui eut cru que Carmen ferait le désespoir de son créateur, Georges Bizet ? L’opéra, qui reçoit un accueil critique mitigé est joué pour la première fois un 3 mars 1875. Il est, dit-on, frappé d’une malédiction, la malédiction des 3. Une première le 3 mars, le décès de Bizet désespéré le 3 juin, 3 mois plus tard le soir de la 33e représentation. Bizet serait même pris d’un malaise fatal lors du 3ème acte alors que la chanteuse de l’époque interprète le Trio des cartes et que le personnage tire la carte de la mort ! Superstition bien sûr, le mot de la fin va à Tchaïkovski qui donne dans la critique musicale à l’époque : « d’ici dix ans » écrit le musicien russe, « Carmen sera l’opéra le plus célèbre de toute la planète ».

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Qui peut concevoir que les début de Carmen ont désespéré Georges Bizet ? C’est le thème de cette émission, les œuvres qui ont fait un four avant de connaître le succès. Je vous parlais de Tchaïkovski, sachez que son Lac des Cygnes est mal accueilli lors de la première. Il existe à cela une raison. Le ballet placé sous la responsabilité du chorégraphe voit sa partition retouchée, corrigée car Julius Reisinger est un peu dépassé par les ambitions symphoniques du compositeur. C’est un peu le destin du Lac des Cygnes, Tchaïkovski ne vivra pas assez longtemps pour en voir une version conforme à ses souhaits. Il faut attendre les années 50 pour que le ballet serve, et la chorégraphie, et les intentions du compositeurs. Voici la valse de l’acte II.

 

La Symphonie n°1 de Rachmaninov a subi le même sort que les œuvres précédentes. Elle est créée le 15 mars 1897 à Saint-Pétersbourg et dirigé par un compositeur illustre : Alexandre Glazounov qui est ce soir là complètement ivre. L’accueil du public est si mauvais que Rachmaninov tombe dans une dépression dont il ne sortira que trois ans plus tard avec le Concerto pour piano n°2 qui fit sa gloire. N’empêche, il déchira la partition de sa symphonie n°1, celle ci ne fut plus jamais joué de son vivant. Il fallu des trésor de patience pour la reconstituer et la rejouer, à Moscou en 1945 avec cette épigraphe qui en dit long : C’est à moi qu’appartient la vengeance.

 

Claude Debussy moqué par Erik Satie pour son œuvre La Mer

Nous sommes le 10 octobre 1905. La Mer de Claude Debussy ne séduit pas le public lors de sa première audition. Il se dit que certains musiciens ont même confectionné des bateaux de papier avec la partition les faisant voguer sur le parquet de la salle de concert pendant les répétitions. Parmi les auditeurs, même Erik Satie très caustique et pourtant excellent camarade de Claude Debussy lui aurait écrit : « Mon cher Claude, dans le mouvement intitulé « de l’Aube à Midi sur la mer », il y a un moment que j’ai trouvé particulièrement fascinant… entre 10h30 et 10h45 ». La postérité sera plus avisée.

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Autre fiasco qui devint un classique, Madame Butterfly de Puccini. La première a lieu le 17 février 1894 à la Scala de Milan. Les moqueries et les sifflets démarrent dès le lever de rideau, qui sont les saboteurs et les ennemis de Puccini ? On ne le sait pas vraiment mais selon l’éditeur de la partition « le spectacle donné par la salle semblait aussi bien organisé que celui présenté en scène puisqu’il commença en même temps ». Pire, des chants d’oiseaux, simulés lors de l’intermezzo, donnèrent aux spectateurs l’idée d’imiter une basse-cour au grand complet. Cauchemar dans le poulailler… Puccini parla d’un « vrai lynchage » et l’opéra fut aussitôt retiré. Quelques semaines plus tard Puccini a repris son opéra, l’a retravaillé, l’a raccourci et simplifié. Et le 28 mai de la même année, c’est un triomphe. Madame Butterfly prendra son envol sur les scènes du monde entier, et pour longtemps.


Justice est ainsi faite à cet opéra de Puccini qui fut lynché à sa création mais joué en 2 016 868 fois, soit presque trois fois par jour sur les scènes internationales. Nous terminerons ce palmarès de fiascos avec Le Beau Danube Bleu de Johann Strauss Fils. En voilà un succès qui a fait le tour du monde, est joué et diffusé toutes les heures sur la planète entière. Eh bien au départ, il ne séduit pas le public car il est affublé de paroles ridicules.

 

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David Abiker

 

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