Emmanuel Macron pousse l’omniprésence médiatique à un niveau jamais atteint

Jacques Witt/SIPA

On a encore assisté à une interview télévisée d’Emmanuel Macron ce lundi 15 mai. Cela fait longtemps cependant qu’on a compris que le chef de l’Etat était un praticien de l’hyper-présidence ou, pour être plus précis, de l’omniprésidence. Mais là ça atteint un niveau inédit.

Faisons la liste : le 22 mars, une longue interview au 13h, 17 avril, allocution à 20 heures, 15 mai, entretien au 20h de TF1. Trois interventions télévisées en moins de deux mois, auxquelles il faut ajouter des longs entretiens dans la presse écrite : Le Parisien, Challenges, L’Opinion, le Financial Times, – et je ne parle pas de Pif Gadget. C’est ce qu’on appelle de la saturation médiatique.

Il y a aussi des déplacements sur le terrain qui s’enchaînent à un rythme effréné, de l’Alsace sur l’école à Dunkerque vendredi pour le coup d’envoi d’une usine de fabrication de batteries.

Vous connaissez l’expression, c’est du « carpet bombing », un tapis de bombes. On est très loin de la notion de rareté présidentielle qui avait été théorisée pour Mitterrand par le communicant Jacques Pilhan et très loin de ce qu’Emmanuel Macron avait promis lui-même au début de son premier mandat en décrétant la fin des présidences « bavardes ».

Au travers d’un contact parfois rude, Emmanuel Macron peut donner une image de courage

Son objectif est de sortir de l’ornière des retraites. Ça veut dire quitter le terrain où il est attaqué, ou sur la défensive, pour des terrains où il peut se montrer à l’initiative et à l’offensive.
Avec le sommet Choose France, il vient de conclure une longue séquence consacrée à l’attractivité du pays et au combat pour sa réindustrialisation.

C’est un thème positif, où il peut afficher des résultats concrets et qui doivent à la politique fiscale et économique qu’il a mise en place dès le début de sa présidence. C’est le Macron qui réussit.

Quant aux sorties répétées sur le terrain, bien sûr elles s’accompagnement de manifestations, et parfois d’insultes. Mais le chef de l’Etat montre qu’il n’est pas empêché et, par au travers d’un contact parfois rude, peut donner une image de courage.

Attention à la banalisation de la parole présidentielle

L’Elysée se félicite des audiences et des retombées de ces sorties ou de ces interventions médiatiques. Signe, selon les conseillers du président qu’il y a toujours une attente de Macron, un intérêt pour lui. Mais la stratégie n’est pas sans risque. Attention au péril de la saturation, donc de la banalisation de la parole présidentielle. Parler tout le temps, parler de tout, c’est risquer de n’être entendu sur rien.

Deuxième risque : qu’un excès de paroles soit considéré comme le masque d’un déficit d’action. C’est sans doute pour cela qu’il a voulu faire hier soir une promesse précise : la baisse de 2 milliards d’impôts pour les classes moyennes.

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Enfin, saturer l’espace recèle un troisième risque. Donner le sentiment que vous seul comptez et que vous ne faites pas confiance à la parole de vos propres amis pour œuvrer au rebond. Alors hier, il s’est vigoureusement défendu d’être « méprisant ». Il y a quelques années, à propos de Nicolas Sarkozy, Patrick Buisson avait parlé d’ « hypertrophie du moi ». Macron doit veiller à ne pas mériter aussi cette formule.

Guillaume Tabard

 

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