Allocution d’Emmanuel Macron : Pourquoi le président a-t-il l’intention d’aller vite ?

LUDOVIC MARIN-POOL/SIPA

Alors qu’il a promulgué la loi sur les retraites dès vendredi soir, Emmanuel Macron intervient à la télévision à 20h. Mais cet empressement est critiqué. Quelle est l’intention du chef de l’Etat ? 

L’intention d’aller vite pour Emmanuel Macron est évidente. Mais il faut d’abord tordre le cou à une petite musique distillée durant le week-end par ses opposants : le chef de l’Etat aurait promulgué la loi de nuit, comme s’il voulait faire ça en douce. C’est faux, c’est le Journal Officiel qui est mis en ligne la nuit, comme les journaux sont imprimés… la nuit, il n’y a rien de secret donc.

Ensuite, dans cette rapidité, Laurent Berger a vu du « mépris » et Marine Le Pen de la « provocation ». Mais d’abord, rappelons que promulguer une loi n’est pas un choix, c’est une obligation du président. C’est seulement s’il refusait de le faire qu’il sortirait des clous de la démocratie. Ensuite, le président a 14 jours pour le faire. Alors oui, il aurait pu attendre, mais pour quoi faire ? Ce que Laurent Berger, Jean-Luc Mélenchon ou Marine Le Pen réclament, c’est le : « pas de retraite à 64 ans« .

Sur le plan social, il reste de nombreux chantiers à évoquer pour le président

Si Emmanuel Macron avait promulgué sa loi dans 14 jours, l’opposition l’aurait accusé de mépris ou de provocation, 14 jours plus tard. Donc autant faire vite. Mais fallait-il faire vite pour apaiser le pays ou plutôt faire vite pour lancer d’autres chantiers ? Ce sont un peu les deux à la fois.

Il fallait surtout faire vite pour ne pas laisser s’installer de flottement dans la vie du pays. Rien n’aurait été pire qu’un climat d’entre deux. Une loi validée, mais non promulguée laisserait mouronner une contestation en recul, pourtant toujours forte, comme un feu mal éteint [lorsque le feu mouronne, il est incandescent et présente des risques NDR].

Cela empêcherait également de passer à autre chose sur le plan social déjà, puisque que les syndicats ne veulent pas entendre parler d’autre chose tant que l’on n’est pas franchement sorti de la séquence retraite. Et puis cela l’empêcherait de mettre sur la table d’autres sujets. Or, de l’école à l’hôpital, en passant par le travail ou la vie démocratique, il y a quantité de sujets qui ne peuvent pas rester en friche.

La réforme des retraites a monopolisé la première année de quinquennat d’Emmanuel Macron

Est-ce que ce sont ces chantiers qu’Emmanuel Macron va dévoiler ce soir ? Disons que le président n’a pas droit à l’erreur. Sa popularité s’est effondrée, son image s’est dégradée, ses marges de manœuvre sont rognées. Donc s’il ne trouve pas les mots ce soir, il lui sera très difficile de trouver un élan pour les quatre ans à venir.

Car n’oublions pas que ce quinquennat n’en est encore qu’à sa première année. Macron doit conjurer cette impression anticipée de fin de règne. Souvenez-vous, il avait tardé à se mettre en route après sa réélection.

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C’est le thème du livre de Ludovic Vigogne, Les sans jours (éditions Bouquins). Au fond, après un an, Emmanuel Macron n’a fait que les retraites. Ce n’est pas rien, au regard des vents contraires auxquels il a dû résister, mais cela ne suffit pas à faire un quinquennat. Et il ne peut pas se permettre à nouveau de procrastiner. Il doit repartir vite et fort. On verra ce soir si tel est le cas.

Guillaume Tabard

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