Emmanuel Macron s’est entretenu hier à la télévision. Le chef de l’Etat a-t-il su donner le coup d’envoi de l’après-réforme des retraites ?
La réforme des retraites a été adoptée, mais la contestation continue
Pour pouvoir donner le coup d’envoi de l’après-réforme des retraites, il aurait fallu qu’on soit passé justement dans cet après retraites. Or, on en est loin. Le texte a été adopté, mais la contestation continue, et est même en train de basculer dans une phase violente et inquiétante. Certains propos du chef de l’Etat ont pu apparaître tardifs et d’autres prématurés. C’est ceux pour justifier sa réforme qui étaient, en l’occurrence, tardifs. Il s’agissait de la partie la plus solide, la plus claire et la plus ferme de son intervention. Mais cela arrivait bien tard pour espérer convaincre une opinion sourde à la nécessité de travailler plus longtemps pour garantir le financement des retraites. Les propos prématurés concernaient, eux, ces chantiers qu’il veut maintenant lancer sur le travail, l’école, la réindustrialisation ou l’écologie. Car tant qu’on est dans la nasse d’une crise dont on ne voit pas encore l’issue, il est impossible d’entraîner sur autre chose.
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Il y a eu au moins une confirmation : Elisabeth Borne reste à Matignon. Le chef de l’Etat lui a renouvelé, hier, sa confiance. Mais si elle est confirmée, Elisabeth Borne n’est pas vraiment relégitimée. C’est au mieux une nouvelle période d’essai qu’il lui donne. Une période d’essai d’un mois, l’échéance qu’Emmanuel Macron lui a fixée pour parvenir à « l’élargissement de la majorité ». Vous noterez que ce n’est rien d’autre que la feuille de route qu’il lui avait dictée au lendemain de l’élection de cette Assemblée nationale sans majorité absolue. Au moment où l’exécutif n’est pas au mieux de sa forme dans l’opinion, on voit mal comment le même exercice aurait plus de chances d’aboutir aujourd’hui plutôt qu’hier. Alors en lui confiant cette mission, Emmanuel Macron a eu cette phrase : « j’espère qu’elle y parviendra ». On a connu soutien plus affirmé. Imaginez Didier Deschamps à la veille d’un match compliqué, dire de l’équipe de France : « J’espère qu’ils vont gagner ». Pour Elisabeth Borne, le message est limpide : si elle n’y parvient pas et bien Emmanuel Macron essaiera autre chose : un changement de Premier ministre ou, pourquoi pas, une dissolution.
Le texte de loi immigration est reporté
Sur le fond, le chef de l’Etat peut-il continuer à réformer ? Il le prétend. « Je n’ai pas le droit à l’immobilisme », a-t-il dit. Comme à chaque fois et comme tous les présidents avant lui, d’ailleurs. Mais ça, ce sont les mots. Car dans les faits, que se passe-t-il ? Le premier texte à venir était la loi sur l’immigration ; une loi sur laquelle l’accord était compliqué à trouver avec la droite. Le chef de l’Etat, le président du Sénat et la présidente de l’Assemblée en ont parlé. Devinez quoi ? Le texte est reporté et il sera même découpé en petits morceaux dans l’espoir qu’ils soient plus faciles à faire voter. On peut dire que c’est sage, que c’est prudent. Mais on peut aussi présenter la chose comme on veut et ce n’est pas de bon augure.
Guillaume Tabard