Après 4 ans de déforestation impunie, l’arrivée de Lula à la tête du Brésil rassure les Occidentaux sur le sort de l’Amazonie, deuxième plus grande forêt du monde. Mais il reste beaucoup à faire pour s’assurer d’un retour à la normale.
Entre septembre 2021 et 2022, la déforestation amazonienne a augmenté de 50%
Rétablir une surveillance de l’Amazonie et lutter contre toute extraction illégale : ce sont les promesses de Lula après sa victoire au second tour dimanche soir. Celle-ci devrait enrayer la déforestation galopante de ces dernières années et même de ces dernières semaines au Brésil. Le défrichage de l’Amazonie brésilienne a atteint 1.455 km2 au mois de septembre, soit 50% de plus qu’en septembre 2021. Tout le mandat Bolsonaro a été marqué par une destruction accélérée de cette forêt tropicale unique. « L’Amazonie a été considérée comme une frontière économique à repousser », analyse Catherine Aubertin, économiste de l’environnement à l’Institut de Recherche pour le Développement. Le président brésilien a favorisé l’appropriation de terres illégales et l’exploitation des minerais dans les zones indigènes. Pendant 4 ans, il y a eu « des signaux d’impunité totale », affirme-t-elle.
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La Norvège a dégelé les 487 millions d’euros au Brésil pour la protection de l’Amazonie
Négligence et impunité au profit des orpailleurs, des trafiquants, de l’agrobusiness, … De plus, Jair Bolsonaro a méthodiquement coupé les crédits alloués aux principales institutions publiques de protection de l’environnement, notamment l’IBAMA. Les chiffres sont clairs : En 2019, année de son entrée au pouvoir, la déforestation a immédiatement doublé pour atteindre 9.000 kilomètres carrés détruits. L’année dernière, plus de 13.000 km² ont été rasés, alors que Lula avait réussi à réduire par 4 la déforestation entre 2003 et 2011 : de 25.000 à 6.200 km² . Certes, l’Amazonie n’a pas été un sujet de campagne majeur au Brésil et Lula n’en a que peu parlé. Mais il sait que c’est « un symbole qui lui permet de briller à l’international » selon François-Michel Le Tourneau, spécialiste du Brésil et directeur de recherche au CNRS. « Il a tout intérêt à remettre en place une politique de contrôle qui font plaisir aux Européens et aux Etats-Unis, sans que ça lui coûte trop cher sur la scène nationale », poursuit-il. Le chercheur prédit un retour à la « normalité » avec des institutions « qui vont exercer leur rôle et faire baisser la déforestation ».
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Par exemple, la Norvège va redémarrer ses aides financières au Brésil – 487 millions d’euros, gelées sous la présidence Bolsonaro – pour la protection de l’Amazonie. Lula devrait par ailleurs renforcer les crédits des agences environnementales et faire appliquer les lois. Mais ce n’est pas pour autant la fin de la déforestation en Amazonie. « Il reste la déforestation légale qui permet de supprimer la végétation et la convertir dans un grand nombre de cas », notamment pour la production de soja, précise François-Michel Le Tourneau. C’est un enjeu majeur pour la souveraineté du Brésil et revendiqué par Lula. « Le Brésil a bien l’intention de fournir cette ressource et de s’enrichir avec », prévient-il. Il n’est pas impossible non plus de voir la déforestation augmenter dans un premier temps, certains producteurs voulant profiter de quelques semaines de liberté avant de se remettre à respecter la loi.
Baptiste Gaborit