C’est une bonne nouvelle : plusieurs usines françaises qui avaient dû fermer en raison de la flambée des prix de l’énergie sont en train de redémarrer. Mais on sait que l’énergie sera plus chère désormais, et de manière durable.
Duralex, dont la facture énergétique allait exploser, a redémarré après cinq mois de chômage forcé. C’est une bonne nouvelle, mais la crise nous a démontré que sans énergie, il n’y avait pas d’industrie. Et sans énergie compétitive, on n’a pas de producteurs compétitifs. Ce que la crise née dans le sillage de la guerre en Ukraine a révélé, c’est aussi notre vulnérabilité. Dans le monde d’avant, on prenait l’énergie pour un acquis.
Depuis un an, on s’est rendu compte qu’on était face à une double faiblesse. La première c’est que le prix de l’énergie peut exploser. La seconde c’est que même quand elle est chère, l’énergie n’est pas forcément disponible en quantité. Le pire de la crise est peut-être passé, mais la crise, pas totalement.
On a moins d’inquiétudes sur la quantité d’électricité et de gaz disponibles en France parce que les centrales nucléaires redémarrent et qu’on a diversifié nos sources d’approvisionnements en gaz. Les prix ont aussi commencé à baisser. Mais la mauvaise nouvelle c’est qu’on sait maintenant que l’on a basculé dans un monde dans lequel l’énergie sera durablement plus chère.
Pendant des années, l’accès à une électricité peu chère en France était un facteur de compétitivité
Il est vrai qu’on va vers plus de renouvelables et du nouveau nucléaire dont les coûts de production sont plus élevés. L’énergie sera aussi plus coûteuse parce pendant des années, on avait en France un parc nucléaire surdimensionné. On en avait lancé la construction à la fin des Trente Glorieuses en pensant que la croissance allait revenir.
En fait on a été victime de la désindustrialisation et de la crise économique. On produisait trop d’électricité, et résultat, EDF la vendait à bas prix. Pendant des années, cet accès à une électricité bon marché était l’un des rares facteurs de compétitivité de notre industrie.
En Asie, il y a le charbon, le pétrole au Moyen-Orient et le gaz de schiste aux Etats-Unis
La hausse durable des prix de l’énergie aura forcément un impact pour les entreprises françaises. Elle va augmenter leurs coûts et donc nourrir l’inflation. Le pire, c’est que l’énergie est beaucoup moins chère dans le reste du monde, aux Etats-Unis où ils ont du gaz de schiste, au Moyen-Orient où ils ont du pétrole, et en Asie où ils utilisent encore plus de charbon. Pour le made in Europe, c’est clairement une menace.
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La seule chose que l’on peut essayer de faire pour limiter la casse, c’est au moins de garantir une forme de stabilité des prix de l’énergie sur longue durée, via des contrats d’approvisionnement à long terme. Les industriels peuvent payer un peu plus cher leur électricité mais ils ont besoin de visibilité. Le pire c’est quand les prix jouent au yo-yo, ce qui oblige parfois à mettre dans l’urgence des usines à l’arrêt. Et ça, il ne faut pas que cela se reproduise tous les ans.
David Barroux