BEETHOVEN Ludwig van

(1770-1827) Epoque romantique

Épris de liberté, en musique comme dans la vie, Ludwig van Beethoven a repoussé les limites. Celles de la virtuosité pianistique mais surtout celles de la composition. Son ombre planera longtemps sur les générations suivantes, obligeant les compositeurs à se renouveler.

Les 3 périodes de composition de Beethoven :

  • 1770 : naissance à Bonn
  • 1792 : part à Vienne étudier avec Haydn
  • jusque vers 1800, 1ère période de composition
    Concertos pour piano n°1 et 2, Symphonie n°1, Sonate pour violon et piano n°5 “Le Printemps”
  • 1800 à 1814, 2ème période de composition
    Concertos pour piano n°3 à 5, Sonates pour piano n°16 à 26, Sonate pour violon et piano n°9 “Kreutzer”, Triple Concerto, Concerto pour violon, Symphonies n°3 à 8, Quatuors à cordes n°7 à 9 dits “Razoumovski”, Sonate pour violoncelle et piano n°3, Fidelio
  • 1802 : testament d’Heiligenstadt
  • Après 1814, 3ème période de composition
    Sonates pour piano n°30, n°31 et n°32, Missa Solemnis, Symphonie n°9, Quatuors à cordes n°12 à 16 et “Grande Fugue”
  • 1827 : mort à Vienne

 

Joseph Haydn lui apprend les ficelles du métier de compositeur

Son père voulait en faire un enfant prodige. Comme Mozart. Heureusement Beethoven échappe rapidement à la férule paternelle, et se forme auprès d’autres professeurs. En 1792, il part à Vienne travailler avec Haydn. Celui-ci dira l’année suivante : “Beethoven est appelé à devenir l’un des premiers compositeurs européens, et je serai fier alors de me présenter comme son maître”. Bel éloge d’un élève pourtant ingrat, qui prétendra plus tard “n’avoir jamais rien appris” de lui. En réalité le style beethovenien lui doit beaucoup. La concision de Haydn, une certaine nervosité avec ses accents sur temps faibles, et son langage harmonique, constituent une base de départ pour Beethoven. Tout modèle étant appelé à être dépassé, il cherchera à battre le maître sur son propre terrain : sonate pour clavier, symphonie et quatuor à cordes.

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Beethoven veut vivre libre, sans être attaché à un employeur

Au-delà de la musique, le statut social différencie aux yeux de la postérité l’élève et le maître. Haydn reste pendant trente ans au service du Prince Esterhazy, qui ne le considère guère mieux qu’un domestique. Beethoven, lui, se veut avant tout indépendant. Même s’il donne quelques leçons de piano, c’est d’abord grâce à la générosité des aristocrates viennois qu’il peut profiter d’une certaine sécurité financière. On est là dans une démarche de mécénat, assez rare à l’époque pour être soulignée. Beethoven est là encore redevable à Haydn, qui l’a introduit dans les cercles de la noblesse autrichienne. Lorsque les guerres napoléoniennes forcent ses généreux donateurs à réduire leur subvention, Beethoven bénéficie des recettes des concerts et de la publication de ses œuvres, qui sont bien accueillies du public.

Prince Joseph von Lobkowicz, l’un des mécènes de Beethoven

 

Devenu sourd, il se sent de plus en plus isolé mais trouve un réconfort dans la musique

Côté cœur, Beethoven est moins chanceux. Il tombe toujours amoureux de femmes inaccessibles. Qui est cette “immortelle bien-aimée” à qui il écrit en 1812 ? On l’ignore. Le cycle de lieder A la bien-aimée lointaine s’en fera l’écho trois ans plus tard. Les relations avec sa famille ne sont pas au beau fixe non plus. Beethoven s’obstine à obtenir la garde de son neveu après la mort de son frère. Mais le garçon n’a pour lui aucune affection et ne lui attire que des ennuis. Quant à l’aristocratie, si bienveillante jusqu’au Congrès de Vienne, elle prend ses distances lorsque le compositeur affirme ses idées démocratiques et révolutionnaires. D’autant que Beethoven passe pour un caractériel misanthrope. Si la diplomatie n’est pas son fort, sa surdité grandissante n’arrange pas ses relations avec son entourage. Beethoven ressent des acouphènes depuis 1796. Un compositeur sourd ! Afin de cacher cette terrifiante vérité, il s’isole de plus en plus. Des pensées suicidaires l’assaillent et il se confie en 1802 dans un document resté sous le nom de “testament d’Heiligenstadt”, lettre jamais envoyée et retrouvée après sa mort. Il surmonte cette grave crise morale en se donnant un but artistique résolument tourné vers l’avenir : “À dater d’aujourd’hui, je veux ouvrir un nouveau chemin”.

1er mouvement de la Sonate n°8 « Pathétique » (D. Barenboim)

 

Compositeur romantique, Beethoven innove et sort du cadre de ses prédécesseurs

A partir de 1800, Beethoven va progressivement faire éclater le cadre classique. Le respect des proportions, si cher à Haydn et Mozart et qu’il suit dans ses premières compositions, n’est plus du tout sa préoccupation. Beethoven inscrit ses œuvres dans une autre dimension temporelle. En témoignent les codas démesurément longues de la Symphonie “Héroïque” et du premier mouvement du Concerto pour violon, véritables seconds développements – qu’on a d’ailleurs pris l’habitude depuis de nommer “développement terminal” ! L’attention de Beethoven se tourne vers le rythme, souvent laboratoire d’expérimentation comme dans la Septième Symphonie ou la Sonate pour piano n°16 dite “La Boiteuse”. Enfin le menuet classique vole en éclat, remplacé par le scherzo. A deux temps et non plus trois, dans un tempo rapide au lieu du modéré habituel dans le menuet, le scherzo est l’une des signatures beethoveniennes. Le compositeur ira encore plus loin dans l’audace à partir de 1814. La Grande Fugue, d’abord pensée pour le Treizième Quatuor puis détachée, est un Everest qui effraie encore aujourd’hui nombre de quartettistes. De cette période datent aussi les dernières sonates pour piano, les fameux opus 109, 110 et 111, si déroutant à la première écoute. Beethoven affirme ne plus se soucier de ses contemporains. Peu lui importe d’être compris, il compose pour le public de l’avenir… et écrit du même coup la légende de l’artiste romantique. Liszt résumera plus tard l’évolution des trois périodes créatrices de Beethoven : “l’adolescent, l’homme, le dieu”.

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L’ombre de Beethoven planera longtemps sur les compositeurs des générations futures

Avec le développement de la musique imprimée, les partitions sont plus facilement diffusées à l’étranger et les œuvres de Beethoven sont reconnues à Berlin, Londres et Leipzig dès les premières années du XIXème siècle. A sa mort en 1827, il est connu de toute l’Europe. La France est en retard, car les guerres napoléoniennes n’ont évidemment pas encouragé la curiosité pour les œuvres d’outre-Rhin. Habeneck crée à Paris en 1828 la Société des Concerts du Conservatoire… pour faire connaître aux Français les symphonies de Beethoven! C’est ainsi que Berlioz les découvre. Mais le génie beethovenien impressionne. Pendant des années, Brahms n’ose pas se confronter au géant et laisse prudemment de côté la symphonie. Mahler renouvellera le genre en mêlant voix et orchestre, retenant ainsi la leçon de la Neuvième Symphonie du maître. Quant à Debussy, il choisit une autre voie après avoir déclaré : “Depuis Beethoven, la preuve de l’inutilité de la symphonie était faite”.

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“L’Ode à la joie” de sa Neuvième symphonie a été choisi pour être l’hymne européen

“La Neuvième” dépasse le cadre de la symphonie, en même temps qu’elle résume à elle seule toutes les audaces beethoveniennes. Elle est aussi un message de fraternité entre les peuples, avec son final “Ode à la joie” sur un poème de Schiller. L’Europe le choisit comme hymne en 1972. Ce n’est pas la seule œuvre de Beethoven porteuse d’un message à l’humanité. Son unique opéra Fidelio est un hymne à la liberté tout autant qu’un hommage à la fidélité conjugale. D’autres œuvres montrent son intérêt pour la voix (la Missa Solemnis, la Fantaisie chorale), mais c’est surtout dans ses concertos pour piano et dans ses symphonies que s’exprime la dimension universelle de la musique de Beethoven.

 

 

Sixtine de Gournay

 

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