Gérald Darmanin et Olivier Dussopt défendent ce matin dans Le Figaro leur projet de loi sur l’immigration. Un texte qui s’affiche équilibré entre humanité et fermeté, mais qui en réalité ne l’est pas.
Le texte veut concilier intégration des étrangers et double peine pour les délinquants
Le projet de loi « pour contrôler l’immigration et améliorer l’intégration » sera présenté en Conseil des ministres en janvier et arrivera au Parlement peu après. En terme d’affichage, ce texte se veut équilibré. Le projet de loi est porté par deux ministres, celui du Travail et celui de l’Intérieur ; le social d’un côté et le sécuritaire de l’autre. Il y aura donc de l’humanité et de la fermeté. Ce parallèle se poursuit avec l’identité des ministres puisqu’on le sait, Olivier Dussopt vient de la gauche et Gérald Darmanin vient de la droite. D’un côté, on établit un nouveau titre de séjour pour des métiers dits « en tension », et de l’autre, on rétablit la double peine pour les étrangers auteurs de délits sur le sol français. D’un côté, on veut mettre le paquet sur l’intégration, en s’assurant mieux qu’avant de la maîtrise du Français. De l’autre, on promet de raccourcir l’instruction des demandes d’asile afin de pouvoir mieux expulser. Equilibre, on vous dit.
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Le volet social du texte prend largement le dessus sur le volet sécuritaire
Un équilibre sur le papier ne veut pas forcément dire équilibre dans la réalité. Faisons la balance : quelques dizaines de milliers de titres de séjour seront accordés pour les métiers en tension. Mais est-ce que vous connaissez des métiers qui ne sont pas en tension ? Ensuite, qui dit régularisation de ces travailleurs dit regroupement familial, c’est-à-dire arrivée d’autres étrangers parce qu’il y aura toujours des besoins. Quant aux reconductions, elles ne s’élèveront pas aux dizaines de milliers. L’espoir de meilleure réussite des obligations à quitter le territoire (OQTF) restera très hypothétique. Dans le texte, il y a plein de dispositions concrètes et utiles. Mais de l’aveu même des ministres, il s’agit de mieux gérer la situation des étrangers qui sont ou qui arriveront en France, mais pas de viser une réduction de l’immigration. Or dans l’équilibre voulu par les Français, il y a sans doute un désir d’une meilleure intégration, mais il y a aussi certainement l’envie d’une baisse de la pression migratoire.
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Le gouvernement souhaite un compromis politique pour que ce projet soit voté au printemps. C’est surtout une obligation pour trouver une majorité. Si l’on nous parle d’équilibre, c’est avec la droite et uniquement la droite que l’exécutif peut espérer un accord. Mais on n’y est pas, parce que LR ne veut pas du nouveau titre de séjour. Dans Le Figaro, Gérald Darmanin leur tend la main et se dit prêt à les laisser amender son texte. Mais jusqu’où ? La question se pose pour les deux parties. Si j’avais à prendre un pari, je pense qu’un accord sera plus facile à obtenir sur la réforme des retraites que sur le texte immigration. Et peut-être même qu’un « oui » à la retraite à 64 ans poussera LR à dire non à un texte pour le moins très hybride sur l’immigration.
Guillaume Tabard