Projet de loi immigration : A quoi va servir le débat sans vote d’aujourd’hui à l’Assemblée Nationale ?

NICOLAS MESSYASZ/SIPA

Un débat sans vote sur l’immigration a lieu à l’Assemblée nationale cet après-midi. Un sujet sur lequel les citoyens s’agacent des grandes déclarations et de l’échec des lois successives. Mais l’exercice pourrait servir à clarifier plusieurs choses.

Un débat de ce type avait déjà eu lieu il y a 3 ans avec Edouard Philippe

Voter un projet ou une proposition de loi, une déclaration de politique générale ou une motion de censure, on voit bien à quoi ça sert. Cela a des conséquences législatives ou politiques concrètes. Un débat sans vote, c’est certes prévu dans la Constitution ; mais ce sont de simples déclarations d’intention de la part du gouvernement ou de simples postures de la part des groupes d’opposition. Pour l’opinion, un débat sans vote, ce sont des paroles… sans les actes. Or, s’il y a un sujet sur lequel les citoyens sont fatigués des grandes déclarations qui restent lettre morte, c’est bien l’immigration. D’ailleurs, il y avait déjà eu un débat de ce type il y a tout juste trois ans. Edouard Philippe était à Matignon et il s’était engagé sur six chapitres. Parmi ceux-ci : l’adoption de « quotas » pour l’immigration de travail – on les attend toujours ; un recalibrage drastique de l’aide médicale d’Etat (AME) – ça n’a évidemment jamais eu lieu ; ou encore une accélération des procédures d’expulsion. C’était en 2019 et c’est seulement maintenant qu’on s’y attaque, avec la loi Darmanin.

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Gérald Darmanin est prêt à laisser les LR amender son projet de loi commun avec Dussopt

Ce débat va justement servir de prélude à la discussion du projet de loi Darmanin-Dussopt. Il s’agit d’exposer à nouveau les lignes retenues par le gouvernement et voir ce que demandent les oppositions, plus particulièrement Les Républicains. Nous sommes toujours dans la même problématique : trouver une majorité au Parlement. Et sur un tel sujet, ce n’est pas avec la gauche, mais avec la droite qu’un accord peut être recherché. D’ailleurs, Gérald Darmanin ne s’en cache pas : il est prêt à laisser les LR amender son projet. Ce scénario n’était pas impensable tant que le cap gouvernemental était explicitement et exclusivement la fermeté, notamment pour lutter contre l’immigration irrégulière.

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Mais ce n’est plus le cas car par souci d’équilibre, le projet Darmanin étant devenu un projet Darmanin-Dussopt. C’est-à-dire qu’au volet régalien a été adjoint un volet économique : ce sont ces fameux nouveaux titres de séjour pour les métiers dits « en tension ». La droite a beau jeu de dire qu’on organise une nouvelle filière d’immigration. Et l’opinion le sait, ou en tous cas le croit : les arrivées, c’est toujours certain et immédiat. Mais les retours, c’est toujours hypothétique et différé. Donc au-delà même de la question du vote de LR, c’est la perception par l’opinion de ce projet de l’exécutif qui est en jeu. On verra si le débat sans vote de cet après-midi sera l’occasion de durcir le ton ou au contraire de maintenir à tout prix l’équilibre, au risque de l’incompréhension d’un électorat qu’Emmanuel Macron veut pourtant séduire.

Guillaume Tabard

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