Gérald Darmanin : La fuite de l’imam Iquioussen, un réel camouflet pour le ministre de l’Intérieur?

Jacques Witt/SIPA

Alors que Gérald Darmanin avait obtenu une victoire avec l’expulsion de l’imam radical Hassan Iquioussen, sa fuite vers la Belgique change radicalement la perception de l’affaire. Elle nuit à la crédibilité du ministère de l’Intérieur, qui ne peut cependant pas être tenu responsable.

Gérald Darmanin a eu un rôle actif pour obtenir la légitimité de l’expulsion d’un prédicateur islamiste et antisémite

Obtenir juridiquement d’expulser l’imam Hassan Iquioussen était une victoire pour le gouvernement, d’autant que ce n’était pas acquis. Mais pouvoir l’expulser concrètement, ça aurait été mieux. Les images des policiers venant appréhender l’imam chez lui et ne trouvant personne ont même un côté humiliant. Cependant, l’histoire n’est pas finie. On va peut-être finir par le retrouver, par l’interpeller et par l’expulser – si le Maroc consent à le reprendre. La volte-face de Rabat sur le sujet est un des aspects qui complique l’affaire.

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Certains dans la majorité disent : expulsé ou en fuite, l’essentiel est qu’Hassan Iquioussen ne soit plus sur le sol français. Mais dans un cas, l’opinion aurait pu applaudir à l’autorité de l’Etat et à un succès de la lutte contre l’islamisme. Dans l’autre, elle risque de se partager entre colère et moquerie face à un sentiment d’impuissance. En ce qui concerne Gérald Darmanin, je pense qu’il est victime et non pas responsable de ce revirement. Il a eu un rôle actif et positif pour obtenir la reconnaissance, dans le cadre de l’Etat de droit, de la légitimité de l’expulsion d’un prédicteur islamiste ouvertement antisémite. Le fait que l’imam en question file entre les doigts de la police est de la malchance.

L’image des policiers bredouilles devant le domicile de l’imam frappe plus les esprits que la décision du Conseil d’Etat

On peut s’interroger sur une absence de surveillance, mais là encore il y a un Etat de droit qui garantit des droits à quelqu’un qui n’est pas condamné. Gérald Darmanin préfère évidemment insister sur les possibilités réelles apportées par la loi dite séparatisme. Mais cette évasion l’empêche de profiter de la victoire juridique qu’il avait remportée lundi. Nicolas Sarkozy, qui est à la fois le prédécesseur de Darmanin à la place Beauvau et son modèle en politique, disait : « avoir de la chance fait partie du talent ». Dans cette affaire Iquioussen, Gérald Darmanin n’a pas de chance. Les traces laissées dans l’opinion, dans un monde politique où les symboles marquent plus profondément que le fond, peuvent être conséquente. En l’occurrence, l’image des policiers bredouilles devant le domicile de l’imam frappe plus les esprits que les décisions du Conseil d’Etat. L’enjeu pour Darmanin est de reprendre la bataille de la crédibilité – en d’autres termes, obtenir des résultats.

Guillaume Tabard

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