Coupe du monde au Qatar : « Pour la première fois, un pays organisateur le paye très cher en terme d’image »

Florian Schroetter/AP/SIPA

Vincent Duluc, journaliste à L’Equipe, et Vincent Chaudel, spécialiste de la stratégie business du sport, étaient les invités de la matinale. Ils reviennent sur les enjeux économiques et sportifs d’un évènement déjà entaché par les polémiques.

La Ligue arabe a déjà dénoncé une « campagne de dénigrement contre le monde arabe »

Ce dimanche débute une Coupe du monde de football particulière. La compétition, pour la première fois organisée dans un pays arabe et en hiver, « concentre tous les échos du monde » [et surtout les critiques sur son modèle environnemental et sociétal], ce qui « empiète un peu sur la vision sportive de l’évènement », regrette Vincent Duluc. Vincent Chaudel renchérit : « le Qatar est critiquable mais aujourd’hui, on le vexe. Il faut faire attention à la façon dont on présente les choses », avertit-il. Il salue la prise de parole du capitaine des Bleus Hugo Lloris, qui veut garder ses opinions pour lui et respecter la société qatarie [sous le feu des critiques pour son conservatisme envers les femmes et les minorités de genre]. Il fait remarquer que la Ligue arabe a déjà pointé du doigt « la campagne de dénigrement mené contre le Qatar et le monde arabe ». Pour autant, vouloir interdire toute forme de manifestation politique aux athlètes comme l’a réclamé la FIFA est « complètement absurde » d’après Vincent Duluc : « le choix, pour un athlète, de venir au Qatar est lui-même politique ».

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Le Qatar se sert de cette Coupe du monde pour développer son tourisme

Avec cet évènement, le Qatar va essayer de se doter d’un « nouveau pilier économique » selon Vincent Chaudel : le tourisme. L’émirat cherche à se diversifier et à ne plus reposer sur ses hydrocarbures, indique-t-il : le pays a par exemple quadruplé son nombre de chambres d’hôtel. Le spécialiste dresse la comparaison avec les Jeux Olympiques à Paris en 2024, pour lesquels de grands chantiers sont en cours dans la capitale et en dehors. « Un grand évènement sportif n’a pas vocation à gagner de l’argent, mais à gagner du temps dans une transformation », affirme-t-il. Néanmoins, Vincent Duluc se dit surpris que, « pour la première fois, un pays organisateur le paye très cher en termes d’image ». L’enjeu est économique aussi pour la France, pointe Vincent Chaudel : à cause des polémiques, les sponsors et les partenaires ont « très peu investi » en amont de la compétition. « Forcément, l’équilibre économique pour les diffuseurs va être étroitement lié à la performance de l’équipe de France », qui va essayer de décrocher une troisième étoile.

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D’un point de vue sportif, cette Coupe du monde signe le « crépuscule de très grands joueurs comme Lionel Messi [35 ans], Cristiano Ronaldo [37 ans], Karim Benzema [34 ans] ou Robert Lewandowski [34 ans] », cite Vincent Duluc. Mais à des « histoires de vieux » pourraient aussi succéder des « histoires de jeunes » talents, poursuit-il. Le journaliste sportif voit bien le Brésil l’emporter, une équipe « qui n’a pas perdu depuis longtemps et qui maîtrise le plus de choses », avec un « Neymar au sommet de son art » et une défense solide. Quant aux Bleus, touchés par une vague de blessures [Raphaël Varane, Paul Pogba, Presnel Kimpembé, …], ils peuvent « constituer une force » justement parce qu’ils vont susciter moins d’attente, affirme Vincent Duluc.

Clément Kasser

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