8 milliards sur Terre : En termes de ressources, « pour l’instant, c’est vivable », assure le démographe Hervé Le Bras

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Hervé Le Bras, démographe et historien, était l’invité de Renaud Blanc dans la matinale de Radio Classique. La croissance démographique ne met pour l’instant pas en danger la lutte contre la faim, rassure-t-il. Il ajoute qu’entre 2065 et 2085, la population mondiale atteindra son pic et commencera à décliner.

En 2023, l’Inde deviendra la nation la plus peuplée du monde avec 1,43 milliards d’habitants

Ce mardi 15 novembre, l’humanité a dépassé la barre des 8 milliards d’habitants, selon une projection des Nations-Unies. Un chiffre « fiable » selon le démographe Hervé Le Bras. « Depuis 1963, les prévisions de population de l’ONU ont toujours été en accord avec ce qui s’est ensuite passé », justifie-t-il. Il précise que, par pays, les projections peuvent être imprécises voire tomber « très loin de leur cible » mais une « sorte d’effet de moyenne » rend l’estimation mondiale correcte. La dynamique démographique actuelle est en faveur des Indiens, qui devraient détrôner la Chine dès l’année prochaine. « C’est la fécondité qui dirige la croissance démographique », précise Hervé Le Bras, auteur d’Il n’y a pas de Grand Remplacement (Grasset). Dans le cas indien, elle est de 2,2 enfants, soit deux fois plus qu’en Chine.

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Avoir un tel nombre d’êtres humains est pour l’instant vivable, assure le démographe : « avant le Covid, la proportion de personnes qui souffraient de la faim a plutôt diminué ». De même, l’espérance de vie continue de progresser doucement dans le monde – si on exclut l’épisode pandémique et les Etats-Unis, où elle décroche depuis 2019. Reste la question du climat : il est certain que « si on était 1 million de personnes dans des cavernes comme au paléolithique, on n’aurait pas de problème [de réchauffement climatique] », avance le démographe. Mais selon lui, « le problème vient de la consommation et pas du nombre d’hommes ». Par exemple, un habitant du Niger produit 0,15 tonnes de CO2 par an et un américain en produit 15 tonnes : « Donc chaque fois qu’il y a un Américain de plus sur Terre, [c’est équivalent à] 100 Nigériens de plus sur Terre », analyse-t-il. La question de la nourriture est aussi cruciale d’après lui : le « partage de nourriture et d’eau » sera, dans le futur, « le plus compliqué à gérer ».

« L’explosion démographique » en Afrique est à nuancer, avertit Hervé Le Bras

Quand la population mondiale va-t-elle commencer à diminuer ? 2065 selon l’institut démographique européen IIASA et 2085 d’après l’organe des Nations-Unies. « Mais tout le monde est d’accord que d’ici 2100, la population aura déjà baissé », affirme Hervé Le Bras. Aujourd’hui, le taux de croissance démographique annuel se tasse à environ 0,95%, contre 2,2% en 1970, freiné par un taux de fécondité aussi en berne. Même si « une assez petite partie du monde » connaît une explosion démographique – l’Afrique à partir du Sahel jusqu’au Zambèze, en Afrique australe – Hervé Le Bras veut en nuancer ses effets. Il avance que l’Afrique du Sud et le Maghreb ne sont plus qu’à 2,3 enfants par femme. De même, les rapports pays du Nord-pays du Sud ne sont pas vérifiés sur les questions de fécondité : c’est bien la Guyane française qui connaît la plus forte fécondité d’Amérique du Sud, alors que le Brésil n’est qu’à 1,7 enfants par femme. Le démographe ajoute que la population européenne n’est pas en danger de déclin mais est « stabilisée », notamment grâce à un « apport migratoire qui compense la fécondité inférieure à 2 enfants par femme ».

Clément Kasser

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