L’Union Européenne va bien se doter d’une loi contre la déforestation importée. Un accord a été trouvé cette nuit entre les Etats membres et le Parlement européen.
L’Union Européenne est responsable de 16% de la déforestation mondiale
Cette loi sera la première en son genre dans le monde. Elle interdira toute entreprise d’importer sur le territoire européen certains produits issus de la déforestation à l’autre bout du monde. Actuellement, le Vieux Continent est le plus grand contributeur à la déforestation importée avec la Chine, remarque Pascal Canfin, président Renaissance de la commission Environnement du Parlement européen. C’est lui qui menait les négociations cette nuit. « Comme nous ne produisons pas d’huile de palme, nous importons tout d’Asie du Sud-Est et nous contribuons massivement au défrichage des forêts primaires », transformées en plantations d’huile de palme, explique-t-il. Le phénomène s’étend aussi à l’Afrique. L’Union Européenne serait ainsi responsable de 16% de la déforestation mondiale via ses importations selon les calculs du WWF. Le bétail, notamment le bœuf, le soja, l’huile de palme, le café, le cacao, le bois sont concernés par ce texte. « Maintenant, lorsqu’on achètera ces produits, on aura la certitude qu’ils n’ont pas contribué à la déforestation », souligne Pascal Canfin, satisfait.
A lire aussi
L’interdiction ne concerne pas toutes les terres boisées, regrettent les ONG
Le charbon de bois et le caoutchouc, dont la production menace notamment les forêts d’Afrique de l’Ouest ont été ajoutés à cette liste. Le texte concerne évidemment la déforestation dans les forêts du monde entier. La Commission européenne devra évaluer un an après l’entrée en vigueur de la loi s’il faut élargir le texte à d’autres écosystèmes. C’est un enjeu majeur : le Parlement européen comme les ONG demandaient d’inclure d’autres écosystèmes boisés, comme les savanes du Cerrado en Amérique du Sud. Il s’agit d’un écosystème aussi grand que la moitié de l’Union Européenne, « détruit pour la culture du soja et pour que les bovins paissent », note Eric Moranval, chargé de campagne forêts à Greenpeace France. Au sud du Brésil, le Cerrado est couvert à 10% par des champs de soja. Il ajoute que des communautés autochtones vivant sur place se retrouvent également menacées. Les ONG voulaient en fait étendre l’interdiction à toutes les terres boisées : « il en existe beaucoup en Afrique et en Europe qui seraient concernées », poursuit-il.
A lire aussi
Le Parlement européen et le Conseil européen doivent maintenant adopter ce nouveau texte. Les opérateurs auront ensuite 18 mois pour appliquer ces nouvelles règles. Ils devront pouvoir prouver à tout moment que les produits qu’ils importent ne sont pas issus de la déforestation, grâce à des données de géolocalisation et à des photos satellitaires. Le niveau d’exigence sur la traçabilité des produits dépendra du niveau de risque de déforestation de la région productrice, risque identifié par la Commission européenne. Cette loi historique pourrait donner des idées à d’autres pays. Les Etats-Unis, par exemple, qui observent de près le texte selon Pascal Canfin.
Baptiste Gaborit