Ottorino Respighi incarne, aux côtés d’Alfredo Casella et Gian Francesco Malipiero, le renouveau de la musique instrumentale italienne au XXe siècle après un règne sans partage de l’opéra (de Rossini à Puccini). Ce natif de Bologne apprend les premiers rudiments de la composition avec Giuseppe Martucci avant d’étudier en Russie avec Rimsky-Korsakov dont il héritera la virtuosité de l’écriture orchestrale, faite de coloris éclatants et d’un amour sensuel des timbres. Autant de qualités perceptibles dans sa rutilante « Trilogie romaine » (Les Fontaines de Rome, Les Pins de Rome et Fêtes romaines) et sa manière de revisiter les œuvres du passé.
Ottorino Respighi en 10 dates :
- 1879 : Naissance à Bologne
- 1899 : Etudie auprès de Rimsky-Korsakov en Russie
- 1913 : Nommé professeur de composition à l’Académie Sainte-Cécile de Rome
- 1916 : poème symphonique Les Fontaines de Rome
- 1917 à 1932 : Airs et Danses antiques, trois suites d’orchestre
- 1919 : Ballet La Boutique fantasque.
Épouse l’une de ses anciennes élèves, la chanteuse Elsa Olivieri-Sangiacomo - 1924 : poème symphonique Les Pins de Rome
- 1928 : poème symphonique Fêtes romaines. Suite pour petit orchestre Les Oiseaux
- 1933 : opéra La Fiamma
- 1936 : Mort à Rome
Le jeune Ottorino éprouve d’emblée un vif intérêt pour l’orchestre symphonique, lui consacrant ses premières compositions, et consultant avec avidité les partitions des grands maîtres
Né à Bologne en 1879, Ottorino Respighi fait ses premières expériences musicales en autodidacte avant de s’inscrire au Lycée musical Gioacchino Rossini, où il étudie le violon avec Federico Sarti puis la composition avec Luigi Torchi et surtout Giuseppe Martucci, pianiste et compositeur admiré par Liszt, figure de proue du renouveau musical italien. Le jeune Ottorino éprouve d’emblée un vif intérêt pour l’orchestre symphonique, lui consacrant ses premières compositions, et consultant avec avidité les partitions des grands maîtres, notamment Beethoven et Wagner. Fort de son expérience d’instrumentiste au sein de l’orchestre du théâtre de Bologne et son diplôme de violon en poche, il parvient à se faire engager en tant qu’altiste à l’opéra italien de Saint-Pétersbourg. Et fait l’une des rencontres essentielles de sa vie en la personne de Rimsky-Korsakov, auprès de qui il travaillera cinq mois : « Les leçons ne furent pas nombreuses, mais elles furent pour moi fondamentales », devait-il déclarer plus tard. Tandis qu’il consacre le plus clair de son temps à la musique vocale à travers des mélodies, destinées à son épouse chanteuse, et quelques essais opératiques plus ou moins concluants, l’opportunité lui est donnée de se fixer à Rome comme professeur à l’Académie Sainte-Cécile en 1913. Résolu à apporter sa pierre à l’édifice du renouveau symphonique de son pays, Respighi s’essaye à la direction d’orchestre et déambule dans les rues de la « ville éternelle », espérant y puiser l’inspiration.
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Son orchestration, gorgée de luxuriance et de sensualité, atteint une capacité d’évocation inégalée dans Les Pins de Rome
Après avoir donné une Sinfonia drammatica pleine de bruits de guerre en 1914, Respighi complète deux ans plus tard Les Fontaines de Rome, premier volet de ce qui allait devenir sa « Trilogie romaine ». Ce poème symphonique exprime les visions suggérées par quatre fontaines célèbres, à des heures où « le caractère de chaque fontaine s’harmonise le mieux avec le paysage environnant, ou celle où leur beauté s’impose le plus à l’observateur ». L’orchestration, gorgée de luxuriance et de sensualité, atteint une rare capacité d’évocation, surpassée huit ans plus tard par le joyau de la série, Les Pins de Rome. Créé à New York par Arturo Toscanini en 1928, le dernier volet, intitulé Fêtes romaines, ne connaîtra jamais le succès des deux précédents, sans doute en raison d’un langage à la fois plus âpre et plus emphatique. Entretemps, Respighi a pu laisser libre court à sa passion pour les musiques anciennes, opérant du même coup une incursion dans le néoclassicisme via ses brillantes orchestrations de Rossini (La Boutique fantasque, pour les Ballets russes de Diaghilev en 1919, puis Rossiniana, 1925), sa suite Les Oiseaux (d’après des pièces pour clavecin de Pasquini, Gallot, Rameau et autres musiciens baroques, 1928) et ses Airs et danses antiques (1917-1932).
Kent Nagano dirige l’Orchestre Symphonique de Montréal dans le final des Pins de Rome
Les Trois préludes sur une mélodies grégoriennes pour piano révèlent le penchant mystique de Respighi.
Complétés à la faveur d’un séjour à Capri en 1921, les Trois préludes sur une mélodies grégoriennes pour piano révèlent le penchant mystique de Respighi et son intérêt pour les chants grégoriens, lesquels allaient modeler par la suite les thèmes du Concerto grégorien pour violon (1923), mais aussi imprégner les « Pins près d’une catacombe » (deuxième partie des Pins de Rome), la Toccata pour piano et orchestre (1928) et maints passages du Triptyque botticellien (1927). De son voyage aux Amériques, le compositeur rapporte dans ses bagages les Impressions brésiliennes (1928), gorgées de soleil, de couleurs bigarrées et d’accents sud-américains. Si son ultime opéra, Lucrezia, demeure inachevé, il clôt sa carrière lyrique en beauté avec La Fiamma (1934), inscrit dans la lignée du mélodrame italien, ses airs à numéros et sa générosité mélodique. La mort prématurée de Respighi à 56 ans laisse la « ville éternelle » en deuil . Mais ses fontaines, elles, ne laissent pas de chanter la musique de celui à qui elles doivent une part non négligeable de leur célébrité.
Jérémie Bigorie