Pablo Heras-Casado poursuit une trajectoire de carrière qui ne finit pas de surprendre. Aussi brillant dans les chefs-d’œuvre symphoniques que dans les fosses des plus grandes maisons d’opéra du monde ou au contact d’orchestres baroques, le chef d’orchestre espagnol fait partie de ces rares interprètes qui couvrent avec aisance cinq siècles de musique occidentale.
Pablo Heras-Casado à propos de l’Orchestre de Paris : « un lien magnifique nous unit »
L’interview qu’il a accordée à Laure Mézan montre l’étendue de son répertoire à travers ses différents engagements : les opéras de Monteverdi au Staatsoper de Vienne, une production de Siegfried de Wagner au Teatro Real de Madrid (avec public !), la publication avec l’Orchestre de Paris d’un disque consacré au modernisme de Stravinsky et la création contemporaine d’un concerto de Péter Eötvös. Deux œuvres dans lesquelles il embrasse tout le poids de la tradition transmise par ses deux derniers maîtres, Pierre Boulez et Eötvös lui-même. A tout cela s’ajoute le répertoire symphonique classique et romantique avec l’Orchestre Baroque de Fribourg, orchestre qu’il considère comme sa « famille musicale » : « nous jouons ensemble depuis 10 ans, et on a encore beaucoup de projets ». Le chef espagnol nous promet donc encore plus de Schubert et de Mendelssohn, une exploration du répertoire germanique qu’il poussera même jusqu’au romantisme de Brahms. Ces projets complèteront une discographie déjà bien fournie par l’intégrale des concertos de Schumann ou le Triple Concerto de Beethoven avec Isabelle Faust, Jean-Guihen Queyras et Alexandre Melnikov.
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Pablo Heras-Casado entretient également une relation privilégiée avec l’Orchestre de Paris, par lequel il est régulièrement invité : « un lien magnifique nous unit, cela a été un coup de cœur lors de notre premier concert ensemble il y a cinq ans (…) il y a une alchimie spéciale ». Cette association artistique est doublement d’actualité, d’abord avec la publication d’un enregistrement dédié à Stravinsky et Eötvös, puis par la diffusion le 1er mai sur Mezzo d’un concert enregistré dans la nef du musée d’Orsay. Après une Symphonie Tragique de Mahler sous la direction de Jukka-Pekka Saraste l’an dernier, l’Orchestre de Paris a donc de nouveau investi la nef du Musée d’Orsay pour un programme dédié à Ravel. Donner un concert dans cet espace acoustique si particulier est un challenge pour Pablo Heras-Casado : « jouer au musée d’Orsay est une vraie inspiration visuelle et artistique (…) être dans la grande nef avec cet espace acoustique très particulier représente un défi, mais un défi qui donne de nouvelles couleurs et offre des sensibilités différentes ».
Le Sacre du Printemps : « La vision apprise auprès de Pierre Boulez m’a beaucoup marquée » déclare Pablo Heras-Casado
Le disque que Pablo Heras-Casado publie avec l’Orchestre de Paris est traversé de l’esprit de ses deux derniers maîtres, Pierre Boulez et Péter Eötvös. L’esprit du premier s’exprime dans Le Sacre du Printemps, une œuvre que le chef espagnol a énormément travaillé avec son maître français, l’un des plus éminents spécialistes de la musique du XXème siècle et plus particulièrement de cette partition : « cette vision apprise auprès de Pierre Boulez m’a beaucoup marqué (…) c’est une des icônes du répertoire, une pièce qui ne vieillit jamais, toujours choquante, bouleversante et immensément révolutionnaire ». Cent ans après le scandale de sa création, Le Sacre se situe donc à un carrefour interprétatif décisif dont le plus grand danger selon Pablo Heras-Casado serait de céder à une interprétation routinière dans une partition dont l’essence même ne laisse aucune place à la routine, à l’habitude et aux poncifs : « on s’habitue parfois à cette musique, on croit qu’on la connaît (…) il faut renouer avec le danger et le risque pour l’interpréter ».
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La seconde pièce de cet enregistrement avec l’Orchestre de Paris est le Concerto pour Violon – « Alhambra » de Péter Eötvös, ultime œuvre d’un triptyque concertant dédié au violon et dont la deuxième pièce avait déjà été créée sous la direction de Pablo Heras-Casado. Cette troisième œuvre a été commandée par le chef d’orchestre espagnol et écrite pour la violoniste Isabelle Faust : « j’ai commandé cette œuvre quand j’étais directeur du Festival de Grenade (…) on y retrouve une fascination pour les couleurs exotiques et le côté intime du dialogue entre la soliste et l’orchestre ». Pablo Heras-Casado effectue donc son retour auprès d’une œuvre qu’il connaît bien et dont il a assuré les créations mondiales et françaises (avec l’Orchestre de Paris et Isabelle Faust en septembre 2019).
Pablo Heras-Casado pourrait diriger le premier opéra en public à la réouverture du Staatsoper de Vienne
Pablo Heras-Casado est actuellement en pleine répétition du Couronnement de Poppée au Staatsoper de Vienne, le premier volet d’un cycle dédié aux opéras de Monteverdi qui se déroulera sur trois ans : « c’est la première semaine de répétition d’un opéra qui sera joué pour la première fois au Staatsoper de Vienne (…) nous en sommes pour l’instant aux répétitions sur le clavecin avec les chanteurs uniquement ».
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Avec une première représentation prévue le 22 mai, le public viennois a bon espoir de retrouver le chef espagnol en chair et en os suite à l’annonce du gouvernement autrichien d’une réouverture des lieux de culture à partir du 19 mai : « il semble qu’une réouverture se dessine, Le Couronnement de Poppée pourrait donc être le 1er opéra présenté au public depuis la pandémie ! »
Rémi Monti
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