L’affaire Quatennens continue de faire des remous. Elle est en train de provoquer un séisme au sein de la France insoumise, en raison des accusations de violences conjugales, bien sûr, mais surtout en raison de la réaction de Jean-Luc Mélenchon.
Quand les accusations ont visé Darmanin ou Abad, il fallait qu’ils démissionnent sur le champ, selon LFI
Après la confirmation, par Adrien Quatennens lui-même, du dépôt d’une main courante par son épouse qui demande le divorce, le leader des Insoumis a fait un tweet pour saluer « le courage » et la « dignité » du député de son parti. Non pas la dignité des faits, mais le courage de les avoir reconnus publiquement. Mais même si Mélenchon a complété sa réaction dans une deuxième tweet, beaucoup dans son propre camp lui ont reproché de n’avoir pas eu un mot de soutien à la victime supposée. Sur le terrain de la politique, ce qui a choqué et pèsera sur l’image des Insoumis c’est de défendre par principe les siens alors que LFI s’est voulu en pointe dans la dénonciation des violences faites aux femmes.
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Quand des accusations ont visé Gérald Darmanin ou Damien Abad, des opposants politiques donc, il n’y avait pas de présomption d’innocence qui tenait, pas d’enquête contradictoire à faire ; il fallait qu’ils démissionnent séance tenante. Mais quand des accusations ont concerné Tahar Bouafs, Eric Coquerel ou Adrien Quatennens, le premier réflexe dans le camp Mélenchon c’est de s’en prendre à ceux qui sortent les affaires, et de ne bouger que sous la pression médiatique et politique. Intransigeance envers les uns, indulgence envers les autres, c’est ce deux poids deux mesures qui donne vraiment l’impression d’un fonctionnement clanique de la mouvance Mélenchon.
Guillaume Tabard : « C’est comme sous la Révolution, les procureurs finissent un jour par devenir des accusés »
Cela peut rejaillir sur l’ensemble de la gauche. Tous les partis qui ont rejoint la Nupes ont dû avaler bien des couleuvres et accepter la tutelle de Jean-Luc Mélenchon. Mais là, la violence faite aux femmes et plus globalement la transformation de tout espace privé en terrain politique, c’est l’ADN de beaucoup, chez Les Verts ou à LFI. Et là, il y a une impossibilité à tout concilier et à tout accepter. Donc c’est au sein de la gauche d’abord, que la réaction de Mélenchon sur l’affaire Quatennens suscite polémique ou indignation. Et on voit le cercle vicieux provoqué par la moralisation de la politique ou la politisation de la morale. C’est comme sous la Révolution, les procureurs finissent un jour par devenir des accusés. Et ainsi de suite. Avec toujours la part d’hypocrisie quand une affaire touche quelqu’un de son propre parti.
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Cela peut conduire à une explosion de la Nupes, pas uniquement à cause de cette affaire. Mais faites la liste : depuis la rentrée, les motifs de querelle n’en finissent pas d’exploser à gauche. Un jour c’est le barbecue, symbole machiste pourfendu par Sandrine Rousseau, un autre c’est le communiste Fabien Roussel qui a le mauvais goût de dire qu’il est préférable de toucher un salaire que des allocations quand la même Sandrine Rousseau réclame un « droit à la paresse ». Il y a des sujets de fond, d’autres plus symboliques. Mais à chaque fois, cela révèle des clivages idéologiques entre des partis réunis par un cartel électoral. Avec toujours des grands mots et des oukases. Les professeurs de tolérance se révèlent chaque jour plus intolérants entre eux. On peut effectivement se demander combien de temps ça tiendra.
Guillaume Tabard