La Fête de l’Humanité se voulait unitaire avec la présence de Jean-Luc Mélenchon, mais les propos du patron du parti communiste Fabien Roussel sur les allocations ont au contraire ravivé les tensions. La question du travail pourrait devenir un nouveau point de clivage au sein de la NUPES.
Les propos de Fabien Roussel ont été largement critiqués par les insoumis, les écologistes et les socialistes
Jean-Luc Mélenchon n’était pas venu à la Fête de l’Humanité depuis 2016. Sa présence cette année était donc un symbole fort, d’autant plus que les relations entre les insoumis et les communistes sont très sinusoïdales. Contrairement à 2012 et 2017, le PCF n’a pas soutenu Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle de 2022 et a présenté son propre candidat. Le leader insoumis en veut aux communistes parce qu’il considère que sans les 2,3 % de Fabien Roussel, il aurait été au second tour à la place de Marine Le Pen. Cette tension est devenue visible ce week-end avec une phrase de Fabien Roussel : « la gauche doit défendre le travail et ne pas être la gauche des allocations et des minimas sociaux ». Ses propos lui ont valu les foudres d’une grande partie de la gauche, y compris des écologistes et des socialistes. Selon eux, cette opposition entre travail et prestations sociales ou « assistanat » correspond plutôt au discours traditionnel de la droite et du macronisme.
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Ces mots sont totalement inhabituels dans la bouche d’un dirigeant de gauche qui s’érige en défenseur de la protection sociale. Que le « parti des travailleurs » finisse par défendre la suprématie des revenus du travail sur toute forme d’allocation, au-delà du filet nécessaire de protection face aux accidents professionnels, a de quoi surprendre. Cela a une incidence sociologique et électorale : la gauche a perdu les travailleurs qui sont partis avec armes et bagages vers le Rassemblement National ou se sont réfugiés dans l’abstention.
Le socle électoral de Jean-Luc Mélenchon n’est pas le centre de gravité de la France qui travaille
Ce qui est réellement nouveau, c’est le début d’une prise de conscience de ce divorce sociologique. Elle est apparue chez Fabien Roussel ou encore chez François Ruffin, le député de la Somme qui est en quelque sorte un insoumis non mélenchoniste. Jean-Luc Mélenchon a su réveiller électoralement la gauche et il répète à tous ceux qui critiquent sa stratégie : « allez-y, faites mieux ! ». Mais lorsqu’il rappelle qu’il est arrivé en tête chez les chômeurs, chez les titulaires d’un CDD, chez les moins de 26 ans ou dans ce qu’on appelle pudiquement les « quartiers », il souligne en creux que son socle électoral n’est pas le centre de gravité de la France qui travaille. Dans cette querelle interne à la Nupes, il y a des susceptibilités personnelles et des rivalités d’appareil, mais on voit aussi qu’il y a un débat de fond sur la stratégie et l’identité de la gauche.
Guillaume Tabard