Le secteur du numérique et les data centers représentent encore 10% de la consommation électrique en France. Mais ces infrastructures énergivores peuvent aussi s’insérer dans les objectifs de sobriété énergétique, comme le prouve le nouveau data center de Saint-Denis, conçu pour redistribuer de la chaleur à certaines parties de la ville.
Le nouveau data center de Saint-Denis va redistribuer sa chaleur à la piscine olympique et au quartier proche
A quelques centaines de mètres du Stade de France à Saint-Denis, un data center tente de compenser sa consommation d’énergie. Ce nouveau site est inauguré ce jeudi 6 octobre par l’Américain Equinix, un des leaders mondiaux des data centers. « On a déjà un des plus grands campus numériques de France avec 40.000 mètres carrés », se félicite Anass Mhaidra, directeur du site de Saint-Denis. Dans chaque salle, des tours sont disposées : ce sont les serveurs où les données des clients sont hébergées. Cette ferme numérique fonctionne à plein régime en continu. « C’est évidemment énergivore mais on répond à un besoin pour les téléphones et les ordinateurs », poursuit Anass Mhaidra. Le besoin en refroidissement, capital pour gérer ces serveurs qui surchauffent facilement, représente « 60 à 65% de la consommation totale d’un site », indique David Lhussiez, directeur des programmes d’Equinix France.
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Le processus de baisse de température produit paradoxalement de la chaleur : de l’air chaud est relâché à l’extérieur du data center, c’est ce qu’on appelle « la chaleur fatale ». L’innovation de ce site est de réemployer cette « chaleur perdue » pour qu’elle « serve à quelqu’un », explique David Lhussiez. Ce nouveau site a donc été construit pour redistribuer la chaleur à quelques centaines de mètres de là, dans le Centre Aquatique de Saint-Denis qui est en cours de construction pour les Jeux Olympiques de 2024 et dans un tout nouveau quartier qui sortira de terre en 2026. « Par l’intermédiaire de pompes, on réhausse la chaleur de 26 à 65 degrés. A terme, on va pouvoir fournir cette énergie renouvelable sur une surface de 200.000 m², piscine, commerce et logements compris », détaille-t-il.
Malgré un coût de 4 à 6 millions d’euros, les économies pour Saint-Denis seront importantes
En France, quelques data centers chauffent déjà des petites structures. Mais un projet de cette ampleur est une première selon Laurent Monnet, maire adjoint de Saint-Denis et président du SMIREC, le réseau de chauffage urbain local. Malgré un coût de mise en place de 4 à 6 millions d’euros, les économies pour la ville seront non négligeables d’après lui : « la piscine a des équipements très énergivores alors quand le prix de l’énergie augmente comme aujourd’hui, ça devient dramatique pour les finances ». Ce projet devra servir d’exemple à l’avenir. « On a déjà une dizaine de data centers sur notre territoire, il est temps de se demander si on n’est pas déjà allé trop loin. Si d’autres doivent être construits, on défendra l’obligation que la chaleur soit récupérée », s’engage-t-il. Equinix s’est en tout cas engagé à fournir gratuitement pendant 15 ans la « chaleur fatale » de son nouveau data center à la ville de Saint-Denis.
Laurie-Anne Toulemont