Les géants de la distribution comme Leclerc ou Carrefour brandissent la menace d’une explosion de l’inflation alimentaire : le député Frédéric Descrozaille (Renaissance) va présenter une proposition de loi qui vise à renforcer l’encadrement des négociations entre les distributeurs et leurs fournisseurs.
Avec les centrales d’achats, les distributeurs unissent leurs forces pour peser davantage face aux fournisseurs
Dans le commerce, quand vous vendez la même chose que vos concurrents, vous n’avez pas cinquante manières de vous différencier. Vous pouvez travailler sur la qualité ou l’originalité de votre offre, vous pouvez miser sur les services. La localisation reste aussi un facteur très important, mais ce qui compte le plus c’est le prix. Surtout sur un produit du quotidien comme un camembert, un baril de lessive, un alcool anisé ou une pâte à tartiner. Si vous voulez gagner des parts de marchés, il faut vendre le moins cher possible. Et pour être compétitif tout en préservant ses marges, il faut acheter au plus bas prix et pour cela, la clef est d’acheter en très grosses quantités. C’est pour cela que les grands distributeurs s’unissent pour former ce qu’on appelle des centrales d’achats. Ils rassemblent leurs forces pour peser davantage face aux fournisseurs.
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Pourquoi les députés en veulent aux centrales d’achats ? Vous avez d’un côté une dizaine de gros distributeurs qui unissent leurs forces et de l’autre une armada de fournisseurs plus ou moins gros. Le rapport de force est un peu déséquilibré car les marques ne peuvent pas se passer des grandes chaînes de magasins. Les centrales d’achats sont souvent accusées par les industriels comme par une partie des députés d’être trop puissantes et d’étrangler leurs fournisseurs. Pour éviter des abus de position dominante, la loi française a encadré le pouvoir des centrales françaises. Mais les rois de la distribution sont malins, ils ont créé avec d’autres distributeurs étrangers des centrales d’achats européennes basées hors de France et qui échappent aux lois françaises. Des députés présentent mercredi 11 janvier un projet de loi qui obligerait ces centrales internationales à les respecter.
Les centrales d’achat font sans doute plus mal aux PME qu’à Coca-Cola, Nestlé ou Danone
Il n’est pas sûr que cela soit légal. Dans le passé, quand la France a condamné les pratiques de ces centrales d’achats européennes, la justice européenne a donné tort à la France. Ensuite, il y a le risque de nourrir un peu plus l’inflation. Si on réduit la puissance des centrales d’achats, les prix risquent d’augmenter. Et comme on est déjà dans un contexte inflationniste, ce n’est peut-être pas le meilleur moment. Enfin, les centrales européennes achètent surtout auprès des grosses multinationales qui génèrent de bonnes marges et qui vendent des produits dont les distributeurs ont du mal à se passer. Les centrales font sans doute plus mal aux PME qu’à Coca-Cola, Nestlé ou Danone.
David Barroux