Nutella veut produire ses noisettes en Italie et s’attire des critiques

Janine/wikimedia commons

En Italie, Nutella est engagé dans une guerre des noisettes qui illustre bien les difficultés de faire du circuit-court. Le groupe a lancé un « Projet noisette Italie » car aujourd’hui, le Nutella -vous ne le savez pas forcément-, est très largement made in Turquie, pour ce qui est en tout cas de sa matière première la plus savoureuse : les noisettes.

Nutella a promis une traçabilité à 100% de ses noisettes

Tiens, savez-vous quel est le pourcentage de noisettes dans un pot de Nutella ? 13%. L’huile de palme c’est 20%, et le sucre 55%, de quoi regarder différemment votre pot de Nutella à la maison. Multipliez ça par 400.000 tonnes, et vous avez la production annuelle de Nutella. Les noisettes viennent donc de Turquie, à quasiment 75%, nous disent ce matin Les Échos. Un volume tellement énorme qu’à lui seul Ferrero achète un tiers de toute la récolte turque, ce qui avait valu au groupe italien une polémique sur son recours à une main d’œuvre composée notamment d’enfants. Alors en 2018 Nutella lance son projet, « progetto nocciola Italia » et en 2019, la marque promet une traçabilité à 100% de ses noisettes. Il fallait réagir, car Nutella perd des parts de marché face à des concurrents réputés plus sains.

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Noisettes : l’Italie est le 2e producteur mondial derrière la Turquie

La démarche paraît intéressante, mais tout ne s’est pas passé comme prévu. Un tel volume nécessite quelques noisetiers. Et ça ne se décrète pas, ça se plante, les noisetiers. Imaginez, Ferrero se transforme alors en aménageur de la campagne italienne avec le besoin de 20.000 hectares de noisetiers dans le pays. C’est une augmentation de 30% de la surface de ces arbres en Italie, qui était déjà le 2e producteur mondial derrière la Turquie. Il faut produire dans de nouvelles régions, et non plus uniquement dans le Latium, la Campanie, le Piémont et la Sicile. Pour s’assurer un volume et une stabilité de production, Ferrero va contractualiser, c’est-à-dire qu’il va aller voir les producteurs, et leur dire : on vous achètera vos noisettes à 2,50 € le kilo, quelle que soit la qualité du fruit. Ça a été perçu comme une aubaine. Mais il y a au moins deux problèmes d’ordre environnemental : des paysages entiers sont chamboulés, transformés, et cela encourage la monoculture, à l’encontre donc de la biodiversité. Voilà qui illustre à merveille la difficulté que peuvent avoir des entreprises à concilier les aspirations sociétales avec le passage à l’échelle quand on s’appelle Ferrero et qu’on produit du Nutella en centaines de milliers de tonnes.

François Geffrier

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