« Entendre quelqu’un siffler un de mes airs est la plus belle récompense » : Vladimir Cosma fête ses 83 ans

ERIC DESSONS/JDD/SIPA

Vladimir Cosma, compositeur de plus de 500 musiques de films, fête ce 13 avril ses 83 ans. Il a publié ses mémoires en octobre 2022. A cette occasion, il se confiait à Radio Classique sur son immense carrière, entre relations compliquées avec certains compositeurs et inspirations musicales diverses.

Dans ses mémoires Du rêve à Reality (Plon), Vladimir Cosma revient sur une carrière immense dans la musique de film, longue de plus de 50 ans. Celle-ci débute plus ou moins en 1968 avec le film Alexandre le Bienheureux du réalisateur Yves Robert. « Avoir une telle amitié musicale et artistique avec un réalisateur, ça m’est arrivé seulement avec lui », se souvient-il. Mais ses relations dans le monde du cinéma n’ont pas été de tout repos.

Le compositeur d’origine roumaine se rappelle avoir vécu une « totale rivalité » avec d’autres musiciens qui créaient pour le septième art, notamment avec l’italien Ennio Morricone pour le film L’As des As de Gérard Oury. De même avec Michel Legrand, qui a eu une part très importante dans sa réussite. Le maître n’a pas supporté l’émancipation de son élève, exacerbée lors du César de la meilleure musique de film en 1982. Vladimir Cosma a raflé la récompense pour Diva, devant Michel Legrand et le film Les Uns et les Autres. « Il n’y a pas eu de rupture mais un refroidissement », qui a duré jusqu’à la mort du compositeur en 2019, raconte-t-il. « Ses enfants, que j’avais vus quand ils étaient très jeunes, voulaient me revoir ».

Après ses concerts aux Etats-Unis, Vladimir Cosma se ruait dans les jazz-clubs

Dans sa jeunesse, un professeur lui avait conseillé de noter ses idées de mélodies sur des cahiers de musique. C’est ainsi qu’est né le thème de Rabbi Jacob selon lui, immense succès avec Louis de Funès à l’affiche. « Lui et Gérard Oury [le réalisateur du film] avaient adoré la musique », narre-t-il. Interrogé sur la proximité de la bande originale de Diva avec les Gymnopédies d’Erik Satie, Vladimir Cosma affirme plutôt que son inspiration venait d’ailleurs : « je pensais à la Roumanie et à ses plaines ». Il obtiendra le César de la meilleure musique sans même se rendre à la cérémonie. « Je ne pensais pas l’avoir », glousse-t-il.

Pendant son enfance à Bucarest, en Roumanie, Vladimir Cosma se rappelle avoir été « biberonné au classique » dans une famille de musiciens. Celui qui a connu Chostakovitch et Prokofiev affirme que « les communistes adoraient la musique », mais pas n’importe laquelle. Quand il montre son amour pour le jazz, genre qu’il adore « depuis ses 13 ans grâce à Gerry Mulligan et Chet Baker », il est obligé de quitter le conservatoire et travailler pendant un an dans une usine de ventilateurs.

« Ma vie en Roumanie n’a pas été un supplice, il y a eu des hauts et des bas », nuance-t-il. Il émigre en France en 1962 « pour son amour du pays », pas à cause du communisme, insiste-t-il. Lors de ses tournées aux Etats-Unis, il rencontre les plus grands musiciens de jazz comme Chet Baker et Miles Davis. « Après mes concerts classiques, vers 23h, j’allais dans les boites où on jouait du jazz », se rappelle-t-il.

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Encore aujourd’hui, à 83 ans, « la plus belle récompense est quand j’entends quelqu’un siffloter un de mes airs », déclare-t-il. Il y a longtemps, il avait entendu des peintres en bâtiment siffloter l’air du Grand Blond avec une chaussure noire sur une toiture : « ça m’avait ému […] l’amour du public est inoubliable, bien plus que des Césars ou des titres honorifiques ».

Clément Kasser

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