Le tweet de Thomas Portes, le pied posé sur un ballon à l’effigie d’Olivier Dussopt, a électrisé l’Assemblée vendredi dernier. Avec le recul, peut-on parler de bavure ou d’intention délibérée de la part de LFI ?
L’incident a conduit à suspendre la séance et à prendre une sanction contre Thomas Portes
Le tweet en lui-même est une bavure. Une bavure grave, une bavure choquante car poser le pied sur un ballon où est affichée la tête du ministre du Travail, c’est choquant. Mais il s’agit aussi d’une bavure car je pense que Thomas Portes, en faisant cette photo et ce tweet, n’a pas mesuré l’impact symbolique de ce qu’il faisait. Ce qui ne l’excuse pas pour autant. Mais que s’est-il passé à l’Assemblée le vendredi 10 février ?
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Il a pris la parole en séance ce jour-là pour défendre un amendement. Si, comme tous les autres groupes le lui demandaient, il avait accepté de s’excuser ou, au minimum, de retirer son tweet, cela aurait pris trente secondes. Ça n’aurait pas déclenché cette après-midi extravagante. Donc oui, à la faute de la photo, s’est ajoutée la volonté délibérée d’électriser, de bloquer, de « bordéliser » – reprenons le mot – le débat sur la réforme des retraites.
Laurent Berger a condamné ces violences
Quel est l’intérêt de LFI d’entretenir cette polémique ? De Jean-Luc Mélenchon à Louis Boyard, c’est-à-dire du plus ancien au plus jeune, les cadres de LFI sont formatés par l’école trotskiste. Et chez eux, tout est permis pour déstabiliser l’adversaire et tout leur est permis. Alors premier point : on ne s’excuse jamais, on ne reconnaît jamais ses torts et on s’arrange pour transformer l’autre en coupable. Ainsi, poser fièrement le pied posé sur un ballon qui ressemble à une tête décapitée ? Mais c’est de l’humour ! Et si vous êtes choqués, c’est bien la preuve que c’est vous les ennemis de la liberté d’expression. Bloquer une après-midi entière du débat parlementaire sur ce sujet ? Mais enfin, nous ne demandons qu’à défendre un amendement, ce sont les macronistes qui font de l’obstruction – je n’invente rien, c’est l’argument qui a été brandi – pour empêcher que l’on débatte et que l’on vote sur les retraites. Ce qui témoigne d’un aplomb certain de la part d’un parti qui a déposé 20.000 amendements sur le texte, impossibles à tous examiner d’ici vendredi.
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Le spectacle donné à l’Assemblée est déplorable et le premier effet sera un dégout accru pour le théâtre politique. Mais c’est aussi ce que cherche LFI. Il faut que l’opinion se dise : cette réforme des retraites met le bazar, sortons-en. Et comme la réforme est impopulaire, les mélenchonistes font le pari que la responsabilité de ce bazar sera imputée en priorité au gouvernement. Mais même dans le monde merveilleux de la Nupes, il y a des limites et beaucoup de gens – même à gauche – s’inquiètent d’une dérive vers une violence verbale et symbolique, en redoutant pire, que rien ne pourrait plus arrêter. En condamnant ces violences Laurent Berger a souligné à quel point ce mauvais théâtre politique desservait la cause qu’il prétend servir.
Guillaume Tabard