Jacques Offenbach, roi de l’opérette : Découvrez sa vie à travers ses plus belles musiques

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Découvrez un nouvel épisode de Demandez Le Programme, l’émission de David Abiker ! Il nous parle cette fois du roi de l’opérette, Jacques Offenbach, à travers ses plus belles pièces.

 

Jacques Offenbach est aussi turbulent à l’Opéra-Comique qu’il l’était au conservatoire

Jacques Offenbach est né à Cologne le 20 juin 1819. Il s’appelle à l’époque Jakob, il est le 2ème fils d’une famille juive de 10 enfants. Il apprend d’abord le violon avec son papa, puis le violoncelle. A 9 ans il compose déjà, et bien sûr il les interprète avec Julius et sa sœur qui jouent du violon et du piano. La fratrie se produit dans des bals, des auberges, de la musique à danser ou des airs populaires d’opéra. Ils sont si bons ces petits, qu’à l’âge de 14 ans Jakob est envoyé par son père à Paris accompagné par son grand frère Julius qui lui, en a 19. Une fois en France, Isaac le père fait des pieds et des mains pour que son fils soit auditionné au conservatoire de Paris par son directeur. Cherubini finit par accepter. Il écoute Jakob puis l’interrompt brusquement : « assez, jeune homme, vous êtes maintenant un élève de ce conservatoire ». Son frère Julius aussi. En France, Jakob et Julius deviendront Jacques et Jules, c’est plus simple. Jules se plaît au conservatoire, Jacques s’y ennuie et le quitte après une année d’étude et prend un poste de violoncelliste à l’Opéra Comique. C’est l’époque où il compose.

 

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Jacques Offenbach est aussi turbulent à l’Opéra-Comique qu’il l’était au conservatoire. Il fait des farces pendant les représentations, se voit privé de sa paye. Un jour il sabote les pupitres qui s’effondrent d’un seul coup pendant que l’ensemble joue. Il peut faire le malin, il a un talent fou et ses pièces pour violoncelle ont du succès. Monsieur fréquente « la haute », le salon de la comtesse de Vaux, il y tombera même amoureux d’Herminie d’Alcain la fille d’un général, mais pas assez riche, il lui est impossible de se marier. Alors il compose des mélodies inspirée par Les Fables de La Fontaine.

 

 

En 1844, aidé par la famille d’Herminie qu’il n’a pas pu épouser, Offenbach se lance dans une tournée anglaise et il plaît au point d’être engagé par les plus grands musiciens du moment, y compris Mendelssohn. Jacques rentre à Paris avec une réputation et les moyens d’épouser Hérminie. Enfin. Sauf que le petit juif de Cologne doit se convertir au catholicisme, avec la comtesse de Vaux comme marraine. Le mariage a lieu le 14 août 1844, la fiancée a 17 ans et lui 25. A l’époque, ça ne choque personne, et c’est un mariage d’amour qui durera toute la vie, malgré quelque écarts de Jacques. On l’appelle maintenant Offenbach, il compose de plus en plus, publie des partitions, et certaines se vendent bien. En avril 1846, il donne un concert pendant lequel sept pièces d’opéra de sa propre composition sont créées devant lui, des critiques sont là. Il compose en 1847 son premier grand concerto pour violoncelle, dit Concerto militaire.

 

Offenbach inaugure son propre théâtre, les Bouffes-Parisiens, en 1855

Offenbach est sur le point de réaliser son ambition : se consacrer à la composition théâtrale mais la révolution de 1848 éclate et renverse Louis-Philippe. Offenbach part à Cologne et revient un an plus tard quand les événements se sont tassés. Les grand salons sont désormais fermés et il doit reprendre son travail de violoncelliste et de chef occasionnel à l’Opéra-Comique. Remarqué par le directeur de la Comédie-Française, il devient directeur musical du théâtre, avec un mandat pour agrandir et améliorer l’orchestre. Début 1850, il compose des chansons et de la musique de scène pour onze drames classiques et modernes. En 1953 une grande élégie pour violoncelle et piano lui est inspirée par un poème d’Arsène Houssaye, le directeur de la Comédie française : Les larmes de Jacqueline.  Entre 1853 et 1855, Offenbach écrit trois opérettes en un acte et réussit à les monter à Paris. Elles sont bien reçues, l’Opéra-Comique le boude. Que faire ? Créer son propre théâtre bien sûr. « Aux Champs-Élysées », racontera Offenbach plus tard, « il y avait un petit théâtre à louer, construit pour le magicien Lacaze mais fermé pendant de nombreuses années. Je savais que l’Exposition de 1855 amènerait beaucoup de monde à cet endroit. En mai, j’avais trouvé vingt commanditaires et le 15 juin j’ai obtenu le bail. Vingt jours plus tard, j’ai réuni mes librettistes et j’ai ouvert le Théâtre des Bouffes-Parisiens ».

 

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Offenbach devient chef d’entreprise ! Il va recruter du personnel, des auteurs, des acteurs, un orchestre. C’est ainsi qu’il va collaborer avec Ludovic Halévy, un fonctionnaire inspiré qui sait écrire et versifier. Un travail commun de 24 années commence qui débouchera sur plus d’une vingtaine d’œuvres. Les deux premières pièces d’Offenbach et Halévy pour le nouveau théâtre sont Ba-ta-clan (en 1855), une Chinoiserie musicale et Tromb-al-ca-zar (en 1856) Le succès est au rendez-vous. Offenbach a un théâtre, du succès, ses œuvres font salle comble, la collaboration avec Halévy fonctionne parfaitement mais il est sans arrêt au bord de la faillite. Il dépense sans compter pour son théâtre des Bouffes-Parisiens, pour les décors, les costumes, il a en plus du mal à payer les artistes. En 1858, il compose sa première opérette, Orphée aux Enfers, présentée en octobre 1858. Les décors sont de Gustave Doré, les costumes sont somptueux, et le casting compte vingt personnes, grand chœur et orchestre. C’est là qu’Offenbach fait un coup de maître. Les premières représentations d’Orphée aux enfers vont provoquer un scandale à la suite d’une critique assassine qui dénonce le manque de respect de l’œuvre envers Napoléon III. La polémique enfle mais le librettiste d’Offenbach y répond dans Le Figaro, l’affaire prend de l’ampleur au point que le public a très envie de voir ce spectacle qui pourrait déclencher le courroux impérial. Non seulement le public se presse pour voir Orphée aux enfers, non seulement Offenbach renfloue les caisses de son théâtre, mais en plus l’Empereur viendra voir le spectacle sans y trouver matière à l’interdire, au contraire ! Avec ses valses qui rappellent Vienne et son cancan final, Orphée aux enfers ouvre à Offenbach les portes du paradis…ce sera son plus grand succès populaire.

 

 

Halévy est bientôt rejoint par Henri Meilhac pour la rédaction des livrets

Loin de choquer Napoléon III, l’opérette plaît à l’empereur qui accorde personnellement la nationalité française à Offenbach en 1860. Le musicien a 41 ans, l’année suivante il obtient la Légion d’honneur. Des théâtres plus importants comme celui des Variétés se l’arrachent. Il quitte les Bouffes-Parisiens. Entre 1864 et 1868, Offenbach compose La Belle Hélène, La Vie parisienne (1866), et La Périchole (1868). Halévy est bientôt rejoint par Henri Meilhac pour la rédaction des livrets. Avec ces deux-là, Offenbach parle de la Sainte Trinité : « Je suis sans doute le père, mais chacun des deux est mon fils et plein d’esprit ». Pour La Belle Hélène, c’est Hortense Schneider, star de la scène musicale française, qui joue le rôle-titre. Elle coûte cher la Belle Hélène, fait des caprices, retarde et chamboule les répétitions, et la censure s’en mêle qui fustige la satire de la cour impériale. Mais une fois de plus Offenbach passe entre les gouttes, profite de ce qu’on appelle aujourd’hui un buzz et la Belle Hélène va se faire voir à Paris, pas chez les Grecs, avec un joli succès. Après La Belle Hélène, il y aura La Vie parisienne. Finis les décors classiques, pour la première fois dans une pièce de cette importance, on choisit des décors modernes, on est en 1866, le succès est immédiat exalté par sa vedette, Zulma Bouffar, qui entame alors une liaison avec Offenbach, et cela va durer 9 ans.

 

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En 1868, La Périchole marque une transition dans l’œuvre d’Offenbach. La satire est moins virulente, la partition plus charmante, plus tendre. La critique n’apprécie pas ce changement, mais le succès public, dû en grande partie à Hortense Schneider, est une fois de plus au rendez-vous. Rattrapé par l’Histoire, l’Empire va sombrer dans la guerre de 1870. Offenbach lui, s’installe en Espagne à l’abri des canons avant le déclenchement de la guerre franco-prussienne. Il a 51 ans. A cet époque, on le surnomme « l’oiseau moqueur du Second Empire ». Il a été le fou du roi, celui qui a amusé Paris sous la dictature impériale. Bien pratique pour Napoléon III, ce Monsieur Jacques Offenbach. Lorsque l’Empire s’effondre, la musique d’Offenbach tombe en disgrâce. À la fin de 1871, la vie à Paris est redevenue normale. Le musicien y revient mais ce n’est plus pareil.

 

Hortense Schneider

 

 

Offenbach prend la tête du Théâtre de la Gaîté en juillet 1873 mais ne parvient pas à attirer le public : l’argent, toujours l’argent, qui manque, qui file. Heureusement en 1875, Le Voyage dans la Lune permet au musicien de renouer avec le succès. En 1876, Offenbach entreprend une tournée triomphale et rémunératrice aux Etats-Unis. Il se produira au Gilmore’s Garden devant une foule de 8.000 personnes. Suivront 40 concerts à New York et Philadelphie. Pour jouer le dimanche alors que c’est interdit, il transforme ses œuvre en musique sacrée : « Dis-moi, Vénus » de La Belle Hélène devient une litanie, et d’autres numéros tout aussi profanes sont présentés comme « des prières » mais les autorités locales ne s’y trompent pas, les spectacles du dimanche sont annulés . De retour en France, les opérettes tardives d’Offenbach connaissent une certaine popularité, en particulier Madame Favart (1878) et La Fille du tambour-major (1879). En 1877, Offenbach travaille sur une pièce de théâtre, Les Contes fantastiques d’Hoffmann. Il a vieilli, souffre de la goutte, on le porte sur une chaise. Il est inquiet de ne pas finir ses contes. On l’entend même dire à Kleinzach son chien : « Je donnerais tout pour assister à la Première ». Malheureusement, il meurt à Paris en 1880 à l’âge de 61 ans, laissant une partition vocale pratiquement complète et un début d’orchestration. La République toute jeune a adopté celui qui fit chanter le Second Empire. Elle lui organise des funérailles d’État. Le Times écrit : « La foule des hommes distingués qui l’ont accompagné lors de son dernier voyage, au milieu de la sympathie générale du public, montre que le regretté compositeur était compté parmi les maîtres de son art ».

David Abiker et Camille Taver

 

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