La flûte, c’est pas du pipeau

Beaucoup ont connu le plaisir (ou la torture) de la flûte au collège. Cette flûte à bec rendait bien peu justice à ce magnifique instrument à vent. Souvent en plastique, sa sonorité était bien différente de la flûte à bec en bois, et encore davantage de sa cousine la flûte traversière. Que vous ayez définitivement rangé l’instrument dans son étui ou que vous le pratiquiez encore, on vous propose aujourd’hui de réviser le vocabulaire des flûtistes.

Bois : matériau de fabrication, ou classification parmi les instruments de musique ?

On dit de la flûte qu’elle est « un bois ». Pourtant, quand on regarde une flûte traversière, on voit bien que ce n’est pas son matériau. Elle est faite en maillechort, en argent ou (plus rarement) en or, voire en platine. La sonorité change en fonction du métal… le prix aussi. Mais « les bois », c’est la famille d’instruments à vent à laquelle appartient la flûte, comme le hautbois, la clarinette et le basson. Autrefois, la flûte était bien en bois (cf. ci-dessous Traverso), d’où cette dénomination. Le métal a progressivement été adopté au cours du XIXème siècle, et donne à la flûte un son plus clair et qui projette plus.

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Piccolo : ce n’est pas parce que c’est plus petit que c’est plus facile

Plus petit que sa sœur la flûte, le piccolo est aussi beaucoup plus aigu. Son ancêtre est le fifre des bergers, qu’on utilisait aussi dans les bataillons militaires. Comme pour la flûte traversière, le son résulte de la mise en vibration du tuyau lorsqu’on souffle dans l’embouchure. Mais celle-ci est beaucoup plus petite sur le piccolo. La position des lèvres quand on souffle est donc aussi plus exigeante. Pour produire les sons les plus aigus, il faut aussi une grande quantité d’air plus rapidement. Cela nécessite une technique au niveau du ventre qui n’est généralement pas à la portée des débutants. Voilà pourquoi on commence par apprendre la flûte avant le piccolo.

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Bach, Mozart, Poulenc, Debussy : ils ont tous écrit pour la flûte

Les compositeurs ont beaucoup utilisé la flûte, qu’ils apprécient pour sa sonorité douce et chaleureuse. Aux XVIIème et XVIIIème siècles, ils lui confient un rôle de soliste dans les concertos (« Tempesta di mare » de Vivaldi), la font converser avec les cordes et/ou le clavecin dans la musique de chambre (sonates de Bach et de son fils Carl Philipp Emanuel) et l’emploient dans les symphonies. Au XIXème, son timbre est surtout utilisé dans l’orchestre, même si certains lui dédient encore des œuvres solistes comme Gounod et Cécile Chaminade. En Europe, on n’utilise alors pratiquement plus que la flûte traversière, dont les facteurs (les constructeurs d’instruments à vent) optimisent les possibilités techniques. Pour étendre son registre dans le grave, ils créent la flûte en sol. Le potentiel de la flûte hors orchestre sera à nouveau exploré au XXème siècle, notamment par Poulenc et Jolivet.

1er mouvement de la Sonate pour flûte et piano de Poulenc (James Galway)

 

L’une des œuvres emblématiques de l’instrument reste sans doute le Concerto pour flûte et harpe de Mozart. Avec Debussy, la flûte nous fascine. Elle émerge du silence, seule, au début du Prélude à l’Après-midi d’un Faune. Seule encore, elle nous transporte avec Syrinx dans une mythologie onirique. Ce n’est pas pour rien que la flûte, dans les contes pour enfant, est l’instrument du charmeur de serpent !

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Traverso et flûte à bec : vous avez dit baroque ?

La flûte à bec est déjà présente au Moyen-Âge, comme en témoigne les illustrations des manuscrits. Elle connaît ensuite son âge d’or à l’époque baroque, surtout en Italie où Vivaldi lui écrit des concertos d’une grande virtuosité, rivalisant avec le violon. Bach dans ses cantates, et Haendel dans ses opéras lui ménagent également de beaux passages. Les flûtes à bec sont une famille nombreuse, avec des tailles variées et les tessiture qui vont avec. Plus l’instrument est petit, plus il est aigu; au contraire, plus il est long, plus il est grave. Il y aurait ainsi 10 membres dans cette famille, de la sopraninino, à la sous-soucontrebasse !

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La flûte traversière n’a certes pas attendu Mozart pour faire son entrée au répertoire. Contrairement à la clarinette, elle est déjà bien présente au début du XVIIIème siècle, surtout en France. Alors fabriquée en bois, avec un simple trou au niveau de l’embouchure, on l’appelle le traverso. Certains compositeurs mêlent parfois les deux types de flûte dans leurs œuvres, comme Charpentier dans sa Descente d’Orphée aux Enfers. Mais ils sont rares. En général c’est l’une ou l’autre, selon le pays. Progressivement, le bois du traverso sera remplacé par le métal, pour donner la flûte traversière moderne que nous connaissons aujourd’hui.

 

Étui : la flûte est l’instrument de musique le plus facile à transporter

La flûte se démonte, en 2 parties pour la flûte à bec et le piccolo, en 3 parties pour la flûte traversière. Elle se range dans un étui spécial, avec des cavités aménagées en fonction de la taille de chaque partie. Refermée, cette petite boîte rectangulaire peut presque passer pour un gros sac à main. Idéal pour voyager discrètement dans les transports ! Petit et léger, voilà deux avantages que les cornistes ou les violoncellistes envient aux flûtistes !

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Les 3 parties de la flûte traversière se nomment le corps et la patte, où sont situées les clés sur lesquelles les doigts appuient pour produire les différentes notes (celles de la patte permettant de jouer les notes graves), et l’embouchure où on souffle. A l’époque baroque, il n’y avait pas de clés, seulement des trous. C’est au XIXème siècle que le flûtiste Theobald Boehm a inventé ce système de clés, basé sur des anneaux mobiles, et qui porte encore son nom aujourd’hui. 

 

La colonne d’air : l’un des principaux défis pour un flûtiste

Voilà un terme qui revient souvent dans le vocabulaire des flûtistes. La colonne d’air est en fait un volume (d’air), emmagasiné dans les poumons lors de l’inspiration et poussé vers l’instrument lors de l’expiration. C’est cette deuxième phase qui est cruciale pour le flûtiste. Lorsqu’il souffle, il met en pression ce volume d’air grâce aux muscles du ventre, gère son entrée dans la flûte par les lèvres et la langue, et contrôle son débit et sa vitesse grâce à la sangle abdominale. La beauté du son, la justesse de la note, mais aussi les nuances et le phrasé, dépendent de la qualité de cette « soufflerie », puisque c’est elle qui met en vibration le tuyau de la flûte. C’est dire l’importance de cette fameuse colonne d’air ! Le musicien doit donc apprendre à maîtriser les muscles qui interviennent dans la respiration abdominale, comme le diaphragme. Trouver son axe vertical, basé sur le centre de gravité, aussi bien assis que debout, va l’y aider. La posture de l’instrumentiste joue donc aussi un rôle. La gestion de la colonne d’air n’est du reste pas propre aux flûtistes. Elle est essentielle pour tous les instruments à vent, et pour les chanteurs.

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Flatterzung… et autres effets possibles quand on joue de la flûte

Si on trouve maintenant sur internet des sourdines pour la flûte, afin de ne pas déranger les voisins, cet accessoire n’est en revanche pas (encore) utilisé dans le répertoire. Les variations de timbre qu’offrent les sourdines de la trompette ou des instruments à cordes, n’ont pas leur équivalent à la flûte. Celle-ci n’est pas pour autant privée d’effets sonores. Le flatterzung, obtenu grâce à la langue, produit une sorte de roulement qui s’apparente au trémolo. Il est très utilisé dans la musique contemporaine, où il arrive également que les flûtistes chantent ou parlent dans leur instrument en même temps qu’ils jouent. Effet garanti !

 

Sixtine de Gournay

 

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