C’est une des surprises de l’année 2022 sur le front de l’économie : le bio a connu pour la première fois un véritable coup d’arrêt. Il y a plusieurs explications à cela.
Entre 2016 et 2019, le bio était un marché en croissance de plus de 20% par an
Le bio, c’était la poule aux œufs d’or pour l’agriculture française, la promesse d’une industrie agroalimentaire à la fois meilleure pour les sols, pour l’environnement, pour la planète et pour le consommateur. Moins de pesticides et une nourriture plus saine, c’était la promesse. Il est vrai que pendant des années, ça a marché. Entre 2016 et 2019, c’était même un marché en croissance de plus de 20% par an. Le bio, c’était la nouvelle frontière qui devait permettre à l’agriculture tricolore de monter en gamme et d’enrichir tous les paysans. Mais cette année, mauvaise surprise, le marché s’est brutalement retourné. C’est dû à un mélange de problèmes conjoncturels et structurels.
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Le problème conjoncturel est qu’on est dans une période d’inflation. Quand les prix de l’alimentation augmentent, il est normal que les ventes des articles bio, qui sont déjà souvent 50% plus cher, souffrent en premier. Le consommateur arbitre, et il a aussi découvert des produits qui ne sont pas bio mais sans nitrite, sans OGM, ou des produits en circuit plus court. Le souci structurel c’est aussi – et c’est plus inquiétant pour la filière – que voyant que les ventes de bio se tassaient ou reculaient, les distributeurs ont réduit l’offre. Et sur l’alimentation, c’est bien sûr la demande qui tire le marché mais si il y a moins d’offres, moins de mètres de linéaires poussant le bio, cela va aussi avoir un impact durable sur la consommation bio.
En France, 10% des terres cultivées sont dédiées à l’agriculture biologique
La chute des ventes a commencé doucement. -1% en 2021. Mais en 2022, la chute s’est très nettement accélérée. On finira l’année quelque part entre – 5 et -10% selon les segments et les canaux de distribution. C’est violent, car cela met la pression sur les producteurs au moment où ils auraient besoin d’augmenter leurs prix pour faire face à la hausse de leurs coûts. Mais s’ils augmentent trop les prix, ils vont accélérer la chute. Comme le bio coûte plus cher à produire pour des rendements plus faibles, si la demande ne suit plus, les agriculteurs vont forcément moins produire. Cela va peser sur l’offre de demain et on pourrait passer d’un plateau à une forme de cercle vicieux, une spirale de décroissance. La France est déjà la première surface bio d’Europe, 10% des terres cultivées sont dédiées à l’agriculture biologique. Mais si la crise se poursuit, on risque un véritable coup d’arrêt.
David Barroux