MEYERBEER Giacomo

(1791-1864) Epoque romantique

Meyerbeer, le maître du grand opéra à la française était allemand ! Il a fait les grandes heures et aussi la fortune de l’opéra de Paris avec Robert le Diable et Les Huguenots. Il a régné sur le monde musical du milieu du XIXe siècle, avant de sombrer dans un oubli, dont il n’est partiellement sorti que ces dernières années.

Giacomo Meyerbeer en 10 dates :

  • 1791 : Naissance à Berlin de Jakob Liebmann Meyer Beer.
  • 1801 : Premier concert public à Berlin.
  • 1803 : Première œuvre composée  (une sonate pour piano).
  • 1810 : Départ pour Darmstadt où il va parfaire son apprentissage auprès de l’abbé Vogler.
  • 1816 : Départ pour l’Italie pour se former à l’art lyrique.
  • 1831 : Triomphe à l’Opéra de Paris, avec Robert le Diable.
  • 1842 : Création des Huguenots, nouveau triomphe.
  • 1849 : Création du Prophète.
  • 1864 : Décès à Paris, puis inhumation avec faste à Berlin.
  • 1864 : Création posthume à Paris de L’Africaine, son dernier grand opéra.

 

L’opéra se révèle très tôt une passion pour ce compositeur qui changera son nom de famille

Le 5 septembre 1791 à Berlin, trois mois jours pour jour avant la disparition de Mozart, Amalia Beer met au monde son premier enfant. C’est un garçon, il sera prénommé Jakob Liebmann Meyer. Sa famille, installée depuis plus d’un siècle dans la capitale de la Prusse, est l’une des plus riches de la ville. Dans leur villa les Beer réunissent le Berlin mondain et intellectuel. Tout naturellement il reçoit ses premiers cours de piano, et rapidement le jeune Jakob se révèle être un éléve doué. A dix ans il donne son premier concert public. Mais Jakob Beer n’est pas qu’un pianiste virtuose prometteur, et déjà se profile, au delà de l’interprète, le compositeur. En 1803, à seulement 12 ans, il écrit sa première œuvre: une sonate pour piano. Le soir Jakob va à l’opéra, qui devient une passion, et très vite il se fixe comme objectif d’écrire lui même son propre ouvrage lyrique.

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Meyerbeer quitte Berlin pour Darmstadt pour parfaire son éducation musicale

En attendant, Berlin devient vite un cadre trop étroit pour les dons du jeune homme. Son professeur, Carl Friedrich Zelter, qui aura aussi pour élève Félix Mendelssohn, l’envoie à Darmstadt, étudier auprès de l’abbé Georg Joseph Vogler qui a fondé une école réputée. L’abbé Vogler le fait travailler assidument sur les œuvres de Mozart et de Haydn. C’est de cette période que datent ses premières œuvres, comme Got und die Natur, rhapsodie lyrique créé à Berlin en mai 1810. Deux ans plus tard c’est son premier opéra Jephtas Gelübde qui est joué à Munich, mais sans grand succès. Puis viendra Wirt und Glass, et aussi un titre officiel, car Meyerbeer ne déteste pas les honneurs. Il est nommé compositeur de cour auprès du grand-duc de Hesse-Darmstadt.

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Meyerbeer se fixe comme objectif l’Italie, qu’il voit comme un marchepied vers la gloire

Toutefois sa carrière ne prend pas l’ampleur qu’il aurait souhaité, et très vite il est convaincu que l’Italie sera une étape décisive. Entretemps Jakok a réuni son troisième prénom, Meyer, à son patronyme, et s’appelle désormais Meyerbeer. C’est donc Jakok Meyerbeer qui, en mars 1816 quitte l’Allemagne et débarque à Vérone. Très vite il est conquis par l’Italie et sa vie lyrique dominée par Rossini, dont Le Barbier de Séville vient d’être créé à Rome, quelques mois avant le succès napolitain d’Otello. Meyerbeer, qui décide cette fois de changer son prénom pour devenir Giacomo, sait ce qu’il vient chercher. «Tout compositeur lyrique doit aller en Italie, pas à cause des compositions, mais à cause des chanteurs» écrira-t-il dans son journal quelques années plus tard.

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En quelques mois Meyerbeer va visiter Rome, Naples, Venise et la Sicile. L’année suivante il s’installe à Padoue, où il compose le premier opéra de sa période italienne, Romilda et Constanza, créé le 19 juillet. C’est un succès, l’essai est réussi. Dès lors Meyerbeer va enchaîner les triomphes. Le public italien l’acclame. Le 14 novembre 1820 il fait ses débuts à la Scala de Milan avec Margherita d’Anjou. Au total Meyerbeer composera 7 opéras durant ses années italiennes. C’est relativement peu, surtout si l’on compare au rythme de composition de celui qu’il admire : Rossini. D’ailleurs les deux hommes finiront par se rencontrer à Venise en 1819 , et ils noueront des relations amicales, qui se prolongeront lorsqu’ils régneront tous deux sur Paris. Car Meyerbeer pense déjà à l’étape suivante, et s’apprête à quitter l’Italie. Son séjour se terminera par un nouveau succès, le 7 mars 1824 à la Fenice de Venise avec la création d’Il Crociato in Egitto.

 

Meyerbeer part à la conquête de Paris et du grand opéra à la française.

Paris est une capitale culturelle importante quand Meyerbeer s’y installe en février 1825. Elle est surtout le centre de la vie lyrique. Lorsqu’il arrive à Paris, Meyerbeer précède de quelques mois Rossini, mais les deux hommes, nés à trois mois d’écart, n’ont pas le même statut. Rossini est au zénith de sa gloire. Partout où il se trouve il est adulé, alors que Meyerbeer, même s’il est un compositeur qui compte, n’a pas atteint ce degré de popularité et de reconnaissance. Son heure va pourtant bientôt venir, ainsi dès le mois de septembre de cette même année 1825, il remporte son premier succès parisien avec Ia création française d’Il Crociato in Egitto. La question se pose alors de savoir s’il va continuer à adapter pour le public parisien ses œuvres italiennes. Sa rencontre avec le célèbre auteur dramatique Eugène Scribe lui apportera la réponse. Le 21 novembre 1831 il crée Robert le Diable à l’opéra de Paris, sur un livret de Scribe. Le triomphe est immédiat, et à 40 ans Meyerbeer devient la coqueluche, l’idole des parisiens. Robert le Diable est l’un des plus grands succès de tous les temps. Le directeur de l’Opéra de Paris se frotte les mains, les représentations se succèdent. Le succès est international, l’œuvre est jouée dans une dizaine de pays. Pourtant la genèse a été difficile. Robert le Diable était conçu à l’origine pour être un opéra-comique. Meyerbeer commence à y travailler en 1827. Finalement ce sera, après 4 années de travail un grand opéra en cinq actes, qui se caractérise par une œuvre à grand spectacle, le prototype du grand opéra à la française et dont Les Huguenots et Le Prophète, créés eux aussi à l’Opéra de Paris, respectivement en 1836 et en 1849, seront les autres grands succès. Le grand opéra allie du suspens et de l’action, des scènes dramatiques et grandioses, des airs, des duos et des ensembles à l’écriture vocale particulièrement exigeante, ainsi que des ballets, le tout servi par une orchestration somptueuse.

Karine Desshayes dans l’air d’Urbain des Huguenots (Opéra de Paris, 2018)

 

Le succès et la popularité de Meyerbeer dureront jusqu’à la fin de sa vie

Même s’il vit à Paris, Meyerbeer voyage beaucoup en Europe, et prend le temps de créer à l’étranger plusieurs œuvres. Il accepte des postes officiels, comme celui, en juin 1842, de directeur général de la musique de Prusse. En 1854 il crée à Paris L’Etoile du Nord, un opéra-comique, suivi en 1859 du Pardon de Ploërmel. Parallèlement il poursuit l’écriture de L’Africaine, dont le projet était né après le succès des Huguenots, un demi-siècle plus tôt. Les répétitions commencent en avril 1864, mais Meyerbeer est malade, et sa santé se détériore rapidement. Il meurt le 2 mai, il est inhumé avec faste à Berlin le 9 mai. L’Africaine, qui sera son dernier grand opéra, ne sera donné que l’année suivante, avec le succès escompté, en présence de Napoléon III. À la fin de la représentation le buste de Meyerbeer est apporté sur la scène. Le grand opéra à la française survivra encore quelques années, sous l’influence posthume de Meyerbeer. Ainsi, au moment du triomphe de L’Africaine, l’opéra de Paris commande à Verdi, un grand opéra, Don Carlos qui sera créé en 1867. Verdi lui devra beaucoup, tout comme Wagner, mais aussi Gounod et Saint-Saëns, pour ne citer qu’eux. Les ouvrages de Meyerbeer quitteront toutefois l’affiche des maisons d’opéra peu après sa mort. Il faudra attendre la fin des années 70 pour que le public puisse redécouvrir Meyerbeer, maintenant joué plus régulièrement.

 

Jean-Michel Dhuez

 

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