Nemanja Radulovic revisite Les Quatre saisons de Vivaldi pour illustrer le dérèglement climatique

©Lukas Rotter - DG

C’est un tube de la musique classique, réinterprété déjà plus de 1000 fois. Le violoniste virtuose Nemanja Radulovic revisite Les Quatre saisons d’Antonio Vivaldi avec des variations de tempo « extrêmes » qui reflètent selon lui les dérèglements climatiques.

Nemanja Radulovic a ajouté une cinquième saison à l’œuvre de Vivaldi

Nemanja Radulovic, souvent qualifié de rock star du violon en raison de son look décontracté, ses cheveux longs et la flamboyance de son style, se produit en ouverture des Chorégies d’Orange ce vendredi pour un concert unique dans lequel il interprètera, aux côtés de l’ensemble Double Sens qu’il a créé en 2008, de grands concertos pour violon dont le chef-d’œuvre d’Antonio Vivaldi. Le violoniste franco-serbe de 35 ans, avait déjà enregistré il y a dix ans une version du concerto du maître vénitien en y ajoutant une cinquième saison, composée par son compatriote serbe Aleksandar Sedlar, en hommage aux victimes du tsunami de mars 2011 et qui sera également jouée aux Chorégies.

A lire aussi

 

« Déjà à l’époque, j’étais vraiment inquiet du changement climatique. Et cette musique tellement connue, la nature et le climat en sont la plus grande inspiration », déclare Nemanja Radulovic. Il confie que « les différences peuvent être dans les tempi, plus rapides ou plus lents, selon la saison ». « Ce sont des nuances extrêmes; on se rend compte que l’hiver est beaucoup plus froid, l’été plus chaud avec des canicules qui ne s’arrêtent pas et on essaie de traduire ça à travers la musique », poursuit le violoniste qui a grandi à Belgrade et s’est installé à 14 ans en France où il se perfectionne au Conservatoire à Paris.

Nemanja Radulovic : « Le public reconnaît ce qui est vrai »

Par sa virtuosité et son côté accessible, Nemanja Radulovic du violon séduit depuis le début des années 2000, notamment un public plus jeune et plus populaire, mais il ne se sent pas investi d’une mission pour sauver son art. « Je ne pense pas qu’il faut sauver la musique classique, elle est bien vivante », sourit-il. « Pour chaque style de musique, il faut la vérité qui vient des artistes. Que vous jouiez du classique, du folk ou de la pop, le public reconnaît ce qui est vrai ».

A lire aussi

 

« Il ne faut pas chercher à tout prix d’attirer les jeunes; les adolescents, on leur propose mais c’est à eux de décider…Il faut juste qu’il n’y ait pas de distance entre eux et les artistes », renchérit-il. Il a en commun avec Khatia Buniatishvili, la pianiste franco-géorgienne, la virtuosité, une liberté d’interprétation des classiques qui fait grincer les dents des puristes et un look très peu « classique ». « Khatia est très sérieuse dans son travail mais ne se prend pas trop au sérieux; elle vit dans son époque et moi je vis dans mon époque », avance le musicien qui a fondé un autre ensemble, Les Trilles du Diable.

Nemanja Radulovic aime l’énergie et les mélodies du groupe Muse

Le musicien ose faire des arrangements sur de célèbres morceaux de Bach, revisite Paganini ou Tchaïkovski et fait aussi la part belle aux musiques folkloriques des Balkans et de son pays natal, où il a appris le violon à l’âge de 7 ans. De son enfance marquée par la guerre en Yougoslavie, il reste imprégné de ce mélange de « joie, tristesse, horreur » qui « nourrit l’âme ». Il écoute de tout, de la musique du monde et du rock, avec une préférence pour Muse, le groupe du rock britannique en raison de « leur énergie, leur mélodie qui (lui) parlent beaucoup ».

A lire aussi

 

Très actif comme les réseaux sociaux, Nemanja Radulovic partage des vidéos humoristiques comme lorsque, testé positif au Covid-19 en septembre 2020, il s’était en scène dans une vidéo aux images accélérées où on le voit ranger sa chambre d’hôtel, prendre son bain ou dormir, sur un arrangement ébouriffant du Caprice no. 24 de Niccolo Paganini. Le violoniste partage volontiers son engouement pour son compatriote tennisman Novak Djokovic, qui l’admire tout autant. Mais le violoniste se soucie peu d’avoir une étiquette cool. « Si on a envie de dire que je suis une rock star, un violoniste classique, que je suis Français, Serbe, avec des cheveux longs ou des baskets, ça ne me gêne pas. L’essence, c’est la musique ».

Philippe Gault (avec AFP)

Retrouvez l’actualité du Classique