Maltraitances dans les crèches : « La direction commande 8 repas pour 10 enfants »

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C’est un rapport de l’Igas qui met en lumière la disparité de la qualité d’accueil dans les crèches. L’Inspection Générale des Affaires Sociales pointe des cas d’enfants oubliés sur les toilettes ou des couches souillées depuis des heures. L’organisme appelle à de profondes réformes pour mieux prévenir les maltraitances aux enfants.

Pour cette enquête, l’Igas a passé au crible 36 établissements publics et privés, questionné plus de 17.000 membres du personnel ainsi que près de 30.000 parents. D’année en année, la réglementation s’assouplit pour permettre aux structures de toujours accueillir plus de nourrissons. Pourtant à l’image des Ehpad ou des hôpitaux, le secteur est confronté depuis une vingtaine d’années à une forte logique de rentabilité mais aussi à une pénurie de personnel.

Véronique est auxiliaire de puériculture dans une crèche des Yvelines, en banlieue parisienne, et s’occupe seule de 10 nourrissons. Or le taux d’encadrement légal est d’un adulte pour 6 bébés. Mais faute de personnel en nombre suffisant, il s’agit de s’adapter : « les temps de repas sont réduits. Si l’enfant pose des problèmes pour manger, on se dit que c’est tant pis car on n’a pas le temps ».

Des siestes raccourcies pour les enfants faute de lits en nombre suffisant

Elle pointe aussi la sécurité des enfants qui peut être problématique : « on n’est pas en capacité de surveiller 10 enfants si on est seul. Le fait d’être en sous-effectif permanent fait qu’il y a réellement de la maltraitance ! Ce n’est pas une [bonne] qualité d’accueil, et ce n’est pas pour ça que l’on a choisi ces métiers ».

Certains jours, la crèche pratique le surnombre pour atteindre 115% de sa capacité d’accueil comme la loi l’autorise, mais l’autre problème, ce sont les lits qui manquent. Dans ces cas, explique Véronique, « certains enfants doivent dormir dans la pièce de vie. Il y a du bruit, et des siestes vont être raccourcies pour [que les enfants dorment] à tour de rôle ». Parallèlement, les consignes de la direction sont claires : faire des économies, notamment sur les couches qui représentent 4.000 euros par an. « On peut laisser un enfant avec sa couche pleine plus longtemps qu’il ne le faudrait. On va donner très peu d’eau aux enfants », détaille l’auxiliaire de puériculture.

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Véronique assure même que la direction va jusqu’à commander « 8 repas pour 10 enfants », arguant qu’« il y en a toujours un peu trop ». « Mais certains jours, ils sont tous là, donc il n’y aura pas assez à manger pour tout le monde », affirme-t-elle. Face à ses pratiques, l’Inspection Générale des Affaires Sociales demande aux départements d’augmenter les contrôles inopinés avec un objectif : qu’en deux ans, toutes les crèches de France soient inspectées.

Rémi Pfister

 

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