Réforme des retraites : Plus d’1 million de personnes dans les rues, Emmanuel Macron a-t-il perdu la première manche ?

Twitter @EmmanuelMacron

On ne peut pas contester que les syndicats aient remporté la première manche, en ayant rassemblé plus d’un million de manifestants. Pour autant, il est faux de dire qu’Emmanuel Macron l’a perdue.

 

En 2003 et 2010, malgré la mobilisation très forte, les réformes des retraites étaient passées

Il y a eu beaucoup de monde dans les rues, plus que ce que les syndicats espéraient eux-mêmes. Donc, à l’évidence, c’est un succès pour eux. Et ça va les motiver pour organiser les journées suivantes. Mais on ne pourrait dire symétriquement que le président a perdu cette manche, que si les cortèges d’hier l’avaient déstabilisé et le contraignaient à reculer. Or, ce monde, il s’y attendait, il s’y préparait et surtout, il a rappelé de manière très nette sa détermination. C’est le sens de sa déclaration depuis l’Espagne, affirmant que « la réforme se fera dans un esprit de dialogue et de responsabilité » . Dans un conflit dur – et celui-ci le sera -, ce qui compte ce n’est pas la détermination du premier jour, c’est la détermination du dernier jour, celle qui permet de ne pas céder à la fin. Quand on écoute Emmanuel Macron, en public ou en privé, on n’en doute pas aujourd’hui. Mais c’est vrai qu’il faudra voir sur la durée.

 

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Mais regardons un peu le passé. C’est vrai qu’en 1995, Jacques Chirac a reculé sur les régimes spéciaux. Ce mouvement social et ce recul ont marqué les esprits. Mais après, il y a eu deux grosses réformes des retraites. En 2003 pour aligner la durée de cotisation des fonctionnaires sur celle du privé. Et en 2010, pour reporter l’âge légal de départ de 60 à 62 ans. Dans ces deux cas, le mouvement avait été long ; plusieurs semaines. Il avait été très suivi. Le million dans les rues avait été dépassé à plusieurs reprises. En 2010, les syndicats avaient même annoncé une fois 3 millions ! Eh bien dans les deux cas, la réforme avait été jusqu’au bout. Elle avait été votée et mise en œuvre sans être rognée. Les images d’hier étaient donc spectaculaires, mais finalement pas plus qu’en 2003 et 2010. Donc même si la bataille ne fait que commencer, il est possible, il est probable que le gouvernement tienne jusqu’au bout.

 

Emmanuel Macron a fait le choix de maintenir son déplacement en Espagne

Le chef de l’Etat a maintenu son déplacement en Espagne, et je ne crois pas que ce soit une erreur. Le voyage en Espagne, ce n’est pas la fuite à Varenne, ni même à Baden Baden. C’est le respect d’un engagement important, fixé depuis longtemps. La réforme des retraites est un moment décisif, mais ce n’est pas la totalité de la vie du pays et le chef de l’Etat a voulu montrer qu’il assumait la totalité de ses prérogatives et de ses missions. Alors bien sûr, cette absence lui est reprochée par ses opposants. Mais je crois qu’Emmanuel Macron n’a pas voulu afficher son indifférence par rapport à ce qui se passait à Paris, mais son absence de fébrilité.

Guillaume Tabard

 

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