La grève contre la réforme des retraites, un premier aperçu de la mobilisation réelle en France

Paule Bodilis / Wikimedia commons

En cette première journée de mobilisation contre la réforme des retraites, essayons d’en comprendre l’enjeu symbolique et politique. Les organisateurs s’attendent à 1 million de manifestants. Le sort de la réforme se joue-t-il aujourd’hui ?

 

La gauche aimerait faire de ce mouvement du 19 janvier une journée politique

Cette grève du 19 janvier est un lever de rideau. C’est une journée isolée : les préavis de grève ne valent pas pour d’autres jours. Tout le monde va prendre la température. Personne, ni les syndicats, ni le gouvernement, ni les partis politiques ne savent vraiment à quoi il faut s’attendre. Les organisateurs ont fixé la jauge à un million de personnes dans les rues, partout en France. Si c’est le cas, ce sera important, mais pas inédit. Cela s’est présenté avec d’autres réformes des retraites qui ont abouti ; en 2003 ou en 2010. C’est un point important à rappeler car il ne faut pas croire que la rue fasse toujours reculer un gouvernement. D’autant qu’il n’est pas sûr que le million soit atteint, ce serait aussi une indication. Mais le plus important, ce sera la suite. C’est là qu’on va voir d’un côté qui est prêt à entrer dans un mouvement long et dur ; qui est prêt à renoncer à du salaire pour faire grève. Et c’est là qu’on va voir de l’autre côté si les Français déjà échaudés par les pénuries d’essence à cause du blocage des raffineries puis par la pagaille dans les transports vont supporter longtemps d’être les otages d’un mouvement social radical.

 

A lire aussi

 

 

Ce jeudi est une journée sociale que la gauche aimerait transformer en journée politique. Ne serait-ce que parce que la gauche traverse une grave crise de militantisme et qui, depuis des mois, est empêtrée dans ses divisions aimerait pouvoir dire : cette mobilisation c’est nous. Elle oublie d’ailleurs au passage que parmi les personnes qui défileront aujourd’hui en France, certains votent pour le Rassemblement National. En tous cas, admirez cette course à la radicalité et à la démagogie dans les meetings unitaires de ces derniers jours. Avec Marine Tondellier la nouvelle patronne des Verts qui rêve d’une France sans milliardaires. C’est évidemment plus facile de tenir ces envolées d’estrade plutôt que de se battre concrètement pour une France sans pauvres. Dans l’espoir d’une radicalisation du mouvement, la gauche est dans une logique d’hystérisation du débat.

 

Emmanuel Macron appelle les membres de la majorité à faire de la pédagogie sur les retraites

Face à cela, la majorité doit aussi entrer en campagne. Et c’est Emmanuel Macron lui-même qui a donné le coup d’envoi, hier matin en conseil des ministres. Il a exhorté ses ministres – et ça valait aussi pour les parlementaires – à se déployer pour « expliquer, expliquer et encore expliquer les enjeux de la réforme ». Et il les a priés d’entrer sans retenue dans la mêlée politique pour dénoncer les « mensonges proférés par la gauche » ; une gauche qui veut le retour à 60 ans, mais qui avait voté elle-même le fameux dispositif Touraine prévoyant la montée aux 43 ans de cotisation. La consigne présidentielle est simple : ne pas être sur la défensive, mais être à l’offensive pour remporter une bataille de l’opinion qui est peut-être moins jouée d’avance qu’on le dit.

Guillaume Tabard

 

 

 

Retrouvez tous les articles liés à la politique