« Nous ne voulons pas d’un 49.3 », a dit Olivier Véran après une réunion surprise des ministres, hier, autour d’Elisabeth Borne. Est-ce une annonce ou plutôt la méthode Coué ?
La gauche, le RN et une majorité du groupe LIOT vont voter contre la réforme des retraites
Le 49.3 est possible pour le gouvernement, mais il n’est pas souhaitable. Il est possible parce que la majorité n’est toujours pas assurée à l’Assemblée nationale. Cela va vraiment se jouer à une pincée de voix près. Si le non l’emporte, même d’une voix, ce serait la mort de la réforme et sans doute celle du gouvernement d’Elisabeth Borne. Emmanuel Macron ne peut pas se permettre un échec et si jeudi matin le risque d’une défaite est trop fort, il y aura le 49.3. Celui-ci n’est pas souhaitable, car s’il faut en passer par là, cela voudra dire que la réforme des retraites, contestée dans la rue – même si la mobilisation est en baisse – et rejetée majoritairement dans l’opinion, n’aura pas été validée par un vote de l’Assemblée. Ce serait moins grave qu’un rejet, mais ce serait terrible aussi. C’est pour cela que le porte-parole du gouvernement dit : « Nous ne voulons pas d’un 49.3 ». C’est aussi un message de volontarisme. Il ne faut pas partir résigné d’avance et se dire : cette majorité, on va aller la chercher. Mais comment savoir si cela vaut le coup ou s’il est trop risqué d’aller au vote ? Chacun fait ses comptes. C’est simple, tous les groupes de gauche, tout le RN et une majorité du groupe LIOT vont voter contre. Cela fait par conséquent, 250 voix contre. Avec les trois groupes de la majorité : Renaissance, Horizons et le Modem, on compte 250 voix également.
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Barbara Pompili ne votera pas pour le texte
Mais vont-ils tous voter comme un seul homme ? Elisabeth Borne s’en dit convaincue. Il n’y aura pas de défection, dit-elle. Très bien, mais certaines individualités – comme l’ancienne ministre de l’Ecologie Barbara Pompili – ont dit qu’elles ne voteraient pas. Ne pas voter signifie peut-être juste s’abstenir – ce qui n’est pas pareil que voter contre – mais cela ferait des voix en moins. Et certains pointages évoquent un manque à gagner de 6 à 8 voix, ce n’est pas rien. Bien sûr, c’est à LR que tout se joue. Là encore, la Première ministre se dit confiante. Elle s’appuie sur les estimations d’Éric Ciotti qui évoque 30 à 35 voix pour, 10 à 15 contre et une quinzaine d’hésitants. Si cela se révèle juste, c’est ric-rac, mais ça passe. Mais quand on en interroge d’autres à droite, ils ne voient qu’entre 15 à 20 votes pour assurés, et de 20 à 25 votes contre possibles. Et si c’est ça, et bien ça casse. Alors, en cas de 49.3 le gouvernement peut-il être renversé ? Ce qui est sûr, c’est que le recours au 49.3 provoquerait le dépôt de motions de censure. Le patron du RN a évoqué hier des « discussions » sur une motion commune à toutes les oppositions. Mais franchement, il y a des élus de gauche qui ne veulent pas mêler leurs voix à celle du RN. Et à LR, même ceux qui sont contre la réforme des retraites ne veulent pas renverser le gouvernement en s’alliant aux mélenchonistes et aux lepénistes. Donc en termes d’image, un 49.3 ne serait pas bon pour le gouvernement, mais dans l’hémicycle, je ne crois pas qu’il puisse être renversé.
Guillaume Tabard