La dissolution se prépare, assurait dimanche le JDD. Elle n’est pas à l’ordre du jour, a répondu le porte-parole du gouvernement Olivier Véran. Malgré la tentation d’un coup de force pour calmer les oppositions, cette initiative hasardeuse pourrait facilement se retourner contre l’exécutif.
Emmanuel Macron avait déjà agité deux fois la menace d’une dissolution
Rappeler la possibilité d’une dissolution est une évidence. Mais évoquer une dissolution imminente, c’est de l’imprudence. Ce n’est pas l’article du JDD qui fait état de cette hypothèse pour la première fois, mais Emmanuel Macron lui-même, à deux reprises : lors d’un dîner de la majorité, consacré à la méthode parlementaire pour la réforme des retraites et lors d’une rencontre avec la presse présidentielle. L’idée était de menacer d’une dissolution si une motion de censure était votée. Une telle décision, dans un tel contexte serait logique. Mais nous ne sommes pas du tout dans ce cas, au contraire. On a une série de motions de censure qui ont toutes été rejetées et qui, de surcroît, recueillent de moins en moins de voix à chaque fois. Si c’est un ballon d’essai, on a donc du mal à en comprendre la logique. A moins que ce soient les dirigeants de Renaissance, le parti macroniste rebaptisé, qui voulaient faire savoir qu’ils ne restaient pas les bras croisés.
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Hors blocage patent à l’Assemblée, la dissolution pourrait donner une chance au gouvernement d’obtenir la majorité absolue. Mais avouez que ce serait une initiative hasardeuse, pour ne pas dire dangereuse. Retourner maintenant aux urnes, ça reviendrait à dire aux électeurs : « Votre choix ne nous plaît pas, refaites en un autre ». Et si après de nouvelles législatives, il n’y a toujours pas de majorité absolue, que fera le président ? Pire encore, si les oppositions, et singulièrement le Rassemblement national, reviennent plus nombreux…
L’hypothèse de la dissolution pourrait pousser la droite à s’allier avec la majorité
Les Français ne sont sans doute pas ravis du spectacle d’un Parlement où l’on parle plus de procédure que des sujets, où le ping-pong 49-3 contre motion de censure se poursuit et où l’on se complaît dans les polémiques et les invectives. Mais donner une majorité claire à Macron peut ramener plus de clarté… tout comme le ferait une majorité claire contre Macron. On se souvient de 1997 [et de la dissolution infructueuse de Jacques Chirac] : une dissolution peut rapidement se retourner contre celui qui la décrète. Une telle hypothèse semble finalement être un moyen de faire pression sur la droite. Elle est paradoxale, car depuis des semaines, Emmanuel Macron, Elisabeth Borne, Bruno Le Maire, Gérald Darmanin clament qu’ils souhaitent des accords, voire des « alliances » avec la droite. Or, agiter l’idée d’une dissolution, c’est menacer les députés de LR de quitter l’hémicycle. Séduction massive ou destruction massive, il faut choisir. Prévoir dès maintenant une dissolution, c’est avouer par avance l’incapacité à trouver ces accords. Ce ne serait pas très cohérent. C’est pour cela que, si c’était un ballon d’essai, l’exécutif a fait rapidement marche arrière.
Guillaume Tabard