PONS Lily

(1898 -1976) Soprano

Lily Pons, surnommée « la Diva de poche » car elle était très menue, a fait sa carrière aux Etats-Unis mais n’a jamais oublié son pays. Pendant la guerre, elle soutient la France libre et en devient le symbole pour les américains. Elle revient chanter à Paris dans Lucia di Lammermoor, son opéra fétiche. Sa voix de soprano colorature paraît encore aujourd’hui très moderne, très souple, facile dans les notes extrêmes. Une voix qu’elle a réussi à préserver longtemps, en évitant les rôles trop exigeants.

Lily Pons en 10 dates :

1898 : Naissance à Draguignan

1927 : Début à l’opéra de Mulhouse dans Lakmé

1931 : Première au Met de New York dans Lucia di Lammermoor

1935 : Triomphe à l’Opéra de Paris

1940 : Nationalité américaine

1945 : Chante à Paris pour l’anniversaire de la Libération

1958 : Dernière prestation au Met

1962 : Dernière scène à Fortworth dans Lucia

1972 : Dernier récital à New York

1976 : Mort à Dallas

 

Lily Pons obtient premier prix de piano au Conservatoire de Paris à quinze ans.

Fille d’un imprimeur et d’une couturière, Alice-Joséphine Pons est née à Draguignan. Sa famille s’installe à Cannes lorsqu’elle a six ans. Elle intègre très jeune le Conservatoire de Paris dont elle sort avec un premier prix de piano à quinze ans. Puis elle apprend le chant avec Alberto di Gorostiaga, joue dans des revues au Théâtre des Variétés, est remarquée par Reynaldo Hahn, et débute en novembre 1927 à Mulhouse dans Lakmé. Elle suit les cours de chant d’Alice Zeppilli, soprano française originaire de Menton, installée à New York, ce qui lui fait traverser l’Atlantique, parfois en compagnie de musiciens célèbres comme Maurice Ravel de retour de sa tournée américaine en avril 1928. Son premier disque produit par le label Odéon en 1929 regroupe des airs de Mozart, Verdi, Puccini, Delibes et Saint-Saëns (vocalise « Le rossignol et la rose »).

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Refusée à l’Opéra de Paris, elle part à New York qui l’engage immédiatement.

Après avoir été refusée par Jacques Rouché alors directeur de l’Opéra de Paris, elle tente sa chance au Met de New York. Elle est engagée sur le champ et débute en janvier 1931 dans Lucia di Lammermoor avec les grands chanteurs italiens Beniamino Gigli et Ezio Pinza. C’est un triomphe : du jour au lendemain elle devient une star. Quatre ans plus tard, l’Opéra de Paris reconnaît son talent et l’accueille enfin. Mais elle retourne aux Etats-Unis, tourne à Hollywood, fait la une des magazines et exploite commercialement son image auprès des américaines.

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Lily Pons soutient la France libre pendant la guerre et participe aux fêtes de la Libération.

Dès le début de la guerre, elle s’engage pour la France libre depuis les Etats-Unis. Elle part chanter en 1944 dans différents pays lointains pour les troupes alliées, accompagnée par son mari chef d’orchestre André Kostelanetz. Marraine de la 2ème DB du général Leclerc, elle est à Paris l’été 1945 et chante la Marseillaise depuis le balcon du Palais Garnier. Elle recevra les insignes de l’Ordre de La Croix de Lorraine.

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Son répertoire lyrique se limite à une dizaine de grands rôles de soprano virtuose.

Étoile du Met de New York, elle donne près de trois cents représentations toujours dans les mêmes œuvres de Donizetti (Lucia di Lammermoor, Linda di Chamounix, La Fille du régiment), Verdi (Rigoletto), Delibes (Lakmé) ou Offenbach (Les Contes d’Hoffmann). Elle peut atteindre des notes suraiguës, que l’on entend dans certains enregistrements publics, déchaînant les applaudissements. Les maisons de disque RCA Victor et Columbia ont permis de conserver les airs d’opéra qui ont fait sa réputation.

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Sa dernière scène d’opéra est pour Lucia di Lammermoor, avec le jeune Placido Domingo pour partenaire.

A soixante-quatre ans, elle chante encore le rôle difficile de Lucia qui sera son ultime prestation lyrique, avec le très jeune Placido Domingo, qui dira qu’il avait conscience de chanter avec « une légende vivante ». Comme Pierre Monteux et Robert Casadesus, elle a son étoile sur le Walk of Fame d’Hollywood.

l’air des clochettes de Lakmé de Delibes (1947)

 

Lily Pons donne encore quelques concerts à plus de soixante-dix ans, notamment à New York, au Lincoln Center où elle triomphe en 1972 : une vidéo permet de la voir chanter tout de blanc vêtue, devant l’orchestre symphonique, comme si le temps n’avait pas eu de prise. Elle décède à Dallas quatre ans plus tard et est enterrée à Cannes, la ville de sa jeunesse où elle revint souvent au temps de sa gloire, offrant des récitals pour des œuvres de bienfaisance.

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Dans ses Propos sur le chant publiés dans L’Oreille au guet (Gallimard, 1937), Reynaldo Hahn se souvient avoir dirigé Lily Pons au Casino de Cannes, et salue ses progrès dans la rondeur du son et dans le phrasé, mais lui reproche de ne pas chanter des rôles du répertoire français. Son interprétation de Lucia à l’Opéra de Paris a, dit-il, déclenché « une ovation avec cris et trépignements qui l’a, je l’espère, réconciliée avec ses compatriotes ». En 1946, devenu directeur de l’Opéra de Paris, il l’invite pour un récital au bénéfice de la 2ème DB. Lily Pons n’est pas la seule cantatrice célèbre à être revenue ainsi triompher dans cette maison qui l’avait rejetée, on pense bien sûr à Régine Crespin vingt ans plus tard, mais cette blessure originelle semble avoir été, pour ces artistes remarquables, un moteur plus qu’un frein pour développer leur carrière internationale.

 

Philippe Hussenot

 

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