Pesticides : 80% des échantillons prélevés sur les habitations proches des cultures sont contaminés

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Les riverains des zones agricoles sont-ils trop exposés aux pesticides ? Le débat est relancé après la publication hier d’une étude de l’ONG Générations Futures et de l’institut Yootest.

Une campagne de mesures de pesticides dans l’air a été organisée au domicile de 58 volontaires

Près de 60 riverains de cultures ont participé à une campagne participative. Dans 80% des échantillons prélevés sur les habitations, des traces de pesticides ont bien été retrouvées. Une campagne de mesures de pesticides dans l’air a été organisée au domicile de 58 volontaires avec une méthode originale. Selon Nadine Lauverjat, déléguée générale de l’association Générations Futures : « la méthode est très simple il suffit de commander un petit kit avec une lingette que l’on pose sur sa vitre extérieure. Il faut ensuite renvoyer l’échantillon pour avoir le résultat des analyses ».

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Parmi ces 58 riverains, il y a Bernard. Il habite en bordure d’un village du Gard, entouré de vignes : « la distance entre ma fenêtre et les vignes est d’environ 50 m ». Résultat, le laboratoire a retrouvé la trace de 8 pesticides, dont 4 qui ont pu être quantifiés. Ce sont tous des fongicides utilisés couramment en viticulture avec notamment l’amétoctradine, un fongicide utilisé pour traiter l’oïdium qui est suspecté d’être nocif pour la reproduction. « Je n’ai pas été très étonné. On a eu un printemps où les traitements ont été très réguliers. Dès que les agriculteurs traitent la vigne on le sent. Cela interpelle et même si les agriculteurs font parfois un effort pour limiter les traitements puisque j’en discute avec eux, quand le temps n’est pas favorable et qu’il fait humide, les fongicides sont très fréquemment utilisés » déplore-t-il.

La réglementation actuelle ne prévoit des distances de sécurité que de 5, 10 ou 20 mètres maximum pour les produits les plus dangereux

Au total, des résidus de pesticides ont été retrouvés donc dans près de 80% des échantillons. Une autre indication est importante de cette étude. Il s’agit de l’exposition qui varie en fonction de la distance entre les habitations et les cultures. Avec des pesticides identifiés dans 95% des échantillons prélevés à moins de 20 m des cultures et 50% chez les riverains situés à plus de 100 mètres. La réglementation actuelle ne prévoit des distances de sécurité que de 5, 10 ou 20 mètres maximum pour les produits les plus dangereux.

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Ce n’est pas suffisant selon Nadine Lauverjat : « cette distance de 100 m est intéressante car elle marque une différence entre ceux qui sont au plus près et ceux qui sont au-delà. Les zones inscrites dans le décret sont trop faibles au regard des types d’épandages avec la dispersion qui se produit ». Le conseil d’Etat a d’ailleurs ordonné, en juillet dernier, au gouvernement de revoir sa copie sur ses zones de non-traitement en lui laissant 6 mois pour publier de nouveaux textes : « on les attend toujours, on est censés les avoir avant la fin de l’année. On attend des distances supplémentaires pour les substances les plus dangereuses et cancérigènes de niveau 2. Il va falloir que le gouvernement s’active et nous propose des textes qui répondent aux attentes des riverains qui sont tout à fait légitimes » dit-elle. L’ANSES (l’Agence nationale de sécurité sanitaire) et Santé Publique France viennent de lancer une étude sur l’exposition aux pesticides des riverains d’exploitations viticoles. Mais les premiers résultats ne sont pas attendus avant 2024.

Baptiste Gaborit 

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