Néonicotinoïdes : le Conseil constitutionnel saisi par des députés et des sénateurs

La bataille sur les néonicotinoïdes se poursuit. Le gouvernement veut permettre aux betteraviers de réutiliser cet insecticide, surnommé tueur d’insectes. Le projet de loi a même été voté définitivement au Sénat la semaine dernière. Mais des sénateurs et des députés viennent de saisir le Conseil constitutionnel et relancent le débat.

Delphine Batho estime que « ce texte est contraire à la Constitution »

84 députés socialistes, insoumis et d’autres groupes de gauche mais aussi des sénateurs ont décidé d’attaquer le texte. Ils remettent en cause l’étude d’impact, qu’ils jugent fallacieuse et estiment que la loi est contraire à plusieurs articles de la Charte de l’environnement, qui fait partie du bloc de constitutionnalité français. Parmi ces députés, Delphine Batho estime que le texte va à l’encontre de la Constitution : « ce projet de loi réautorise un poison dont plus de 1000 études scientifiques disent les effets catastrophiques avec une pollution massive des écosystèmes. Il y a des conséquences graves pour les pollinisateurs, les oiseaux. Ce texte est contraire à la Constitution et à la Charte de l’environnement, qui donne à toute personne le devoir d’éviter les atteintes à l’environnement ou d’en limiter les conséquences ».

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De nombreuses études scientifiques ont documenté les dégâts sur les biodiversités de ces insecticides, interdits en 2016. La loi contrevient donc selon Delphine Batho au principe de prévention mais aussi au principe de non régression. L’enjeu majeur de cette saisie du Conseil constitutionnel est là car ce principe de non régression impose que l’on ne revienne pas en arrière en matière de droit de l’environnement.

 

Le principe de non régression est reconnu en Espagne ou en Belgique mais pas encore en France

Cependant, ce principe n’est pas encore reconnu au niveau constitutionnel. Julien Bétaille est maitre de conférence à l’univsersité Toulouse 1, spécialiste du droit de l’environnement et revient sur cette notion : « pour le moment ce principe existe de manière explicite dans la loi mais il y a un flou dans la Constitution. On ne le trouve pas dans la Charte de l’environnement en tant que tel mais on trouve une obligation d’œuvrer en faveur d’une amélioration de l’environnement. De nombreux juristes ont considéré que ce principe de non-agression existe déjà dans la Charte ».

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Si le conseil constitutionnel reconnaît ce principe, il devra trancher ensuite sur la conformité de la loi néonicotinoïdes. La possibilité de voir la loi retoquée, jugée inconstitutionnelle n’est pas nulle. « Sur le fait que ce soit une régression ou non, il n’y a pas de doutes. La question est plutôt de savoir si on peut admettre une dérogation qui n’est que temporaire » explique Julien Bétaille. Au-delà de la loi, l’enjeu est considérable pour le droit de l’environnement de manière générale. Le gouvernement lui va défendre sa loi devant le Conseil constitutionnel qui devra trancher dans moins d’un mois. Julien Bétaille rappelle par ailleurs que ce principe de non régression est reconnu dans les constitutions de plusieurs pays étrangers, notamment en Espagne ou encore en Belgique..

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