Justice : Pourquoi les magistrats sont en grève ce mardi

NICOLAS MESSYASZ/SIPA

Magistrats, avocats et greffiers sont en grève aujourd’hui, un an après la « tribune des 3000 ». Au tribunal de Bobigny, le personnel judiciaire est excédé.

A Bobigny, 12 audiences pénales pour mineurs ont dû être annulées

Les deux principaux syndicats de magistrats ont appelé à la grève ce mardi, un an après la publication de la « tribune des 3000″, qui dénonçait leurs conditions de travail. Depuis, rien n’a changé. Le nombre de justiciables a même augmenté, sans effectif supplémentaire. Aujourd’hui, les magistrats travaillent dans des conditions plus que dégradées : au tribunal de Bobigny, la vétusté des locaux saute aux yeux mais le problème matériel n’est pas le plus important, affirme la juge des enfants Emmanuelle Quindry. « Ne pas avoir de papier pour l’imprimante, ni même d’imprimante, et ne pas avoir de chauffage dans un bureau de juge, c’est secondaire quand on n’a pas de personnel », lâche-t-elle.

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Son travail est essentiel au fonctionnement de la société selon elle, mais le mois dernier, par manque de greffiers, le premier tribunal de France pour enfant a dû annuler 12 audiences pénales. Des audiences où sont jugés les dossiers les plus graves en matière de délinquance des mineurs : « c’est là qu’on donne aux mineurs des réponses et des sanctions éducatives, dont ils ont besoin », explique Emmanuelle Quindry. A l’heure actuelle, 120 mineurs « délinquants, et donc en danger » n’ont pas été jugés. La juge est très inquiète : « si on ne fait rien pour ces enfants en souffrance, on se construit une société qui aura des adultes victimes, qui sont auteurs d’infractions et inadaptés ».

Les réformes ont alourdi le travail sans allouer plus d’effectifs, dénonce Maximin Sanson

Le tribunal de Bobigny reçoit 80 dossiers par mois. Les magistrats peuvent seulement en traiter une vingtaine, précise le vice-président Maximin Sanson, représentant de l’Union Syndicale des Magistrats. Ce décalage crée un « stock ». « Si, demain, on arrête de me saisir, j’aurais  besoin de 10 ans pour rédiger tout ce qui nous est arrivé », soupire-t-il. Les réformes récentes ont alourdi la charge de travail sans aucune augmentation d’effectif : « le degré 0 de l’anticipation », dénonce le vice-président. « Ces réformes ont certes amélioré l’accès aux droits, mais cela amène plus de gens dans les tribunaux, sachant qu’on n’est plus capable de remplir les missions de la veille », alerte-t-il. Il faudrait 3 magistrats et 2 greffiers supplémentaires pour assurer un fonctionnement normal au tribunal de Bobigny. Au niveau national, si le ministère de la Justice met en avant une nouvelle hausse de 8% du budget, les magistrats affirment ne voir aucun changement sur le terrain.

Julie Droin

Retrouvez le reportage de Julie Droin à Bobigny :

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