Jean-François Delfraissy était l’invité de la matinale de Guillaume Durand ce mardi 3 mars. Le président du Comité consultatif national d’éthique a indiqué que la France devrait passer au stade 3 de son plan anti-coronavirus d’ici « dix à quinze jours », avec une « machine de guerre médicale » lancée contre l’épidémie. « Plutôt que de compter les morts, comptons les vivants », s’est-il aussi agacé face à toute l’agitation du moment.
Coronavirus : La France enregistre 3 morts et 190 patients contaminés
« On ne se sert plus la main, car on sait que c’est un facteur de transmission qui est un des plus importants ». Dès son entrée dans le studio de Radio Classique, Jean-François Delfraissy, le président du Comité national d’éthique a appliqué les mesures de précaution qu’il est venu marteler ce matin. « On se lave les mains, avec au mieux, des solutions hydroalcooliques. Les masques ne sont pas nécessaires. Ils doivent être réservés aux professionnels de santé et aux personnes qui sont suspectes et dont on ne sait si elles ont une pathologie ou pas ».
à lire aussi
Actuellement, la France, qui a enclenché le stade 2 de son plan anti-épidémie, a enregistré 3 décès dû au coronavirus et dénombre au moins 190 personnes infectées. Le passage au stade 3, nettement plus drastique dans ces répercussions, devrait être promulgué « probablement dans les dix à quinze jours qui viennent », d’après Jean-François Delfraissy. Le stade 3 est défini par le critère de « contaminations communautaires ». Sa mise en place dépend du nombre et de la localisation des clusters, soient des chaînes de contamination comme on en compte actuellement en Haute-Savoie, dans l’Oise et en Bretagne.
L’intérêt de la société doit passer au-dessus des droits individuels, pour Jean-François Delfraissy
« Quand il y a une multiplication des clusters sur l’ensemble du territoire, c’est là que l’on considère qu’il y a une contamination communautaire », a précisé Jean-François Delfraissy. La mise en application du stade 3, avec « des mesures encore plus restrictives », devrait avoir d’importantes « conséquences économiques et humaines ». « La vision collective doit dépasser le droit individuel, à condition que cela soit clair, annoncé, transparent et transitoire ». Alors, « on arrêtera les réunions de football, comme les autres ».
#Coronavirus : "Je ne suis pas très inquiet. Toute la machine de guerre médicale et scientifique travaille sur ce virus. Malgré sa contagiosité, sa létalité est faible"
Jean-François Delfraissy, immunologue
? https://t.co/KY14TqCmh4 pic.twitter.com/21jrpDk0WQ
— Radio Classique (@radioclassique) March 3, 2020
Le maintien du match entre l’OL et la Juventus Turin, en pleine épidémie de coronavirus en Italie, avait fait polémique il y a quelques jours, alors que dans le même temps, d’autres manifestations étaient, elles, annulées. « En phase 3, les choses seront très différentes. Les personnes qui ont une forme simple, on va les laisser chez elles et les suivre par téléphone mais [on va traiter] sur les hôpitaux les formes graves pour ne pas encombrer les urgences ». Il assure, malgré l’ampleur de tous ces dispositifs, ne pas être « inquiet » par le virus, et pour deux raisons.
Par « éthique », la chloroquine n’aurait pas dû être présentée comme remède possible
« Premièrement, il y a toute la machine de guerre médicale dessus. Deuxièmement, il est contagieux mais on a une mortalité qui baisse. On est parti d’une mortalité de 4-5% en Chine avec maintenant avec une mortalité autour de 1% ». Un des motifs de craintes de l’opinion publique reste l’absence de traitements spécifiques à l’adresse des porteurs du Covid-19. « On leur donne rien pour l’instant. On va pouvoir leur donner des « candidats médicaments » à partir de la semaine prochaine », a-t-il indiqué.
à lire aussi
Parmi ses « candidats », sans doute la chloroquine, un anti-paludéen qui serait efficace contre les symptômes pulmonaires, d’après le directeur de l’Institut hospitalo-universitaire Méditerranée infection à Marseille (IHU). Une déclaration faite par Didier Raoult il y a plusieurs jours et qui a entraîné depuis des remous dans le milieu médical ; aucune étude sur l’Homme n’ayant pour l’heure été menée. « Il y a une forme d’éthique médicale et scientifique à ne pas annoncer des traitements que l’on a pas pour l’instant, a blâmé Jean-François Delfraissy. La chloroquine est un médicament potentiel mais pour l’instant, on a pas les données pour le dire ».
Pas d’amélioration attendue avant la fin du printemps
« Plutôt que de compter les morts, comptons les vivants. Il y a plus de 97% qui sortent de cette infections sans trop de problème, et peu ou pas d’enfants », a-t-il tâché de rassurer. Interrogé sur les bien-faits supposés du « Sacre du Printemps » [référence à Igor Stravinsky] et la hausse à venir des températures, Jean-François Delfraissy s’est montré sceptique. « Je n’en sait rien. C’est un virus que l’on ne connaissait pas il y a trois mois. La baisse des cas en Chine » peut être due aux « mesures de restriction extrêmement fortes prises de manière drastique » par Xi Jinping.
« La seconde, c’est que dans ces grandes pandémies, il y a toujours une baisse car [survient] une sorte d’immunité collective qui aboutit a une guérison ». S’il s’est dit optimiste pour la suite, il a choisi de conclure sur une note quelque peu défaitiste : « Est-ce que ce sera au printemps ou plus tard ? J’ai tendance à penser que ce sera plus tard ».
Radio Classique https://t.co/wtgMluigBa
— Radio Classique (@radioclassique) March 3, 2020
Nicolas Gomont