JO de Paris 2024 : Malgré la guerre, les sportives ukrainiennes Maryna et Vladyslava Aleksiïva s’entraînent à Kiev

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Pendant que l’Assemblée nationale se prononce aujourd’hui sur le projet de loi concernant les Jeux Olympiques, les athlètes, eux, continuent de se préparer. Et à moins d’un an et demi du rendez-vous parisien, qu’en est-il de la question des sportifs ukrainiens ?

 

Maryna et Vladyslava Aleksiïva ont été médaillées de bronze aux JO de Tokyo

A cause de la guerre, beaucoup de sportifs ukrainiens ont dû fuir le pays pour poursuivre leur entraînement. Mais certains ont fait le choix de rester coûte que coûte, malgré les risques encourus et les conditions d’entraînement très dégradées. On les surnomme « les jumelles Aleks » :  Maryna et Vladyslava Aleksiïva ont 21 ans. Ce sont des prodiges de la natation artistique avec un palmarès long comme le bras : médaillées de bronze aux JO de Tokyo, championnes du monde par équipe et multiples championnes d’Europe. Originaires de Kharkiv, c’est là qu’elles s’entraînaient jusqu’en septembre dernier avant la destruction de leur centre sportif par une frappe russe. Meurtries, les sœurs Aleksïïva quittent brièvement le pays. Mais très vite, elles décident de revenir en Ukraine, raconte Vladyslava : « On se sent bien mieux quand on est dans son propre pays, quand on est plus proches de sa famille. Ça fait du bien d’être ensemble, de parler la même langue, de comprendre mutuellement ce qu’on traverse avec tous les Ukrainiens. Pour nous, rester ici, faire preuve de force et de courage, c’est le meilleur moyen d’aider l’Ukraine ». 

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Depuis leur départ forcé de Kharkiv, les championnes ont trouvé refuge à Kiev, loin de la ligne de front. Mais dans la capitale, où elles préparent les Jeux Olympiques de Paris, la tranquillité est toute relative et les conditions d’entraînement loin d’être idéales confie Maryna Aleksiïva : « Presque tous les jours, on entend des alertes aériennes. Il faut rejoindre l’abri anti-bombes au plus vite, même si on est en plein entraînement. Parfois, à cause des frappes russes, on se retrouve sans électricité et sans chauffage. Cet hiver, l’eau de la piscine était si froide qu’on devait mettre une combinaison intégrale ! Dans ces conditions, c’est clair qu’on est désavantagées par rapport à nos concurrentes, mais c’est pour ça qu’on s’entraîne encore plus dur que les autres nageuses ».  

 

Le CIO se réunit pour discuter d’un retour des Russes et Biélorusses dans les compétitions internationales

7h par jour et à raison de 6 fois par semaine, les jumelles nagent, peaufinent leurs chorégraphies, font de la musculation. Une pratique ultra-intensive qui leur permet aussi de s’évader. Mais bien souvent la motivation n’est pas vraiment là, explique Vladyslava : « C’est très dur de se concentrer sur la natation, de ne pas penser à la guerre, et au danger qui est partout.  Pour ne pas être trop perturbées, notre coach nous interdit de regarder les informations avant les compétitions ». Car les sœurs Aleksiïva continuent autant que possible de participer à des compétitions internationales. C’est important pour montrer que l’Ukraine est toujours debout, expliquent-elles. Mais avec la fermeture de l’espace aérien ukrainien, se rendre à l’étranger relève aujourd’hui du parcours du combattant : «  ça nous a pris 3 jours entiers pour faire le voyage. D’abord, il a fallu faire 12 heures de train jusqu’à Lviv, puis 5h pour rejoindre la frontière polonaise et puis encore de la route jusqu’à Wroclaw. C’est seulement là qu’on a pris l’avion pour le Canada.  Entre le temps de trajet et le jet lag, ça génère beaucoup de fatigue. C’est aujourd’hui notre plus gros problème ».

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Même si cette fatigue n’empêche pas le duo de briller, au Canada, les jumelles ont tout de même remporté la médaille d’argent. Preuve que les Ukrainiennes peuvent espérer faire de grandes choses au Centre Aquatique Olympique de Saint-Denis, où se dérouleront les épreuves de natation artistique en 2024. Mais à l’approche des JO, Maryna et Vladyslava se disent prêtes à tout sacrifier : leur entraînement intensif, les risques pris au quotidien, en raison de l’éventuelle participation des athlètes russes et biélorusses : « Aller aux Jeux Olympiques est notre plus grand rêve, mais nous n’hésiterons pas boycotter les JO. C’est inimaginable d’être sur un podium avec des Russes, ou de partager la même piscine. Beaucoup d’athlètes russes soutiennent la guerre, des gymnastes ont même fait des dons pour soutenir l’armée. Ces soldats tuent, détruisent nos villes et nos vies. On ne peut pas être à côté de l’équipe russe. On espère que les autres pays comprendront notre position, et qu’ils nous soutiendront ». Et le CIO n’a pas encore tranché sur cette question sensible. Pressé de clarifier sa position, le Comité international olympique se réunit justement aujourd’hui, pour discuter d’un retour des Russes et Biélorusses dans les compétitions internationales.

Rémi Vallez

Ecoutez le reportage de Rémi Vallez (à partir de 6′)

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