Debussy se montre toute sa vie résolument moderne. Son opéra Pelléas et Mélisande, La Mer, ses pièces pour piano, ne peuvent se résumer aux étiquettes esthétiques qu’on a voulu leur attribuer. Debussy se tourne toujours vers l’avenir, comme en témoignent ses sonates, ultimes chefs-d’œuvre d’un compositeur fasciné par les couleurs des sons.
Debussy s’intéresse autant à Wagner qu’aux gamelans javanais, mais en tire toujours un style éminemment personnel.
Debussy, ce génie de la musique, n’a pas obtenu de 1er Prix au Conservatoire ! Rebelle à l’art académique qui y est enseigné, Debussy cultive une richesse harmonique résolument moderne et met en rage ses professeurs. Jusqu’à la fin de sa vie, il suivra son instinct, ce qui nous vaut des chefs-d’œuvre aussi divers que le Prélude à l’après-midi d’un faune, la Suite bergamasque ou la Sonate pour violoncelle et piano. De passage à Bayreuth en 1888, Debussy est très impressionné par les opéras de Wagner. Cette musique va profondément le marquer pendant quelques temps, avant qu’il ne la dénigre pour s’orienter vers autre chose. Un autre choc esthétique survient en 1889 : l’Exposition universelle montre à Paris les gamelans javanais, percussions indonésiennes auxquelles Debussy emprunte le mode pentatonique.
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Taxé « d’impressionniste », Debussy se rapproche plutôt du symbolisme, avant de poursuivre son propre chemin.
En 1894, un concert à Bruxelles fait entendre au public des pages exclusivement de Debussy… entourées par des œuvres signées Sisley ou Renoir : le concert a lieu dans une galerie de peinture ! Est-ce de là que vient l’étiquette “impressionniste” qu’on lui colle trop souvent à la peau ? Pourtant, si “En bateau” de la Petite Suite peut éventuellement évoquer dans l’imaginaire de l’auditeur des paysages de Monet, Pelléas et Mélisande est lui beaucoup plus symboliste… comme la pièce de Maetterlinck dont il est tiré. La ligne de chant totalement novatrice déstabilise les spectateurs lors de la création de cet opéra en 1902. Car Debussy est avant tout moderne, ce que confirmeront les œuvres suivantes.
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Concerto, Trio, Sonate, Debussy renouvelle en profondeur les genres traditionnels.
Les Etudes ou les derniers Préludes pour piano ne sauraient être rangés sous aucune bannière esthétique. Debussy ne dénigre pas le genre du concerto mais le renouvelle en profondeur, avec les deux Danses pour harpe et orchestre à cordes, ou la Rhapsodie pour clarinette. En musique de chambre aussi il se tourne vers la nouveauté. Il ose même une Sonate pour flûte, alto et harpe, combinaison de timbres audacieuse que reprendront Jolivet et Takemitsu. Mais l’essentiel de l’œuvre de Debussy revient au piano et à l’orchestre. Comme Berlioz ou Tchaïkovsky, Debussy est un grand orchestrateur. Comme eux, il s’adonne aussi à la critique musicale pour vivre. Sous le nom de Monsieur Croche, il signe des articles d’une ironie mordante, qu’il est encore savoureux de relire aujourd’hui.
Sixtine de Gournay
1) “Clair de lune”, Suite Bergamasque (Seong-Jin Cho)
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2) Prélude à l’après-midi d’un faune (Orchestre Symphonique de Londres, dir. François-Xavier Roth)
3) “La fille aux cheveux de lin”, n°8 du Livre I des Préludes (Lang Lang)
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4) La Mer, “De l’aube à midi sur la mer” (dir. Claudio Abbado)
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5) Danse profane pour harpe et orchestre à cordes (Anneleen Lenaerts, Brussels Philharmonic, dir. Michel Tabachnik)