Crise de l’énergie : Comment la France peut accéder à la sobriété

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Emmanuel Macron a réuni ce matin à l’Elysée un conseil de défense sur la crise énergétique. Face à la possible pénurie de gaz et d’électricité cet hiver, le gouvernement fait de la sobriété énergétique une priorité, avec l’objectif de baisser la consommation d’énergie de 10%. Mais il en faudra beaucoup plus pour résoudre les problèmes en cours.

La priorité est de faire respecter les mesures de sobriété et sensibiliser la population aux écogestes

Toutes les économies sont bonnes à prendre, via ce qu’on appelle les écogestes : éteindre la lumière quand on peut, baisser le chauffage… Mais ce qui va vraiment peser dans la balance cet hiver, c’est la météo. Est-ce qu’il va faire très froid ou pas ? Impossible à savoir, selon Nicolas Goldberg, expert des questions énergétiques pour le cabinet Colombus Consulting. « Peu importe ce qui sera mis en place, ça ne sera pas suffisant pour compenser la perte de production et pour qu’on soit complètement serein », regrette-t-il. « Mais la tenue d’un conseil de défense énergétique permet de montrer que le sujet est sérieux ». Elisabeth Borne a appelé toutes les entreprises à établir des plans de sobriété. Il y a aussi une interdiction nocturne des publicités lumineuses dans toutes les villes, la fermeture des portes du magasin quand la climatisation fonctionne. Celle-ci est limitée à 26 degrés, et le chauffage à 19 degrés dans les bâtiments publics. La priorité, selon Nicolas Goldberg, est de faire respecter la loi. Et puis il va falloir mobiliser la population. « C’est la principale incertitude », commente Andreas Rüdinger, spécialiste énergie à l’Institut du Développement Durable et des Relations Internationales (IDDRI). « Les entreprises, les bâtiments publics et les citoyens doivent comprendre qu’il faut appliquer les écogestes ».

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Une campagne de communication sera d’ailleurs mise en place à l’automne. Les tarifs spéciaux permettant à des consommateurs de payer moins cher – à condition de ne pas consommer lors des pics – doivent aussi être relancés. Néanmoins, pour l’instant, on parle beaucoup de mesures d’urgence et pas de long terme, regrette Andreas Rüdinger. « Pour 2022, il y a 30 milliards d’euros de dépenses publiques pour faire face à la crise mais rien pour la rénovation énergétique ou le passage à la mobilité propre ». Le spécialiste s’interroge aussi sur les filières éoliennes et photovoltaïques, dont le potentiel n’a pas été assez exploité. « On a aujourd’hui 20 gigawatts de projets [de ces filières] en file d’attente. Si on avait pris des mesures pour les débloquer il y a un an, on aurait eu de l’énergie verte pour réduire la consommation des centrales à gaz », poursuit-il.

Le bouclier tarifaire et les mesures d’urgence doivent céder le pas à des mesures plus structurelles

Même avis du côté de Nicolas Goldberg : le bouclier tarifaire qui protège des hausses de prix et les mesures d’urgence vont s’arrêter un jour ou l’autre. La sobriété est aussi indispensable pour respecter nos engagements climatiques : il faut des mesures plus structurelles, pour moins consommer de gaz, d’électricité et de pétrole. Une réflexion à mener dans tout le spectre politique. « Il ne faut pas incriminer uniquement le gouvernement : les oppositions sont encore bien complaisantes vis-à-vis des énergies fossiles et de leur subvention », pointe Nicolas Goldberg, qui remarque qu’on est « bloqué dans l’urgence ». On en a l’exemple avec les aides pour les ménages qui se chauffent au fioul. Dans les semaines à venir, deux textes importants feront sûrement l’actualité : la programmation énergie climat et le projet de loi pour accélérer sur les renouvelables prévu en octobre au Parlement.

Baptiste Gaborit

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