Des lettres intimes de Mozart accessibles au public au Mozarteum de Salzbourg

©Wolfgang Lienbacher

Au début de l’année le Mozarteum de Salzbourg a fait l’acquisition de 3 lettres originales émanant de membres de la famille Mozart. En raison de la pandémie de coronavirus, la Fondation dédiée au compositeur autrichien n’avait pu présenter qu’une seule de ces 3 missives. Désormais elles sont toutes accessibles au grand public.

Une lettre de Mozart à sa femme Constance a été mise en ligne en avril 2020

Selon les spécialistes, ces 3 lettres représentent certainement le plus important apport à la collection de lettres originales détenues par la Fondation Mozarteum. L’une d’elles, adressée par Wolfgang Amadeus Mozart à Constance sa «petite femme la plus chère et la plus précieuse», expédiée de Prague lors d’un voyage qui l’avait également mené à Berlin, Dresde et Leipzig et datée du 10 avril 1789, avait été diffusée en ligne en avril dernier.

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La deuxième, présentée ce mois-ci à Salzbourg, a été écrite par son père Léopold à Bologne le 28 juillet 1770 lors du 1er séjour de Mozart en Italie, adressée à sa femme Anna Maria, restée à Salzbourg. Elle comprend un court post-scriptum de Wolfgang Amadeus, écrit en italien et adressé à sa « carissima sorella » (sa « plus chère sœur »), Maria Anna (Nannerl).

La dernière lettre de Mozart à son père gravement malade

Mais ce qui constitue le document le plus inédit est la 3lettre acquise par le Mozarteum adressée par Wolfgang Amadeus Mozart à son père Léopold le 4 avril 1787, soit quelques semaines avant son décès le 28 mai. Un lettre touchante dans laquelle le compositeur indique à son père qu’il est au courant de l’évolution de sa maladie : « J’apprends maintenant que vous êtes vraiment malade ! J’espère et souhaite que vous alliez mieux au moment où j’écris ces lignes mais si, contre toute attente, vous n’alliez pas mieux, je vous prie de ne pas me le cacher et de me faire savoir la vérité pure, afin que je puisse aller me blottir dans vos bras, aussi rapidement qu’il serait humainement possible ».

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Ce qui interpelle également dans cette lettre, c’est le passage dans lequel Wolfgang Amadeus évoque une issue fatale à l’évolution de la santé de son père qu’il pressent lorsqu’il écrit : « La mort, quand on y regarde de près, est le véritable but de notre vie, c’est pourquoi depuis plusieurs années je me suis familiarisé avec ce véritable meilleur ami de l’homme à tel point que son image n’est plus seulement source de terreur pour moi mais offre beaucoup de réconfort et de consolation! Et je rends grâce à mon Dieu de m’avoir donné la chance de trouver une opportunité, vous comprenez ce que je veux dire, de réaliser que la mort est la clé à notre vrai bonheur ». Certains y voient une influence maçonnique dont Mozart était un fervent adepte, entre autres dans les lectures du compositeur qui appréciait notamment Moses Mendelssohn, Edward Young ou Gotthold Ephraim Lessing qui ont développé des pensées semblables sur l’image « positive » de la mort.

 

 

L’incroyable parcours de la lettre de Mozart à son père

Une lettre, dont le contenu symbolique avait été révélé en 1829 dans la biographie de Mozart écrite par Georg Nikolaus Nissen, le second époux de Constance Mozart, mais qui avait suscité un certain scepticisme. Personne ne savait où était passée l’originale qui, contrairement à la majorité de la correspondance de la famille Mozart, avait échappé au Dommusikverein und Mozarteum, créé en 1841, l’ancêtre de la Fondation Mozarteum. La fameuse lettre aurait été léguée par Franz Xaver Wolfggang, le second fils de Mozart, à sa compagne Joséphine Baroni-Cavalcabò.

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L’identité des propriétaires suivants de la précieuse missive est assez mystérieuse. On la retrouve chez un juriste viennois en 1877 puis dans les collections du musée d’Histoire de la musique de Wilhelm Heyer à Cologne avant qu’elle ne se perde lors de 4 ventes aux enchères du fonds de ce musée à Berlin dans les années 1920 et qu’elle réapparaisse à une date inconnue entre les mains d’Albi Rosenthal, célèbre antiquaire spécialisé dans les autographes musicaux. Le dernier propriétaire de la lettre, et des deux autres ci-dessus citées, fut l’écrivain américain Maurice Bernard Sendak (célèbre pour son album « Max et les maximonstres ») qui les céda, avant sa disparition en 2012, au Rosenbach Museum & Library. Le musée de Philadelphie qui a donc décidé de vendre au début de l’année 2020 ces trois lettres originales à la Fondation Mozarteum de Salzbourg.

Philippe Gault

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