Cela fait précisément 3 ans que le premier confinement a été annoncé, au tout début de la pandémie de Covid-19. L’immunologue Brigitte Autran était l’invitée de la matinale de Radio Classique ce mercredi 15 mars. La présidente du COVARS, le comité français de veille et d’anticipation des risques sanitaires rappelle que l’épidémie est toujours « sous haute surveillance ».
Brigitte Autran : « On ne pouvait pas faire autrement que confiner »
Où en est la propagation du COVID dans l’Hexagone ?
On est dans une endémie avec une stabilisation qu’on surveille très étroitement. Le niveau est bas, il correspond à peu près à celui du mois d’août 2022, après la grande vague d’omicron de fin juin /début juillet. Il y a environ 30 à 35 morts par jour dans l’Hexagone qui sont liés à la Covid et un petit peu moins de 15.000 personnes hospitalisées en France.
L’épidémie de Covid n’est pas terminée…
Non, elle n’est pas terminée, ni en France, ni ailleurs dans le monde. Elle est partout, endémicisée, on la surveille très étroitement. Il est vrai qu’on la surveille un petit peu moins étroitement que pendant les 3 années qui viennent de s’écouler. Mais néanmoins, elle est sous haute surveillance.
On a compté 165.000 morts de la Covid en France en 3 ans, environ 9.000 morts sur la dernière année. Ces chiffres sont assez proches d’une épidémie de grippe ?
Oui absolument. Vous savez que certaines épidémies de grippes, certaines années, ont induit jusqu’à 15.000 à 18.000 morts par saison. Donc oui, on est dans l’ordre de grandeur des épidémies de grippe. Mais pour l’instant, c’est étalé sur l’année.
Le premier confinement a été annoncé il y a 3 ans jour pour jour. Selon vous, il était totalement indispensable ?
On ne pouvait pas faire autrement. La vague était absolument énorme, personne n’avait d’immunité. Nous étions tous ce qu’on appelle « naïfs » dans notre jargon : pas d’anticorps, pas de défense immunitaire, pas de vaccin, pas de traitement et c’était un virus qui était hautement transmissible, donc il n’y avait pas d’autres façons que de faire un confinement pour arrêter. D’ailleurs, ça a été très efficace. Mais depuis que nous avons des vaccins et des traitements, il n’y a plus de raison d’organiser de confinements.
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Parlons justement du vaccin. 80% de la population française a au moins reçu 3 doses. Mais depuis plusieurs mois, on ne sait plus si on doit continuer à se faire vacciner ?
C’est vrai, il n’y a plus assez d’informations sur le virus. Mais il y a toujours une surveillance attentive et la recommandation qui avait été faite à l’automne reste vraie : les personnes qui sont à risque, les personnes qui ont plus de 65 ans et leur entourage doivent se faire vacciner s’ils n’ont pas été infectés ou vaccinés depuis plus de 6 mois.
La grande inquiétude aujourd’hui, ce sont les cas de Covid long ?
Les cas de Covid long ont surtout été importants lors des premières vagues, leur incidence décroît grâce à la vaccination. Aujourd’hui, ça reste un sujet important parce qu’il n’est pas résolu, c’est-à-dire qu’on ne sait toujours pas de façon précise à quoi est dû le Covid long et comment le traiter. Il concerne aujourd’hui quelques centaines de personnes.
Quelles leçons avez-vous tiré de cette crise sans précédent ?
La leçon principale, c’est la nécessité d’organiser la société pour qu’elle accepte cette notion de prévention par les gestes barrières, et par la vaccination. On entre dans une phase de plusieurs années ou dizaines d’années où le risque épidémique va être récurrent.
Cela veut dire qu’on va vivre peut-être dans quelques années de nouvelles épidémies dont on ne connaîtra pas forcément le virus ?
Depuis 15 ans, il y a eu une succession d’épidémies soit localisées, soit de nature pandémique très inhabituelles. C’est lié à la multiplication des voyages et à l’augmentation de la population terrestre, c’est donc inévitable. C’est aussi peut-être lié aux changements climatiques. Cette culture de la prévention est extrêmement importante et je pense que la Covid a permis au moins à une partie de la population d’accaparer les gestes barrières et de comprendre l’intérêt de la vaccination.