LABEQUE Katia et Marielle – biographie

(1950- ) et (1952- ) Pianistes

Katia et Marielle Labèque joue à 2 pianos depuis leur adolescence. Les deux sœurs se sont forgé un répertoire éclectique, où la musique contemporaine et le classique voisinent avec le jazz ou le rock. Grâce à leur propre label KLM, elles soutiennent des artistes d’horizons variés. Les rencontres et la liberté artistique, voilà ce qui les passionne avant tout.

Katia et Marielle Labèque en 8 dates :

  • 1950 : Naissance de Katia à Bayonne
  • 1952 : Naissance de Marielle à Bayonne
  • 1968 : 1er Prix de piano au Conservatoire de Paris
  • 1970 : 1er disque chez Erato (Visions de l’Amen de Messiaen)
  • 1980 : Version originale de la Rhapsody in blue de Gershwin (Philips)
  • 2005 : Création de la Fondation KML à Rome
  • 2007 : Création du label KLM
  • 2016 : Deutsche Grammophon signe un contrat de distribution de KLM

Les sœurs Labèque apprennent le piano avec leur mère, elle-même pianiste.

Leur père, médecin, fait partie des chœurs de l’Opéra de Bordeaux. Leur mère, Ada Cecchi, ancienne élève de Marguerite Long, est professeure de piano. Elle fait commencer l’instrument à ses filles, et les suivra pendant toutes leurs études. « La musique était présente constamment à la maison, on écoutait des opéras, c’était très joyeux, il y avait tout le temps des élèves qui venaient jouer. […] C’est maman qui nous a donné ce goût de la musique et la discipline de travail », racontent les sœurs sur France Culture en 2020. A l’adolescence, elles quittent le Pays basque pour le Conservatoire de Paris. Leur 1er Prix en poche en 1968, elles continuent en cycle de perfectionnement avec Jean Hubeau. C’est à ce moment qu’elles commencent à jouer à 2 pianos. Leur mère n’est sans doute pas étrangère à cette orientation. « Elle n’a jamais fait de carrière. Elle avait ce rêve que ses deux filles joueraient sur les scènes du monde entier à quatre mains, » expliquent-elles sur France Info en 2021. Restées très fusionnelles, les deux sœurs ont pourtant un caractère très différent. « Katia a veillé sur moi, quand j’étais très jeune à Paris. Elle est mon moteur depuis des années. […] Elle prend des décisions parce que je suis très indécise. Elle est très directe, n’a peur de rien, fonce, et s’adapte à toutes les situations. Moi, je suis toujours un peu à la traîne derrière. Oui, on a besoin l’une de l’autre, » remarque Marielle sur France Info.

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Le monde entier les découvre dans la Rhapsody in blue de Gershwin

Au Conservatoire, Olivier Messiaen leur propose d’enregistrer ses Visions de l’Amen. Ce premier disque, paru en 1970 chez Erato, démarre leur carrière. Suit aussitôt la Sonate pour deux pianos et percussions de Bartok. Cet alliage de timbres leur plaît, et elles joueront régulièrement avec les percussionnistes Pierre Drouet et Sylvio Gualda. Après avoir enregistré Rachmaninov, Hindemith et Martinu, elles se lancent en 1980 dans la version originale pour 2 pianos de la Rhapsody in blue de Gershwin. L’album est disque d’or en moins de six mois, et la renommée des sœurs Labèque devient mondiale. En 1988, Bernstein demande à son arrangeur Irwin Kostal d’écrire pour elles une version de West Side Story.

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Entre temps, elles sont passées chez Philips, où elles enregistrent le répertoire : Danses hongroises de Brahms (1981), Jeux d’enfants de Bizet (1985), Danse slaves de Dvorak (1990), le concerto de Poulenc avec le Symphonique de Boston dirigé par Seiji Ozawa (1991), etc. Beaucoup de ces partitions sont à l’origine écrites pour 4 mains. « Les partitions à 4 mains sont difficiles à projeter dans de grandes salles, c’est pourquoi nous les jouons souvent avec deux pianos. Ce qui permet d’être plus confortable et d’avoir des textures différentes, notamment grâce à la double utilisation des pédales, » expliquent les sœurs à Libération en 2016.

 

Katia et Marielle Labèque s’engagent pour la musique contemporaine auprès de nombreux compositeurs

Tandis que leur discographie s’étoffe (un disque par an en moyenne !), les concerts affluent. Elles jouent avec les philharmoniques de Berlin, Londres, ou encore Los Angeles. Elles se produisent aussi bien dans des petites salles que lors d’événements de masse, comme les Proms de Londres ou la Summer Night de Vienne. Elles s’aventurent dans le répertoire baroque, mais restent fidèles à la musique contemporaine. En 1972, elles rencontrent Luciano Berio. Elles assurent la première européenne de son Concerto pour deux pianos, avant qu’il ne leur écrive Linea quelques années plus tard. Il est loin d’être le seul à composer pour les deux sœurs. Philippe Boesmans collabore avec elles à trois reprises : Sur Mi (1974), Multiples avec orchestre (1977), et Capriccio (2011). Parmi les œuvres créées par Katia et Marielle Labèque, on peut encore citer le Concerto de John Zorn (2001), The Hague Hacking de Louis Andriessen (2009), La Pasion Segun San Marcos avec orchestre de Oslavo Golijov-Gonzalo (2010), ou The Battlefield avec orchestre de Richard Dubugnon (2011). En 2011, elles abordent le minimalisme dans le projet 50 Years of Minimalism, autour d’œuvres de John Cage, Steve Reich, Arvo Pärt ou encore Michael Nyman.

Katia et Marielle Labèque dans Un Américain à Paris de Gershwin (émission « Trèfle d’or » présentée par Christian Morin, 1985, archives de la RTS)

 

La Fondation KLM et son label leur offrent une liberté artistique totale

En 2005, les sœurs créent une fondation à leurs initiales : KLM. La structure veut développer le répertoire pour 2 pianos, promouvoir les rapports entre musique et image, et soutenir la musique expérimentale. Le premier projet voit le jour en 2009 autour du vidéaste Tal Rosner. Un label discographique vient compléter le domaine en 2007. Elles ont ainsi une liberté totale, qui leur permet de s’aventurer à leur guise dans d’autres domaines musicaux, comme le flamenco. « Je suis très angoissée en enregistrement. J’ai la terreur du type qui débarque et dit : « Il faut finir à midi. » Alors qu’on ne peut rien prévoir. […] Maintenant nous avons le confort d’un studio qui est à nous. L’environnement est idéal : ce sont nos pianos, nous avons le temps de nous réécouter, de nous perfectionner. Finalement on gagne un temps fou, » avoue Marielle à Libération en 2016. Le label produit d’ailleurs des artistes d’une grande variété de styles, allant du rock alternatif aux musiques du monde.
Le jazz fait aussi partie de leurs passions. Katia a fait partie au début des années 80 du groupe du guitariste John Mc Laughlin, qui fut un temps son compagnon. Aujourd’hui, elle partage la vie de David Chalmin, compositeur, chanteur et guitariste de Triple Sun, en même temps que producteur – Marielle, elle, a épousé le chef d’orchestre Semyon Bychkov en 1999. Ce qu’elles aiment dans ces musiques éloignées du classique, c’est leur liberté et leur part instinctive. « En travaillant avec quelqu’un comme Thom Yorke, on se rend compte que les gens qui ne savent pas lire la musique ont parfois une supériorité, parce qu’ils ne divisent pas le temps d’une façon métrique. Ils pensent la musique différemment. Le seul inconvénient de notre système d’éducation musicale, c’est que tout est sur une partition et tout est divisé métriquement. Personnellement, je recherche encore ça plus que tout le reste, » reconnaît Katia sur France Culture en 2020.

 

Sixtine de Gournay

 

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