Macron en Algérie : « Si on ne discute pas avec les Algériens, d’autres le feront », avertit Benjamin Stora

Jacques Witt/SIPA

L’historien Benjamin Stora était l’invité de Guillaume Durand ce mardi 30 août sur Radio Classique. Quelques jours après une visite d’Emmanuel Macron en Algérie, il est revenu sur le bain de foule agité pour le président français, assurant que les jeunes ont crié « viva l’Algérie ».

« La colonisation a été très violente, et a duré un demi-siècle », souligne Benjamin Stora

Benjamin Stora s’est félicité, au micro de Guillaume Durand, de l’avancement de plusieurs dossiers, suite à la visite d’Emmanuel Macron en Algérie. La création d’une commission mixte d’historiens a été confirmée : « c’est important, Français et Algériens travailleront en commun sur les archives, et remonteront à l’origine [de la colonisation de l’Algérie par la France] ». Faut-il justement « ouvrir la boîte de Pandore », comme l’affirment certains intellectuels, à l’image de Jean-Marie Rouart dans Le Figaro ? Une remarque qui a agacé l’historien : « je travaille sur l’histoire de l’Algérie depuis 40 ans, et depuis 40, j’entends toujours la même rengaine, n’ouvrons pas la boîte de Pandore, ne disons rien, avançons comme si rien ne s’était passé ». Or, ajoute Benjamin Stora, « il y a une énorme demande d’Histoire dans les deux sociétés ».

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Quid alors des violences passées qui seront mises au jour ? « Bien sûr, la colonisation a été très violente, elle a duré un demi-siècle et elle est peu connue du grand public », explique Benjamin Stora, mais du côté de la jeune génération algérienne, « la formation du nationalisme avec les grandes figures a été reléguée, mise au secret ». Il parle même « d’une sorte d’amnésie autour de l’Algérie ». Dans ces conditions, « l’écriture de l’histoire dans les deux pays est très difficile ».

 

Benjamin Stora évoque un néo-nationalisme des jeunes Algériens « dont il faut tenir compte »

Une histoire nécessaire, car, comme le souligne Benjamin Stora, « l’Algérie est le premier pays d’Afrique, sur le plan géographique, c’est une puissance régionale, une puissance méditerranéenne et une puissance sahélienne. La France ne peut pas être absente d’un dialogue en Algérie ». Paris doit engager des discussions avec les Algériens, poursuit-il, « si on ne le fait pas, d’autres le feront », évoquant la Russie et la Chine. Lors de sa visite en Algérie, Emmanuel Macron a vécu un bain de foule agité. Alors que certains ont parlé d’insultes, Benjamin Stora assure qu’ils ont scandé « one, two, three, viva l’Algérie », l’hymne des stades algériens. Il y voit « la réaffirmation d’un néo-nationalisme dont il faut tenir compte ». Il y a 5 ans, lors de la précédente visite du président français, ils avaient crié « des visas ! », rappelle l’historien.

Béatrice Mouedine

 

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