Le 15 avril 2019, un incendie a ravagé la cathédrale de Notre-Dame de Paris. Comment retrouver le son originel du bâtiment ? Un travail au long cours a commencé il y a quelques mois.
Notre-Dame : un son à la signature spécifique
Ravagée par un incendie en avril 2019, la cathédrale Notre-Dame est toujours en travaux. Tandis que le sciage des chênes, destinés à la flèche a débuté, des scientifiques sont à pied d’œuvre pour restituer un élément essentiel de la cathédrale : le son de Notre-Dame. « On a ici un exemple de comment l’orgue sonne à l’intérieur de la cathédrale », nous sommes à la Sorbonne, à Paris, dans le laboratoire de recherche de Brian Katz. « On a appliqué un modèle assez simple pour montrer un temps de réverbération d’1 de 3 et de 6 secondes pour voir comment cela changeait la sonorité de l’orgue ». Comptez 8 secondes pour avoir la réverbération typique de Notre-Dame « ca fait plus de mélange, chaque note est moins distincte » nous dit Brian Katz.
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Un son à la signature spécifique, comme un écho qui nous enveloppe, reconstitué ici par Brian Katz et son équipe dans un concert virtuel : « la majorité de la surface de Notre-Dame est en pierres brutes et il y a très peu d’absorption. Si on change la pierre par du marbre très lisse cela peut prolonger la réverbération encore plus ». L’incendie de Notre-Dame a provoqué trois trous dans les voûtes, faisant sortir le son. Or, il suffit d’un petit changement d’angle des voûtes pour modifier l’acoustique. « Est-ce qu’ils vont installer les vitraux de la même manière qu’avant ? est-ce plus étanche ? ou est-ce avec une couche de protection qui peut encore plus isoler l’acoustique ? » s’interroge le scientifique. Brian Katz utilise des modélisations 3D pour aider les architectes quant au choix des matériaux. Une base de données nourrie par les recherches de Mylène Pardoën, archéologue du paysage sonore : « aujourd’hui le son de la cathédrale a perdu environ 20% de ses caractéristiques, il est plus pauvre en réverbération ».
Ecoutez le concert virtuel « Ghost orchestra » :
« C’est toute une imbrication sensorielle qui fait Notre-Dame »
Pour retrouver ces sons, Mylène Pardoën a fouillé dans l’histoire et parcouru la France. Dans l’Yonne, elle est allée écouter les pierres du château médiéval de Guédelon ou encore les cloches des cathédrales de Bourges et Sens. « Il ne faut pas imaginer une cathédrale silencieuse, quand on fouille les archives on se rend compte que la cathédrale vit. Cela peut être des bruits de clochettes à des bruits de galoches sur le dallage » nous dit-elle.
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Le son a aussi évolué en fonction du décor de l’époque : « cette idée d’une cathédrale qui est toute simple et sans décor c’est assez nouveau. Quand on voit les peintures du couronnement de Napoléon, il y a des tapis et des rideaux et on peut imaginer que tout ça diminue la réverbération ». Au-delà des débats sur les aménagements proposés pour la cathédrale et son parvis, les chercheurs reconstruisent ici l’histoire de Notre-Dame, témoins uniques de près de 800 ans d’une vie riche en sons. Selon Mylène Pardoën : « c’est un bâtiment qui vit, qui évolue. Heureusement pour nous, la cathédrale ne s’est pas effondrée, Notre-Dame est un coeur qui bat ca n’est pas seulement un vaisseau de pierres, de bois, de fer à l’intérieur c’est toute une imbrication sensorielle qui fait Notre-Dame ».
Regardez la vidéo de prises de son dans Notre-Dame par Mylène Pardoën :
Laurie-Anne Toulemont
Ecoutez le reportage de Laurie-Anne Toulemont :