Ségolène Royal était l’invitée de la matinale de Guillaume Durand lundi 15 juin. La présidente du laboratoire d’idées Désir de France a jugé qu’Emmanuel Macron s’est montré hier lors de son allocution « hors-sol ». Elle a regretté qu’il n’ait « pas pris la mesure des urgences, des souffrances et des questions stratégiques » du pays. Elle a également estimé qu’avec « le Covid, il y avait une baisse de l’arrogance du pouvoir, et là, cela repart ». Elle a jugé face aux débats actuels que « déboulonner des statues n’a pas de sens ».
Emmanuel Macron court derrière « la popularité de son Premier ministre », pour Ségolène Royal
« Il était hors-sol, une fois de plus, répétant des mots clés forgés par des conseillers en communication ». L’allocution d’Emmanuel Macron hier à la télévision n’a pas véritablement convaincu Ségolène Royal, qui attendait davantage de mesures concrètes en faveur du soutien à l’activité. « Il y avait tellement peu de choses sur la relance économique, qui est aujourd’hui la première préoccupation des Français, avec des centaines de milliers d’emplois qui sont menacés et des filières industrielles qui s’écroulent ».
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« On attendait le président de la République sur ce sujet-là », a-t-elle regretté, estimant que le chef de l’Etat a surtout cherché à tirer la couverture à lui, alors « que la popularité de son Premier ministre montait à mesure du déconfinement ».
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Une concurrence entre les deux hommes qui pourrait, selon Ségolène Royal, compliquer la mise en place rapide du déconfinement total des bars et restaurants d’Ile-de-France. Car « pour se garder le monopole de cette annonce », celle-ci a été faite à quelques heures de l’ouverture des établissements, leur laissant peu de temps pour se préparer.
Ségolène Royal voudrait que 70 milliards soient injectés pour la rénovation thermique des bâtiments
Du temps, Ségolène Royal a estimé qu’Emmanuel Macron en avait eu assez pour imaginer l’après-crise et donner des perspectives hier aux Français. « Il a eu trois mois pour réfléchir, trois mois qui auraient dû lui permettre d’annoncer des choses précises. Il n’a pas pris la mesure des urgences, des souffrances et des questions stratégiques », a-t-elle égrainé, avec dans sa ligne de mire le chômage des jeunes, la revalorisation des salaires des soignants et les faillites d’entreprises.
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L’ancienne ministre de l’Ecologie a vanté le plan de relance allemand, avec « 130 milliards d’euros injectés dans l’économie », « 300 euros par enfants pour les familles défavorisées » et la « baisse du taux de TVA dans la restauration ». « Il y a 30% d’augmentation chez les gens qui vont aux Restos du cœur. Il y a une flambée de la précarité. C’est sur ce sujet là que l’on attendait des annonces », a-t-elle insisté.
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Emmanuel Macron a au moins avancé l’idée d’un plan de rénovation thermique des bâtiments pour relancer la croissance. Mais là encore, Ségolène Royal attendait plus. Elle aurait souhaité qu’un montant, « 70 milliards » selon ses souhaits, ait été annoncé.
« Avec le Covid, il y avait une baisse de l’arrogance du pouvoir, et là, cela repart », a critiqué Ségolène Royal
Pour elle, Emmanuel Macron est en train de perdre un temps précieux pour relancer l’économie. Le remaniement ministériel, qui ne devrait avoir lieu qu’en juillet, ajouté aux atermoiements imposés par le calendrier parlementaire pourraient reporter le lancement de l’acte III du quinquennat à septembre.
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Un acte III, dont le ton est déjà contesté par Ségolène Royal. Sur Radio Classique ce matin, le secrétaire général de La République en Marche, Stanislas Guerini, déplorait les débats et les manifestations en cours dans le pays, faisant référence « aux Gaulois réfractaires » dont avait pu parler le chef de l’Etat.
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« Ce n’est pas en insultant les Français qu’on va les mobiliser », a-t-elle fustigé, appelant à ne pas « reprendre l’ancienne des Français réfractaires, qui crée des fractures, alors que c’est le pouvoir en place qui crée des fractures avec ses politiques anti-sociales ». « Avec le Covid, il y avait une baisse de l’arrogance du pouvoir, et là, cela repart », a-t-elle épinglé.
Traite des esclaves : « Déboulonner des statues n’a pas de sens », a jugé Ségolène Royal
Emmanuel Macron s’est montré hier, dans sa prise de parole, dès plus ferme à l’égard de ceux qui voudraient abolir le nom de certaines rues ou abattre des statues de personnalités ayant eu trait avec la traite des esclaves ou la colonisation. Ségolène Royal s’est dite « partiellement d’accord » avec lui. Elle a jugé que « déboulonner des statues n’a pas de sens », tout comme la proposition de l’ancien premier ministre Jean-Marc Ayrault, qui souhaite voir disparaître le nom de Colbert, auteur du Code noir, de l’espace public.
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Mais « en revanche, ce n’est pas à (Emmanuel Macron) de fermer le débat », a-t-elle tranché, préférant que des comités d’historiens ou des commissions parlementaires puissent se charger de faire évoluer la mémoire collective, notamment pour ce qui est de l’Empereur Napoléon, qui a « rétabli esclavage aux Antilles » et édicté « le code Napoléon », grâce auquel « les maris avaient droit de vie et de mort sur leur femme ».
"Déboulonner des statues n'a pas de sens mais ce n'est pas au président de la République de fermer la discussion, des éclairages historiques sont nécessaires."@RoyalSegolene – Présidente de Désir d'avenir pour la Planètehttps://t.co/c0SZYV73HO
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« La manière dont on est formaté laisse un certain nombre de réalités historiques qui est bon de remettre sur la table », a-t-elle conclu.
Nicolas Gomont