Le ministre des Comptes publics, Gabriel Attal, l’a enfin clairement dit hier dans Le JDD : oui, l’exécutif envisage de recourir à l’article 49.3 pour faire adopter le budget 2023. Autrement dit, il est prêt à contourner un vote que la majorité relative macroniste ne peut a priori pas remporter. Si la démarche est logique le plan stratégique, elle n’en demeure pas moins périlleuse sur le plan politique.
49.3 : Beaucoup ont voulu la supprimer, certains ont voulu l’encadrer, personne n’a osé y renoncer
N’est-ce pas Emmanuel Macron qui, justement, revendiquait en 2015 d’avoir fondé son ambition présidentielle sur le passage en force qui lui avait été imposé par l’Élysée sur la loi qui porte son nom ? Un « faites ce que je dis, pas ce que je fais » qui tranche avec le « renouveau démocratique » dont le président s’est fait le héraut, au point de nommer un ministre directement en charge de ce dossier, Olivier Véran. Il n’avait sans doute pas le choix. Il est clair qu’il est plus facile de trouver des compromis avec l’opposition sur des mesures de dépenses, comme cela avait été le cas en juillet dernier pour les lois sur le pouvoir d’achat et le budget rectificatif de l’époque. Mais il n’empêche, quand on s’est soi-même posé comme le chantre d’un prétendu nouveau monde, recourir à l’un des outils les plus controversés de la Constitution fait mauvais genre.
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Cette arme du 49.3 a certes été mise à disposition de l’exécutif par le général de Gaulle. Beaucoup ont voulu la supprimer depuis, certains ont préféré l’encadrer, mais personne n’a encore osé y renoncer, à l’inverse d’un autre élément, qui donne nettement plus la parole au peuple, mais auquel les présidents font nettement moins appel : le référendum. C’est l’outil démocratique le plus chimiquement pur, à condition : d’y recourir, d’abord ; et d’en accepter le résultat, ensuite, y compris quand la question se retourne contre celui qui l’a posée. C’est ce qui avait contraint le général de Gaulle à démissionner, en 1969, lorsque son projet de régionalisation avait été rejeté.
Emmanuel Macron : de l’écologie à la fin de vie, le chef de l’état ne jure que par le référendum… sans en avoir convoqué un seul
C’est une attitude diamétralement opposée à celles de nos gouvernants qui, quelque 40 ans plus tard, ont trahi le verdict des urnes en faisant adopter en 2007 la constitution européenne qui avait été balayée en 2005. Le traumatisme est tel que plus aucun président n’a osé recourir au référendum depuis. Tous en ont en revanche truffé leurs discours, à commencer par Emmanuel Macron : de l’écologie à la fin de vie, le chef de l’État ne jure que par le référendum, sans en avoir jamais convoqué un seul pour l’instant, contrairement au 49.3, donc. Preuve que le « faites ce que je dis, pas ce que je fais », a encore de beaux jours devant lui.
Arthur Berdah