La presse étrangère évoque largement ce matin la disparition de Jean-Paul Belmondo. L’acteur s’est éteint ce lundi 6 septembre à Paris à l’âge de 88 ans. Un hommage national lui sera rendu jeudi 9 septembre dans la cour de l’hôtel des Invalides.
Belmondo : la BBC parle d’un style, d’un visage et d’une personnalité qui ont captivé la jeunesse française dans les années 60
Courrier international et le Parisien reprennent les commentaires des journaux étrangers qui viennent confirmer que la France perd un monument du cinéma, une Tour Eiffel faite acteur. The Hollywood reporter, l’une des publications de référence d’Hollywood, parle de Belmondo comme incarnant une certaine décontraction française. El Pais en Espagne parle de l’icône de la modernité qui a apporté avec lui la Nouvelle Vague, a tourné avec Godard, Truffaut, Chabrol, sans oublier cette image coquine qui lui collait à la peau et faisait son succès. Le Figaro consacre d’ailleurs un article aux femmes de sa vie.
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Chez les Anglais du Guardian, Belmondo était cet acteur au visage de boxeur. Le visage de Belmondo était superbement beau, grossier, terrestre, sexy et réel. La BBC parle d’un style, d’un visage et d’une personnalité qui ont captivé la jeunesse française dans les années 60. « Personne n’a donné autant de sex appeal au crime » renchérit le quotidien allemand Bild. Le New York Times se souvient de son jeu profond, de sa capacité à incarner des personnages difficile et aliénés, à l’instar des stars de l’époque Marlon Brando ou James Dean, en voilà un bel hommage. Quant aux Italiens, ils disent adieu au Magnifique séducteur. Dans le quotidien de Turin La Stampa, rappelle le Parisien-Aujourd’hui en France, on rend hommage à celui qui a au moins vécu 7 vies, aussi agile qu’un chat dans la vie et sur les plateaux.
Belmondo : « En fait, je préfère mourir à la fin ; ça fait toujours un meilleur final et puis ça évite les happy end où la niaiserie n’est jamais loin »
Il y a également de nombreux hommages dans la presse francophone. En Suisse, le journal le Temps évoque un tendre voyou, gouailleur et bondissant. La Libre Belgique célèbre un comédien « mouton noir » devenu l’acteur le plus innovent de sa génération. On peut citer les journaux étrangers, mais ce qui est impressionnant ce matin, c’est que tous vos journaux ont mis en couverture une belle photo de l’acteur. Exceptés L’Opinion et les Echos qui font leur gros titre sur la tentation d’Emmanuel Macron de réformer les retraites, tous vos quotidiens, du Dauphiné au Midi Libre, en passant par le Parisien ou le Télégramme, célèbrent le Magnifique.
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Et puis il y a Libération qui cite Belmondo lui-même : « En fait, je préfère mourir à la fin, ça fait toujours un meilleur final et puis ça évite les happy end où la niaiserie n’est jamais loin » extrait de la biographie de l’acteur. Libération cite aussi un extrait du film Le Marginal : « Je suis mort, vous me regretterez parce que c’était marrant. Souvenez-vous, j’arrivais, je sortais ma plaque et je disais Police, je vous arrête… ». Le magazine Point de vue choisit l’accroche tendre et sensible Belmondo le bien aimé, sur la photo il a 30 ans à peine, pantalon chino bleu ciel, il marche sur une plage en souriant, les mains dans les poches, peut-être une métaphore du paradis.
Belmondo et Gabin dans Un singe en hiver : une rencontre qui partait mal
Je vous recommande une série de 6 articles publiés dans le Monde en juillet 2020 sous la plume de Samuel Blumenfeld, l’une des grandes signatures du journal. 6 articles qui séquencent la vie de Belmondo l’acteur. Sa rencontre avec Godard, puis avec Melville, avec Truffaut, sa passion pour les cascades qui s’illustre notamment dans L’Homme de Rio et puis les années 70-80 lorsque Belmondo devient lui-même producteur de Belmondo, une marque qui écrase tout. Mais l’article à lire dans cette série, c’est la rencontre avec Jean Gabin lorsqu’ils tournent ensemble Un singe en hiver.
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On est en 1962, explique Samuel Blumenfeld. Belmondo est à ce moment-là l’idole du cinéma montant, de la fameuse Nouvelle Vague, il a tourné A bout de souffle avec Godard en 1960. Henri Verneuil lui propose de tourner avec Gabin. Belmondo n’a tourné avec qu’avec de jeunes vedettes, il se cherche un père de cinéma. La carrière de Gabin à l’époque est plutôt derrière lui. Il se méfie, voilà ce qu’il dit de la Nouvelle Vague : « Qu’est-ce qu’ils croient, ces petits morveux, que je suis fini et plus capable de m’intéresser à un genre de cinéma différent du mien ? D’abord en quoi il est nouveau leur cinéma, leurs films racontent des histoires, non ? Eh bien moi je suis pour les histoires. La Nouvelle Vague je sais ce que c’est. La Nouvelle Vague avant la guerre c’était moi ! ». Autant dire que sur le tournage d’Un singe en hiver, Belmondo n’arrive pas en terrain conquis et c’est Michel Audiard qui va les rapprocher avec des dialogues qui mettent en scène un personnage, Belmondo, en pleine ascension et un Gabin déclinant qu’on entend dire à sa femme dans le film « J’ai pas encore les pied dans le trou mais ça vient. J’ai pas eu ma ration d’imprévu ».
Belmondo a tourné avec Annie Girardot et Farah Fawcette dans Un homme qui me plaît, sorti en 1969
Le premier contact se fait dans un café. Belmondo propose de payer les expressos et Gabin réplique « non non, chacun pour soi ». Ambiance. Je vous laisse découvrir la suite sur le site du Monde.
Ce lundi 6 septembre, Radio Classique a rendu hommage à Belmondo en consacrant l’émission Demandez le programme aux musiques des films de Belmondo. Les plus grands ont composé pour les films dans lesquels il a joué. Claude Bolling, Michel Legrand, Michel Magne, Antoine Duhamel, Martial Solal, Georges Delerue, Ennio Morricone, Francis Lai. Je m’arrête à Francis Lai, parce qu’il a notamment fait la musique d’un film dans lequel Lelouch fait tourner Belmondo avec Annie Girardot et Farah Fawcett, ce film s’appelle Un homme qui me plaît, sorti en 1969. Eh bien c’est un drôle de rôle pour Belmondo car il y tient le rôle d’un compositeur de musique de film, figurez-vous. Et quelle musique ! Et il y a une scène incroyable. Belmondo est absent, mais présent sur le visage d’Annie Girardot. Annie Girardot qui l’attend à l’aéroport, elle espère qu’il va descendre de l’avion, elle espère comme toutes les femmes amoureuses. Et son espoir et son désespoir se lisent sur ses traits. Mais Belmondo l’irrésistible, Belmondo l’insaisissable ne descendra plus de l’avion mais il reste les films et la musique.
David Abiker