La mise en scène du Requiem de Mozart qui sera proposée du 20 au 28 janvier au Grand-Théâtre de Bordeaux constituera la première production « zéro achat » d’une maison d’opéra nationale. La production s’est engagée à n’acheter aucun matériel pour la réalisation des décors, costumes et accessoires.
5 grandes maisons d’opéra se sont déjà engagées à réduire leur empreinte carbone
Grand consommateur de décors, l’art lyrique aspire à des pratiques plus sobres comme l’avait évoqué Emmanuel Hondré, le directeur général de l’Opéra National de Bordeaux récemment au micro de Laure Mézan dans Le journal du classique. En décembre, 5 grandes scènes – l’Opéra de Paris, l’Opéra de Lyon, le Théâtre du Châtelet, le Festival d’Aix-en-Provence et le Théâtre Royal de la Monnaie à Bruxelles – se sont ainsi engagées à réduire leur empreinte carbone via la fabrication standardisée d’éléments scéniques.
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L’institution bordelaise pousse la logique plus loin avec ce Requiem de WA Mozart que dirigera Roberto Gonzalez-Monjas dans une mise en scène de Stéphane Braunschweig, sans achat de matériel pour la réalisation des décors, costumes et accessoires. L’essentiel du matériel étant « récupéré » dans les 5.000 m2 de réserve de la maison. « Le décorateur et le metteur en scène voulaient une caisse fermée sur le plateau : on a proposé des cadres de récupération et ils ont choisi des châssis miroirs qui avaient servi pour MacBeth de Giuseppe Verdi (joué à Bordeaux en 2012, NDLR) », indique Pilar Camps, responsable du bureau d’études.
Emmanuel Hondré: « Si on a l’impression d’une scénographie de deuxième ordre, on aura raté notre objectif »
Ainsi, des voiles blancs, utilisés sur le ballet Celestial de Garrett Smith, ont été recyclés, tout comme des fonds, frises et pendillons noirs, et un tapis de danse. De même pour la quarantaine de costumes : le stock de vêtements contemporains a été mis à contribution, avec les retouches nécessaires. La production a aussi fait appel à des circuits alternatifs pour se procurer certains éléments: un fabriquant de caisses de vin a fait un don de planches de bois pour fabriquer 18 cercueils, à l’allure volontairement rudimentaire. Une partie des tenues a été créée à partir de pièces récupérées auprès d’une friperie solidaire et un spécialiste du vêtement professionnel a pioché dans ses invendus pour fournir des tee-shirts, dits « de propreté » que les artistes portent sous leurs costumes.
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Pas question cependant que la démarche environnementale et budgétaire (quelque 40.000 euros d’économies) l’emporte sur le projet artistique: « Si on a l’impression d’une scénographie de deuxième ordre, on aura raté notre objectif », estime Emmanuel Hondré qui voit dans l’expérience « une autre manière d’être créatif » estime Emmanuel Hondré, et d’ajouter : « Le zéro achat, c’est aussi replacer l’Opéra dans une continuité d’activités beaucoup plus large que le spectacle, et il en a besoin ».
Philippe Gault (avec AFP)